Nullités de mariage : un divorce catholique ? - France Catholique
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Nullités de mariage : un divorce catholique ?

L’augmentation des reconnaissances de nullité de mariage rend-elle encore le mariage chrétien indissoluble ?
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Mariage en l'église Saint-Ambroise.

Le consentement de deux baptisés, puisqu’il a été élevé par le Christ à la dignité de sacrement, crée un lien indissoluble. © Philippe Lissac / Godong

«Ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas » (Mt 19, 6). La doctrine est claire et inamovible : le mariage sacramentel, célébré entre deux baptisés, crée un lien sacré. Un mariage ne peut donc pas être « annulé ». L’indissolubilité du lien conjugal est en effet l’un des éléments fondamentaux du sacrement du mariage, que l’on appelle parfois les « piliers », qui appartiennent en réalité à deux catégories distinctes : les buts du mariage – la transmission de la vie et le soutien mutuel des époux – et ses propriétés essentielles : la liberté du consentement, l’unité – un seul homme et une seule femme – et l’indissolubilité.

Le mariage fait par le consentement

Le mariage est en effet un cas particulier parmi les sept sacrements, canaux efficaces de la grâce divine communiquée par le Christ à travers l’Église : sa validité repose sur le consentement que se donnent mutuellement les époux et qui constitue le lien et le sacrement, dont ils sont ainsi les ministres. Selon les termes du mariage chrétien, ce consentement est engagement mutuel à se recevoir comme époux et épouse.

Irrévocable, il peut cependant être rendu nul – au sens juridique du terme, c’est-à-dire invalidé – par deux types de facteurs : soit les parties ne sont pas aptes à s’engager l’une envers l’autre, soit leur engagement libre, au moment où il est posé, est vicié par un élément interne ou externe. Dans ces cas, le lien du mariage n’est pas créé : apparent mais non réel, il n’a jamais existé.

L’Église a seule la charge de témoigner de la validité du mariage. Elle seule peut donc juger et prononcer la nullité d’un lien qu’elle avait jusque-là considéré comme valide. Il ne s’agit pas d’une « annulation » du mariage, car le lien conjugal n’avait jamais existé réellement, mais d’une « reconnaissance de nullité ». Lorsqu’il est validement contracté en revanche, le lien du mariage, puisqu’il est sacré, ne peut être brisé par aucun facteur humain, ni par l’Église elle-même. En effet, le consentement de deux baptisés, puisqu’il a été élevé par le Christ à la dignité de sacrement, crée un lien indissoluble.

La raison en est double :
– au plan naturel, seule l’union fidèle et perpétuelle des époux peut accomplir la radicalité du don total que réalise le mariage, en même temps qu’elle offre aux enfants qui en seront les fruits le meilleur cadre d’épanouissement. Elle permet donc d’atteindre au mieux les fins du mariage – et même du mariage naturel, entre des non-baptisés, qui ne serait pas un sacrement mais que l’Église respecte et considère également comme un engagement irrévocable ;

– au plan surnaturel, le mariage a reçu du Christ, qui l’a élevé à la dignité de sacrement, une signification transcendante qui lui donne une dimension entièrement nouvelle. « Ce sacrement est grand, nous dit saint Paul, je le dis du Christ et de l’Église » (Ep 5, 32) : le foyer chrétien est appelé à refléter, par l’amour totalement donné qui unit ses membres, l’union du Christ et de l’Église, charité allant jusqu’au don sans réserve de sa propre vie.

Le lien sacré du mariage, trésor pour l’Église

L’Église, qui a reçu du Christ ce rôle d’attester de la validité du lien sacré du mariage, en prend soin : une fois créé, elle le protège contre les atteintes extérieures et commande aux sociétés civiles de faire de même. Avant les noces, sa tâche est d’y préparer soigneusement les époux, un devoir dont les pasteurs, encouragés par les papes depuis Pie XI notamment, prennent aujourd’hui une conscience accrue. Il s’agit de donner aux futurs époux les moyens de discerner librement et de s’engager en pleine connaissance de leur conjoint – la préparation recouvre donc une nécessaire composante humaine et psychologique, à laquelle les clercs associent volontiers des laïcs – et des engagements du mariage : les fameux quatre piliers mentionnés ci-dessus, car il s’agit de savoir ce à quoi on s’engage.

Dans la tempête qui déferle aujourd’hui contre les institutions naturelles des sociétés, et avant tout contre la cellule de base que constitue la famille, le mariage est particulièrement malmené. Le soin que l’Église prend à préparer et accompagner les époux représente plus que jamais une nécessité cruciale, dont elle prend chaque jour plus profondément conscience. Ce n’est qu’en vertu de sa mission de témoigner de la validité du consentement que l’Église peut aussi, parfois, avoir à en reconnaître la nullité.

La simplification de ces procédures, aujourd’hui plus accessibles et courtes, explique pour partie leur relative augmentation au cours de la dernière décennie. Et si les procès engagés aboutissent fréquemment à une reconnaissance de nullité, c’est aussi parce que les avocats ecclésiastiques opèrent un tri préalable pour éviter d’engorger les rares tribunaux disponibles.

Malgré tout, reconnaître la nullité d’un mariage n’est jamais une victoire, ni toujours un baume versé sur les blessures affectant les conjoints et, plus encore, les enfants. Mais si le mariage chrétien semble souvent fragile et malmené, n’est-ce pas avant tout le symptôme d’une crise plus profonde de la liberté et de l’engagement ?

Retrouvez cette chronique sur sur claves.org, le site de formation chrétienne de la Fraternité Saint-Pierre.