Né en 1880, Paul Doncœur perçoit l’appel de Dieu à l’âge de 11 ans, le jour de sa première communion. Entré au noviciat des jésuites, il subit l’exil, comme toutes les congrégations religieuses françaises. Il poursuit alors ses études en Belgique avant d’être ordonné prêtre en 1912.
Au début de la Première Guerre mondiale, le jeune jésuite devient aumônier dans l’infanterie. Il s’y distingue par sa bravoure et son dévouement. Il sillonne sans cesse le no man’s land avec les infirmiers afin de récupérer les blessés, administrer les mourants, ramasser les cadavres. À la fin de la guerre, il considère de son devoir d’offrir, autant que possible, une sépulture décente aux soldats morts sur le champ d’honneur. C’est pourquoi, avec une équipe d’anciens combattants, il parcourt pendant un an les champs de bataille pour ramasser les ossements anonymes et édifier un calvaire à la mémoire des soldats morts.
Un idéal de dévouement
Meurtri par la violence de l’anticléricalisme français et par ses années d’exil, le Père Doncœur restera très marqué par la guerre. Ces deux épreuves sont déterminantes pour comprendre ses engagements futurs. Il souhaite garder vivace l’idéal de sacrifice des soldats de la Grande Guerre, et il cherche à former la jeunesse afin de remplacer ces hommes morts pour leur pays. En 1924, il fonde le mouvement des Cadets avec l’intention de révéler à tous les jeunes « la splendeur de la vie humaine par un christianisme intégral ». Il devient aussi l’un des principaux orateurs de la Ligue des droits du religieux ancien combattant (DRAC) et collabore à France Catholique, également fondée en 1924 par le général de Castelnau.
Cette année-là, le Père Sevin l’invite à participer au camp de sa troupe, en forêt de Chantilly. Le Père Doncœur est séduit par le scoutisme, surtout par sa branche aînée. Il voit dans ce mouvement la possibilité de façonner une génération de bâtisseurs et de saints.
Il devient alors l’aumônier de la Route et lui insuffle une puissante dimension religieuse. Il fait en sorte que les Routiers approfondissent leur foi, afin qu’elle sorte de l’enfance et de l’adolescence et qu’elle devienne adulte. Le Routier doit être sûr de sa foi, estime-t-il, sûr de ce qu’il est, avant de pouvoir donner et servir. Il doit comprendre, rajoute-t-il, que la foi est la plus belle chose qu’un homme puisse posséder.
Dépassement spirituel
Le Père Doncœur propose aux Cadets et aux Routiers un exigeant programme de vie, où le dépassement physique va de pair avec le dépassement spirituel. La fréquence des confessions et des communions est la clef de ce mode de vie, ainsi que la lecture assidue de l’Évangile, qui doit devenir « le livre de toutes les solutions », selon l’expression du Père Doncœur. Il désire voir la jeunesse vibrer pour le Christ, il désire lui révéler que « le christianisme est une force, la force animatrice de tout l’être ».
Le Père Doncœur propose ce qu’il appelle un « christianisme positif », et non pas un moralisme négatif qui pourrait les dégoûter. Il estime que les jeunes veulent « adhérer à des vérités et non pas seulement se défendre d’erreurs ; embrasser des vertus et non pas uniquement trembler devant les vices ; […] ils veulent qu’on nourrisse à sa faim leur ambition juvénile, leur cœur et leur volonté ».
Une élite religieuse aguerrie
L’objectif du Père Doncœur était de redresser la société par la formation d’une élite religieuse aguerrie physiquement et spirituellement. Il avait le tempérament d’un croisé, désireux de reconquérir la terre de France pour l’offrir au Christ. Mais c’était un croisé franc-tireur, rétif de nature à toute institutionnalisation, et supportant mal les collaborations parfois nécessaires. Égaré après 1940 dans un monde que lui-même disait ne plus comprendre, il est cependant toujours resté un éveilleur d’hommes, avec le don de porter les autres à un niveau qui les dépasse.