La Rose blanche, une résistance chrétienne face au nazisme - France Catholique
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La Rose blanche, une résistance chrétienne face au nazisme

Exécutés il y a 80 ans par le régime nazi, les jeunes résistants chrétiens de la Rose blanche sont un modèle pour la jeunesse d’aujourd’hui. Entretien avec Henri Peter, qui retrace leur histoire dans son dernier livre.
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Sophie Scholl (1921-1943), Hans Scholl (1918-1943), résistants chrétiens au nazisme.

Au cœur de la Rose blanche, il y a un frère et une sœur : Hans et Sophie Scholl…

Henri Peter : Issus d’une famille luthérienne très pieuse, leur résistance au nazisme a été le fruit d’un long basculement, lorsqu’ils réalisèrent qu’ils étaient manipulés par le régime national-socialiste. Dès 1937, à cause de leur participation à un mouvement de jeunesse interdit par le régime, Hans est emprisonné et Sophie intimidée. Ils touchent alors de près la brutalité du régime. En parallèle, Otl Aicher, fervent catholique antinazi et ami de leur petit frère Werner, les introduit dans le milieu du catholicisme allemand. À cette époque, beaucoup de ceux qui étaient horrifiés par le régime se réfugiaient dans une résistance intérieure, en se réunissant pour discuter du régime, sans jamais protester publiquement. Un jour de juin 1942, dans une de ces réunions, Hans se lève et déclare : « Cela suffit de discuter : il faut agir. » Dès lors, ils entrent dans une opposition radicale et totale : c’est la naissance du mouvement de la Rose blanche. Ils s’organisent à leur petite échelle pour diffuser des tracts d’une grande virulence contre le régime.

Ces tracts causeront leur perte, bien que diffusés à peu d’exemplaires…

Entre le 15 et le 18 février 1943, ils en distribuent dans l’université de Munich, fustigeant le régime nazi. Mais Sophie Scholl est surprise par un appariteur, qui prévient la Gestapo, qui parvient à les arrêter. Le 22 février, ils sont jugés par une caricature de Cour de Justice et exécutés.

Dans quelle mesure leur foi conduisait-elle leur action ?

Elle l’a illuminée. Parmi les intellectuels qu’ils ont rencontrés, le philosophe catholique Theodor Haecker (1879-1945) a eu sur eux une influence capitale. Il leur a fait comprendre que le chrétien ne peut pas échapper à l’Histoire. Si les temps sont mauvais, il ne peut pas fuir. C’est la parabole des talents ! Dans son ouvrage Virgile, père de l’Occident, Haecker développe l’idée selon laquelle nous ne sommes plus dans une conception antique du destin, que nous devrions subir tels des jouets. Au contraire, nous devons exercer notre liberté, même si cela doit nous faire courir le risque de la mort.

Ce risque, les membres de la Rose blanche l’ont pris magnifiquement. Un écrit de Hans du 9 août 1942 me touche beaucoup. Il résume tout : « Le nihilisme spirituel a été un grand péril pour la culture européenne. Mais dès qu’il a connu son ultime conséquence dans la guerre totale, à laquelle nous avons fini par succomber et où il a voilé le ciel magnifique sous une mer de nuages gris, il a été vaincu. Après le néant, plus rien ne peut venir. Mais il faut bien quelque chose arrive, parce que toutes les valeurs ne sauraient être détruites chez tous les hommes, et qu’il existe toujours des gardiens pour rallumer la flamme et la transmettre de l’un à l’autre, jusqu’à ce qu’une nouvelle vague de renaissance submerge la terre. Le voile gris des nuages sera pour ainsi dire déchiré par le soleil d’un nouveau réveil religieux. »

En quoi sont-ils un modèle pour la jeunesse ?

Ils ont forgé leur maturité au contact des événements. Sophie, par exemple, a refusé de transiger avec ce qu’elle estimait être le mal. Elle a pris le risque de bousculer son fiancé, pour réussir à le convaincre du bien-fondé de son opposition. On peut être tenté de se réfugier dans l’immaturité en disant que le monde est mauvais et qu’il suffit de s’occuper de sa petite vie… Sophie Scholl elle-même s’était sentie vaciller face à cette question : le mal ne finira-t-il pas par triompher ? Et pourtant, cela ne l’a jamais empêchée d’agir malgré tout. Haecker avait bien repéré cette angoisse chez elle. Il a réussi à lui faire comprendre que même dans les circonstances les plus dramatiques, la conscience survit et l’amour sauve. C’est pourquoi, une fois dans la résistance radicale, leur main n’a pas tremblé. Car les membres de la Rose blanche avaient compris qu’en refusant le relativisme, qu’en cultivant sa conscience et sa liberté, ils devenaient alors libres de maîtriser leur destin. 

La Rose blanche. Des résistants chrétiens contre le nazisme, éd. Via Romana, 2024, 336 pages, 25 €.