On considère généralement que la doctrine de la Trinité, étant le propre du christianisme, n’a été révélée que par le Christ et ne se trouve exprimée que dans le Nouveau Testament. On insiste alors sur le fait que cette révélation ne pouvait que dérouter, voire scandaliser les Hébreux, enclins à y percevoir une forme de polythéisme.
Assurément, la révélation explicite de la Trinité ne se trouve que dans le Nouveau Testament (cf. n° 3815) ; mais on se tromperait si l’on pensait que l’Ancien Testament n’en comporte pas quelques pressentiments, quelques annonces, « comme en énigme et en miroir » et que certains rabbis d’avant le Christ n’avaient pas entr’aperçu la possibilité d’une sorte de pluralité au sein de l’essence éternelle.
L’Église et la Synagogue
Un auteur juif, très fameux en son temps et malheureusement oublié, peut nous aider à nous en rendre compte : il s’agit de David-Paul Drach (1791-1865), rabbin alsacien converti au catholicisme, auteur d’une monumentale Harmonie entre l’Église et la Synagogue [1844], et qui occupa pendant plus de dix ans, à Rome, les fonctions de bibliothécaire de la Congrégation pour la propagation de la foi.
Puisant dans les trésors d’une érudition infinie, possédant à fond non seulement l’Écriture hébraïque mais encore les moindres recoins du Talmud – le commentaire perpétuel de la Torah – et du Zohar – livre de base de la mystique juive –, Drach s’attache à montrer que l’Ancien Testament fourmille de préfigurations de la Trinité… et que ces dernières ne sont pas passées inaperçues aux yeux de certains commentateurs juifs. « Quiconque, écrit-il carrément, est familiarisé avec ce qu’enseignaient les anciens docteurs de la Synagogue, surtout ceux qui ont vécu avant la venue du Sauveur, sait que la Trinité en un Dieu unique était une vérité admise depuis les temps les plus reculés. » Je retiendrai ici trois exemples pour en donner une idée.
Pluriel et singulier
Il y a d’abord l’étrange pluriel, au livre de la Genèse, quand Dieu dit « Faisons l’homme à notre image » (1, 26). Un Français, bien sûr, serait tenté de l’interpréter comme un banal pluriel de majesté, mais cette tournure n’existe pas en hébreu. Les commentateurs doivent donc l’affronter. Dieu s’adresserait-il à des anges ? Hypothèse peu convaincante car ils n’apparaissent nulle part dans ce chapitre… Le Talmud (Sanhédrin, 38) reconnaît honnêtement que « le verset 26 dépose en faveur de ceux qui enseignent qu’il y a plusieurs Dieux, mais qu’ils sont réfutés par le verset subséquent qui emploie le singulier ». L’entrelacs permanent du pluriel et du singulier dans le texte demeure une sorte d’énigme… que seule la doctrine de la Trinité résout vraiment.
Retrouvez l’article complet dans le magazine.
Pour aller plus loin :
- Le rite et l’homme, Religion naturelle et liturgie chrétienne
- La France et le cœur de Jésus et Marie
- LA « MODERNITÉ » : UN CENTENAIRE OUBLIÉ
- EXHORTATION APOSTOLIQUE POST-SYNODALE « AFRICAE MUNUS » DU PAPE BENOÎT XVI
- Eléments d’anthropologie philosophique permettant de comprendre l’humanité de l’embryon - l’être en puissance, actualité et information