«Christ est ressuscité ! Il est vraiment ressuscité ! » Cette salutation qu’échangent les chrétiens au sortir de la Veillée pascale exprime le sommet de la joie et de la certitude d’accéder à une vie nouvelle. On comprend, toutefois, que pour ceux qui ne partagent pas notre foi, cette résurrection constitue la plus déconcertante des énigmes. Ne va-t-elle pas à l’encontre des données de l’expérience d’un chacun ? Nos corps sont mortels, promis à la décomposition et aux cendres. Se réclamer de l’exemple contraire unique de la Résurrection du Christ, c’est provoquer un étonnement plus que compréhensible. Les lois de la nature peuvent-elles être ainsi transgressées ? Ne sommes-nous pas dans un domaine mythologique qui relève de l’imagination ? L’Antiquité a connu le mythe d’Orphée avec sa descente aux enfers, mythe qui a inspiré bien des modernes en quête d’une transcendance de substitution, mais bien conscients de son incapacité à dépasser la certitude de la révélation chrétienne.
Un événement discret
Car il y a bel et bien certitude. Le Ressuscité s’est révélé d’abord à Marie-Madeleine, aux apôtres et à une multitude de disciples, ouvrant une dimension inédite, qui se situe entre ici et ailleurs. Comme le note Hans Urs von Balthasar, Marie-Madeleine, le matin de Pâques, quand elle retrouve son Seigneur, le découvre alors qu’il n’est pas encore remonté vers le Père. Il se trouve à mi-chemin entre la mort et la vie, les enfers et le Ciel. Elle ne saurait donc le retenir ici : « Noli me tangere ! » car il est promis à son retour vers le Père.
Tout ceci se déroule d’ailleurs dans une discrétion étonnante. Pascal parle même d’un événement qui se déroule en secret. Il ne s’agit pas, en effet, d’étonner un auditoire, de surprendre le monde, d’ébahir les incrédules. Dans la Résurrection, le Christ révèle, aux yeux de la foi, son identité plénière. Et c’est parce qu’ils ont reçu cette révélation que les témoins seront amenés à en rendre compte à la terre entière. L’apostolat ne s’accomplit pas sur le mode de ce qu’on appelle le prosélytisme au sens publicitaire. La Bonne Nouvelle s’adresse spécifiquement à chacun dans sa langue, de telle façon que chacun soit touché là où le secret rencontre son propre secret.
La rencontre du Ressuscité
On ne saurait oublier le cas du dernier témoin de la Résurrection, Paul de Tarse, auquel a échu l’étonnant privilège de la vision sur le chemin où s’est opérée sa radicale conversion : « Sachez-le, mes frères, l’Évangile que j’ai annoncé n’est pas à la mesure humaine : ce n’est pas non plus d’un homme que je l’ai reçu ou appris, mais par une révélation de Jésus Christ. »
Tous ceux qui ont prétendu que l’apôtre des nations était le véritable fondateur du christianisme ont refusé d’admettre cette rencontre décisive avec le Ressuscité. Rencontre qui est à l’origine de l’Église et qui continue à susciter la plus joyeuse des salutations : Christ est vraiment ressuscité !