Qui est le Dieu de Pascal ?
Hélène Michon : C’est d’abord celui de la Bible : un Dieu qui se révèle et qui sauve. Il sauve l’homme, qui se reconnaît pécheur et éprouve alors un besoin irrépressible d’être racheté, sauvé. Le Dieu de Pascal est un Dieu qui se laisse chercher mais qui, surtout, se laisse trouver. Une fois trouvé, il importe de ne le plus perdre, rappelle le Mémorial : « Jésus-Christ, Jésus-Christ, / Je m’en suis séparé. Je l’ai fui, renoncé, crucifié. / Que je n’en sois jamais séparé. »
Existe-t-il une forme de prière « pascalienne » ?
Dans une formule lapidaire, Pascal explique : « Nos prières et nos vertus sont abominables devant Dieu si elles ne sont les prières et les vertus de Jésus-Christ. » Le trait le plus marquant de sa vie spirituelle est la centralité du Christ, unique chemin pour aller au Père. C’est pourquoi sa vie se voulut imitation de Jésus-Christ : « J’essaye d’être juste, véritable, sincère, et fidèle à tous les hommes. Et j’ai une tendresse de cœur pour ceux à qui Dieu m’a uni plus étroitement. Et soit que je sois seul, ou à la vue des hommes, j’ai en toutes mes actions la vue de Dieu, qui les doit juger et à qui je les ai toutes consacrées. Voilà quels sont mes sentiments. »
L’humilité et la pauvreté sont l’objet de sa prédilection. De même que sa théologie est essentiellement eschatologique et se préoccupe de l’unique question du salut, sa dévotion est uniquement christologique. On ne trouve pas de développement sur la Vierge ou d’autres saints.
Quelle est la place de la Passion dans sa spiritualité ?
Pascal a écrit cette phrase célèbre : « Jésus est en agonie jusqu’à la fin du monde, il ne faut pas dormir pendant ce temps-là. » Le mystère de la Croix est central dans sa spiritualité – il a rédigé un Mystère de Jésus, longue méditation sur Jésus à Gethsémani – mais il nourrit aussi une fascination pour le prologue de saint Jean qu’il reprend et paraphrase dans son Abrégé de la Vie de Jésus-Christ. Enfin, le culte de l’Eucharistie, noyau de la spiritualité de Port-Royal, est au cœur de la dévotion pascalienne qui y voit le Dieu caché, le Deus absconditus. Dieu incarné, Dieu souffrant et Dieu caché sont les trois attributs de Dieu chez Pascal.
Quel est donc son rapport à l’Eucharistie qu’il réclame sur son lit de mort ?
Le récit de sa mort nous permet de comprendre l’ecclésiologie de Pascal qui voit dans l’Eucharistie la tête de l’Église – le Christ vivant –, et dans les pauvres son corps. Ainsi, pris de nausées, comme on lui refuse la Communion, il s’écrie : « Puisqu’on ne me veut pas accorder cette grâce, j’y voudrais bien suppléer par quelque bonne œuvre, et ne pouvant pas communier dans le chef, je voudrais bien communier dans ses membres ; et pour cela j’ai pensé d’avoir céans un pauvre malade à qui on rende les mêmes services comme à moi, qu’on prenne une garde exprès, et enfin qu’il n’y ait aucune différence de lui à moi, afin que j’aie cette consolation de savoir qu’il y a un pauvre aussi bien traité que moi. »
Retrouvez l’entretien complet dans notre numéro spécial.
— Se convertir à Dieu avec Blaise Pascal, Hélène Michon, éd. du Carmel, mars 2023, 224 pages, 21 €.
— Se convertir à Dieu avec Blaise Pascal, Hélène Michon, éd. du Carmel, mars 2023, 224 pages, 21 €.