Constitutionnalisation de l'avortement : où est le débat de fond ? - France Catholique
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Constitutionnalisation de l’avortement : où est le débat de fond ?

Les débats parlementaires n’ont pas permis d’aborder les questions essentielles, au-delà d’une posture politique.
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Députés et sénateurs réunis en Congrès à Versailles le lundi 4 mars ont approuvé la constitutionnalisation de l’interruption volontaire de grossesse.

© Mathias Reding / unsplash

Le 28 février, dans une Haute Assemblée dominée par la « droite », il ne s’est trouvé que 50 sénateurs sur 348 – moins de 15 % – pour voter contre la constitutionnalisation de l’interruption volontaire de grossesse. 267 l’ont approuvée, les autres s’abstenant ou ne participant pas au vote. Aussitôt convoqué par Emmanuel Macron, le Congrès s’est réuni à Versailles le 4 mars, approuvant la constitutionnalisation de l’interruption volontaire de grossesse par 780 voix pour, 72 contre et 50 abstentions.

Sans attendre, les partisans du projet avaient célébré leur victoire dès le 28 février : « Le dernier verrou a sauté. […] Nous écrivons l’histoire », s’est ainsi réjouie, sur X, Mathilde Panot, députée de La France insoumise à l’origine de cette réforme, à l’unisson de la ministre chargée de l’égalité entre les hommes et les femmes, Aurore Bergé, qui, ayant commencé sa carrière politique à droite, a rallié Emmanuel Macron en 2017.

Le projet de loi constitutionnelle a donc été examiné sans qu’aucun argument de fond n’ait pu être posé. Au Sénat, deux amendements ont été discutés. Certains sénateurs ont fait valoir qu’en garantissant à la femme la liberté d’avorter, on transformait cette liberté en « droit opposable » bien plus contraignant pour les soignants – et pour l’État – que ne l’avouaient les rédacteurs de ce texte. Mais les sénateurs ont rejeté l’amendement de suppression déposé par Philippe Bas (LR)… qui a finalement voté le projet du gouvernement ! Ils n’ont pas non plus voulu constitutionnaliser la clause de conscience des médecins et des sages-femmes, comme le proposaient Bruno Retailleau et Alain Milon.

Mais aucun parlementaire n’a vraiment porté le débat sur le terrain de la vie et du respect et des droits des enfants à naître. Et rien ou presque n’a été dit des souffrances des femmes qui, souvent contraintes à l’avortement sous la pression de leur entourage, en supportent de douloureuses séquelles. « Selon un sondage de l’IFOP de 2020, 92 % des femmes déclarent que l’avortement laisse des traces difficiles à vivre », souligne Grégor Puppinck, directeur du Centre européen pour le droit et la justice.

Pressions

Pas de propositions non plus sur l’accompagnement des femmes enceintes, dont beaucoup garderaient leur enfant si elles étaient soutenues, moralement ou matériellement. Contrairement à ce que proclame ce texte, « la réalité sociale montre que l’avortement n’est pas une liberté, ni un véritable droit, poursuit Grégor Puppinck. Le plus souvent, l’avortement est subi et non choisi. Plus une femme est pauvre et isolée, plus elle a de risques de subir un avortement et d’en souffrir psychiquement ».

Pourquoi cette pusillanimité ? « Beaucoup de parlementaires plutôt interrogatifs, voire réservés sur cette constitutionnalisation, n’ont pas réussi à résister aux pressions du politiquement ou médiatiquement correct. Prisonniers de l’air du temps, ils ont craint de se ringardiser par leur vote », analyse dans un communiqué Mgr Matthieu Rougé (Nanterre). Plus encore, la « culture de mort » – que Jean-Paul II associait, dans l’encyclique Evangelium vitæ, à une « conception utilitariste de la société » – semble à ce point imprégner notre époque qu’il se trouve assez de parlementaires pour vouloir l’inscrire dans notre « loi fondamentale » et trop peu pour oser le refuser.