Il était furieux. Il savait parfaitement qui elle était et ce qu’elle aurait comme mission. Il n’allait tout de même pas la laisser faire. Par tous les moyens, il faut entraver sa route, il faut la maltraiter, il faut la rendre malade, il faut qu’elle passe pour une cinglée, il faut l’humilier sans cesse. Et il faut commencer très tôt, à l’instant où encore personne ne soupçonne ce qu’elle va faire.
Oui, il sait tout, celui-là, il enrage. D’une rage comme il n’en avait pas eu depuis longtemps. Surtout qu’il va falloir qu’il s’occupe d’une autre créature qui va naître à 300 kilomètres de là, dans les montagnes, juste deux mois après, et qui va lui causer bien des soucis si on la laisse faire !
Il est plein de haine. Il n’a pas un brin d’amour en lui. Sa vie, c’est de faire du mal. Il ne supporte ni l’adoration, ni la bonté. Son nom, vous l’avez deviné, c’est Satan, accompagné de ses sbires. Il a d’autres déguisements à sa disposition. Il s’appelle : Menteur, Diable, Grappin, Lucifer, Adversaire, Démon et mille autres dénominations qui veulent faire peur.
Deux confidentes
Qui sont ces deux jeunes filles ? L’une s’appelle Marguerite Alacoque et l’autre Benoîte Rencurel (ce sera toute l’histoire de Notre-Dame du Laus). L’une va être la confidente de Jésus et l’autre de Marie. Il faut les réduire à rien. Ainsi, il prend – littéralement – Benoîte avec son berceau et il la jette dans la montagne.
Parlons de Marguerite. Son sort doit être cruel. Comme elle vit dans une bonne famille aimante, il faut qu’elle souffre. Son père meurt. Elle est confiée à trois mauvaises personnes : grand-mère, grand-tante et tante. Elles sont d’une méchanceté inouïe. On dirait aujourd’hui que c’est de la maltraitance. Pourtant Marguerite est joyeuse, aimable, aimée. Mais elle est un peu bizarre. Elle semble dans la lune. Elle rêve. Pourtant non, elle ne rêve pas. Elle aime le Bon Dieu et elle offre déjà toutes les souffrances qu’on lui fait endurer. Et Satan se déchaîne. Deux de ses jeunes frères meurent. Un coup terrible pour sa maman et pour elle, toujours aussi gentille. Elle, elle sait ce qu’elle veut : devenir religieuse à la suite de saint François de Sales et nulle part ailleurs. On cherche à la marier, on la veut chez les clarisses ou chez les ursulines. Elle résiste. À l’évocation du monastère de la Visitation de Paray-Le-Monial, elle sait que c’est là qu’elle va vivre et qu’elle mourra. Pourtant, ce n’est pas une vie toute moelleuse qu’elle va trouver. Les vieilles Sœurs se moquent d’elle, même ses supérieures, tout en reconnaissant sa valeur religieuse, trouvent le moyen de l’humilier. On la menace de la chasser, on l’oblige à des pénitences effroyables. Elle est malade quand elle mange du fromage, on va lui en donner. Elle est maladroite dans ses services, on l’accable devant la communauté, elle se plaît dans un emploi, on le lui retire pour lui en donner un autre plus dur.
Les secrets de son amour
Marguerite, devenue Sœur Marguerite-Marie, n’en continue pas moins de prier, de recevoir de grandes consolations intérieures. Jésus lui parle. Il lui confie de grands secrets sur son amour, sur son Cœur qui est « si peu aimé des hommes ». Elle veut « être sainte à tout prix, et pour cela s’abandonner et sacrifier à tout, sans aucune réserve ni ménagement ». Jésus lui demande de propager dans le monde la dévotion à son Cœur Sacré. Comment faire ? Un jeune prêtre – il s’appelle Claude – arrive à Paray. C’est lui qui immédiatement la croit, prend au sérieux ses révélations. Il est bien gênant celui-là. Au bout de quelques mois il est envoyé en Angleterre, loin de Marguerite-Marie. Il tombe malade et revient épuisé à Paray. Pourtant, échappant à tous les obstacles sans jamais sortir de la Visitation, Marguerite-Marie voit fleurir le culte au Cœur de Jésus, s’instituer la fête en son honneur. Un peu plus tard Léon XIII fera la « Consécration du genre humain au Sacré-Cœur ».
Satan a perdu la bataille. Voilà la belle histoire de celle que vous pouvez regarder triomphante dans la mosaïque de l’immense basilique du Sacré-Cœur de Montmartre !