À quoi sert une indulgence ? - France Catholique
Edit Template
« Ô Marie conçue sans péché »
Edit Template

À quoi sert une indulgence ?

La doctrine des indulgences, quoique mal comprise, connaît un renouveau. Il s’agit d’un trésor du pardon divin, à utiliser pour nous ou nos défunts. Entretien avec Don Thomas Lapenne, CSM, du sanctuaire de Montligeon.
Copier le lien
Notre-Dame-du-Port, Clermont-Ferrand

Notre-Dame-du-Port, Clermont-Ferrand

© Julian Kumar / Godong

À quoi sert une indulgence ?

Don Thomas Lapenne : Pour comprendre la belle doctrine des indulgences, il faut d’abord comprendre que le péché a une double conséquence en nous : la faute – l’offense proprement dite – et le désordre introduit par la faute. Le péché entraîne la rupture de la communion avec Dieu, alors que l’âme humaine est faite pour vivre dans la grâce de Dieu. Le péché est effacé par le pardon, dans le sacrement de réconciliation, mais il reste en nous des traces, des résidus du péché, comme des plaies non cautérisées. C’est l’image du vase brisé : il ne suffit pas de demander pardon après l’avoir cassé, il faut réparer le dommage causé.

En toute justice, il y a donc une dimension de réparation, fondamentale pour rétablir l’harmonie blessée par le péché et ses conséquences. Le péché a introduit un désordre que l’on nomme « peine temporelle ». Mais le pécheur peut rétablir l’ordre du bien en réparant ce mal. Il guérit ainsi les conséquences du mal commis, soigne ce déficit d’amour pour rééquilibrer ce qui a été déséquilibré.

Comment effacer cette peine ?

Il y a plusieurs manières. La première, la plus simple, c’est d’accomplir la pénitence donnée par le prêtre en confession. Il y a également toutes nos œuvres méritoires ou nos souffrances et contrariétés supportées avec amour pour Dieu. En unissant nos bonnes actions ou nos sacrifices à celui du Christ (à la messe en particulier), ces actes participent à la satisfaction de cette peine. Il y a aussi les indulgences, pour nous ou pour nos défunts : elles permettent aux vivants d’obtenir une « remise » partielle ou totale de la peine temporelle effectuée au purgatoire, pour eux-mêmes – en vue du jour de leur propre mort – ou pour un défunt. Enfin, après la mort, il y a donc cette dernière possibilité, avant d’entrer dans l’éternité : passer par l’état du purgatoire pour réparer la peine, en nous laissant purifier par le feu de l’amour divin. C’est une étape de réparation, au cours de laquelle l’âme est débarrassée des résidus, des habitudes de péché qui n’ont pas été effacées sur la terre par les moyens précédents. Ce n’est pas une punition : c’est l’âme elle-même qui désire, au moment de la mort – lors du jugement personnel – s’y rendre pour réparer et se préparer à entrer dans la gloire de Dieu. Ces âmes du purgatoire –  elles constituent « l’Église souffrante » – ne peuvent plus rien pour elles-mêmes : seules nos prières peuvent les aider à entrer plus rapidement au paradis. Nous formons donc, sur la terre, « l’Église militante ». Ainsi, on le voit, la doctrine des indulgences est intrinsèquement liée au dogme du purgatoire, au sacrement de la confession et à la communion des saints !

Comment ça « marche » ?

À l’occasion d’un jubilé ou d’un événement religieux particulier, ou dans certains lieux de pèlerinage, sanctuaires, etc., l’Église concède une indulgence. Elle utilise pour cela son « pouvoir des clés » pour ouvrir le trésor de la communion des saints : les mérites infinis du Christ, de la Vierge Marie et des saints, en faveur des pécheurs.

En effet, leurs œuvres méritoires sont des biens spirituels qui profitent à tous, comme une sorte de « pharmacie céleste », dont le contenu est appliqué ensuite par l’Église, comme une infirmière, sur les âmes des pécheurs, pour « satisfaire » la peine temporelle qu’elles doivent « purger ».

Est-ce une œuvre de justice ou de miséricorde ?

La peine temporelle due pour nos péchés est une exigence de justice de la part de Dieu : il faut réparer ce qui a été abîmé. Mais c’est aussi une opération de la miséricorde de Dieu, car son amour va plus loin que la simple réparation du mal.

En effet, il va jusqu’à vouloir guérir le pécheur dans les profondeurs de son âme, car il a été abîmé par son péché, afin de faire croître en lui la charité et de le rétablir dans la communion avec Dieu.
Par ailleurs, l’indulgence manifeste également la miséricorde en permettant à l’homme de participer lui-même à l’œuvre du salut : le sien et celui des autres, par la prière pour les défunts.

Jean-Paul II a défini l’indulgence comme le « don total de la miséricorde de Dieu ». L’Église rappelle aussi que la prière pour les défunts est la première des charités à exercer à leur égard.

Quelle est l’actualité des indulgences ?

Il y a un retour en grâce des indulgences. Au sanctuaire de Montligeon – dédié à la prière pour les défunts – on nous demande régulièrement comment les recevoir. Ce renouveau est lié aux interventions récentes du Magistère qui a dépoussiéré la doctrine des indulgences et permet ainsi de la redécouvrir. Par ailleurs, il y a un approfondissement de la notion de miséricorde dans le peuple chrétien, liée au pardon des péchés et à une attente de guérison intérieure – ce qui rejoint la question des indulgences.

Enfin, on trouve aujourd’hui un sens très aigu de la notion de justice et de réparation, liée aux affaires des abus ou des injustices : les gens comprennent qu’il ne suffit pas de demander pardon mais qu’il faut aussi réparer le mal fait aux victimes.