Illumination d’artiste ? Originalité d’un poète ? Toujours est-il que notre Estelle ne sort de sa discrète dévotion que par la volonté de Frédéric Mistral en 1854. Mais pourquoi donc ce défenseur de la Provence prend-il pour son École poétique provençale – le Félibrige – une sainte des Charentes ? L’histoire raconte que c’est à cause de son nom, qui signifie « étoile », symbole riche pour l’avenir de cette association.
Fille d’un officier romain, Estelle est convertie par Eutrope, premier évêque de Saintes. Une fois baptisée, elle se met au service de ce saint prélat et devient sa collaboratrice. L’affaire ne plaît pas au père. Pour simplifier l’affaire, il fait assassiner l’évêque. D’un coup de hache, il lui fend le crâne. Estelle, triste et pieuse, vient ensevelir le corps d’Eutrope. La chose déclenche la fureur de son père : il envoie sa garde pour qu’Estelle subisse le même sort que son évêque. Ainsi fut fait ! Sans hésitation aucune. C’était au IIIe siècle.
Frédéric Mistral
Enfant déjà, Frédéric Mistral (1830-1914) fut soumis aux coutumes provençales. Quand il eut six mois, on le porta à l’église du village pour qu’il fît ses premiers pas sur l’autel de saint Joseph. Brillant étudiant, esprit vif et engagé, Mistral consacre sa vie à défendre et faire connaître la langue de Provence. C’est dans un poème consacré à saint Anselme, qu’il donne vie au terme « félibre », qui désigne désormais tout poète provençal de langue d’oc. Le Félibrige désignant l’association dont sainte Estelle devient la patronne.
« Il est, il restera catholique et latin » dit-on de ce chantre méridional. « J’ai été heureux…, dit-il, et, si je le pouvais, je ne voudrais pas recommencer la vie… C’est que je crois à l’au-delà. »
Sur sa tombe, il fait graver ces mots tirés de la Bible mais arrangés à sa façon : « Non mihi, Domine, sed nomini tuo et Provinciae nostrae da gloriam », « Non pas à moi, Seigneur, mais à ton Nom et à notre Province, donne la Gloire. »
Pensée spirituelle de Frédéric Mistral
« Perdre la foi de son enfance est un vrai malheur, car il n’y a rien sur terre qui puisse relever l’homme qui, pour horizon, n’a plus que le tombeau. »
Courte prière tirée d’une œuvre de Frédéric Mistral
« Seigneur, nous sommes tes enfants prodigues, mais nous sommes tes vieux chrétiens… »