Le testament de Louis XVI - France Catholique
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Le testament de Louis XVI

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Louis XVI au Temple, Henri-Pierre Danloux (1753-1809), rédigeant son testament

Louis XVI au Temple, Henri-Pierre Danloux (1753-1809), rédigeant son testament

Au nom de la très Sainte Trinité du Père du fils et du St Esprit. Aujourd’hui vingt cinquième jour de Décembre, mil sept cent quatre vingt douze. Moi Louis XVIe du nom Roy de France, étant depuis plus de quatre mois enfermé avec ma famille dans la Tour du Temple a Paris, par ceux qui étaient mes sujets, et privé de toute communication quelconque, même depuis le onze du courant avec ma famille de plus impliqué dans un Procès, dont il est impossible de prévoir l’issue à cause des passions des hommes, et dont on ne trouve aucun prétexte ni moyen dans aucune loi existante, n’ayant que Dieu pour témoin de mes pensées et auquel je puisse m’adresser. Je déclare ici en sa présence mes dernières volontés et mes sentiments.

Je laisse mon âme à Dieu mon créateur, je le prie de la recevoir dans sa miséricorde, de ne pas la juger d’après ses mérites, mais par ceux de Notre Seigneur Jésus Christ, qui s’est offert en sacrifice a Dieu son Père, pour nous autres hommes quelqu’indignes que nous en fussions, et moi le premier.

Je meurs dans l’union de notre sainte Mère l’Église Catholique Apostolique et Romaine, qui tient ses pouvoirs par une succession non interrompue de St Pierre auquel J.C. les avait confiés. Je crois fermement et je confesse tout ce qui est contenu dans le Symbole et les commandements de Dieu et de l’Église, les Sacrements et les Mystères tels que l’Église Catholique les enseigne et les a toujours enseignés. Je n’ai jamais prétendu me rendre juge dans les différentes manières d’expliquer les dogmes qui déchire l’Église de J.C. mais je m’en suis rapporté et rapporterai toujours si Dieu m’accorde vie, aux décisions que les supérieurs Ecclésiastiques unis a la Sainte Église Catholique, donnent et donneront conformément a la discipline de l’Église suivie depuis J.C. Je plains de tout mon cœur nos frères qui peuvent être dans l’erreur, mais je ne prétends pas les juger, et je ne les aime pas moins tous en J.C. suivant ce que la charité Chrétienne nous l’enseigne.

Je prie Dieu de me pardonner tous mes péchés. j’ai cherché a les connaitre scrupuleusement a les détester et a m’humilier en sa présence, ne pouvant me servir du Ministère d’un Prêtre Catholique. Je prie Dieu de recevoir la confession que je lui en ai faite et surtout le repentir profond que j’ai d’avoir mis mon nom, (quoique cela fut contre ma volonté) a des actes qui peuvent être contraires a la discipline et a la croyance de l’Église Catholique a laquelle je suis toujours reste sincèrement uni de cœur. Je prie Dieu de recevoir la ferme résolution ou je suis s’il m’accorde vie, de me servir aussitôt que je le pourrai du Ministère d’un Prêtre Catholique pour m’accuser de tous mes péchés, et recevoir le Sacrement de Pénitence.

Je prie tous ceux que je pourrais avoir offensés par inadvertance, (car je ne me rappelle pas d’avoir fait sciemment aucune offense a personne) ou ceux a qui j’aurais put avoir donné de mauvais exemples ou des scandales de me pardonner le mal qu’ils croient que je peux leur avoir fait.

Je prie tous ceux qui ont de la Charité d’unir leurs prières aux miennes, pour obtenir de Dieu le pardon de mes péchés.

Je pardonne de tout mon cœur, a ceux qui se sont fait mes ennemis sans que je leur en aie donne aucun sujet et je prie Dieu de leur pardonner, de même que ceux qui par un faux zèle, ou par un zèle mal entendu m’ont faits beaucoup de mal.

Je recommande a Dieu, ma femme, mes enfants, ma Sœur, mes Tantes, mes Frères, et tous ceux qui me sont attachés par les Liens du Sang ou par quelqu’autre manière que ce puisse être. Je prie Dieu particulièrement de jeter des yeux de miséricorde, sur ma femme mes enfants et ma Sœur qui souffrent depuis longtemps avec moi, de les soutenir par sa grâce s’ils viennent a me perdre, et tant qu’ils resteront dans ce monde périssable.

Je recommande mes enfants a ma femme, je n’ai jamais douté de sa tendresse maternelle pour eux, je lui recommande surtout d’en faire de bons Chrétiens et d’honnêtes hommes, de leur faire regarder les grandeurs de ce monde ci (s’ils sont condamnés a les éprouver) que comme des biens dangereux et périssables et de tourner leurs regards vers la seule gloire solide et durable de l’Éternité. Je prie ma Sœur de vouloir bien continuer sa tendresse a mes enfants, [mots raturés], et de leur tenir lieu de Mère, s’ils avoient le malheur de perdre la leur.

Je prie ma femme de me pardonner tous les maux qu’elle souffre pour moi, et les chagrins que je pourrais lui avoir donnés dans le cours de notre union, comme elle peut être sure que je ne garde rien contre elle, si elle croit avoir quelque chose a se reprocher.

Je recommande bien vivement a mes enfants, après ce qu’ils doivent a Dieu qui doit marcher avant tout, de rester toujours unis entre eux, soumis et obéissants a leur Mère, et reconnaissants de tous les soins et les peines qu’elle se donne pour eux, et en mémoire de moi. Je les prie de [mot raturé] regarder ma Sœur comme une seconde Mère.

Je recommande a mon fils s’il avait le malheur de devenir Roy, de songer qu’il se doit tout entier au bonheur de ses Concitoyens, qu’il doit oublier toute haine et tout ressentiment, et nommément tout ce qui a rapport aux malheurs et aux chagrins que j’éprouve. qu’il ne peut faire le bonheur des Peuples qu’en régnant suivant les Lois, mais en même temps qu’un Roy ne peut les faire respecter, et faire le bien qui est dans son cœur, qu’autant qu’il a l’autorité nécessaire, et qu’autrement étant lié dans ses opérations et n’inspirant point de respect, il est plus nuisible qu’utile.

Je recommande a mon fils d’avoir soin de toutes les personnes qui m’étaient attachées, autant que les circonstances ou il se trouvera lui en donneront les facultés, de songer que c’est une dette sacrée qui j’ai contractée envers les enfants ou les parents de ceux qui ont péris pour moi, et ensuite de ceux qui sont malheureux pour moi je sais qu’il y a plusieurs personnes de celles qui m’étaient attachées qui ne se sont pas conduites envers moi comme elles le devaient, et qui ont même montrés de l’ingratitude, mais je leur pardonne, (souvent dans les moments de troubles et d’effervescence on n’est pas le maitre de soi) et je prie mon fils s’il en trouve l’occasion de ne songer qu’à leur malheur.

Je voudrais pouvoir témoigner ici ma reconnaissance a ceux qui m’ont montrés un véritable attachement et désintéressé. d’un côté si j’étais sensiblement touché de l’ingratitude et de la déloyauté de gens a qui je n’avais jamais témoignés que des bontés, a eux a leurs parents ou amis, de l’autre j’ai eu de la consolation a voir l’attachement et l’intérêt gratuit que beaucoup de personnes m’ont montrées. Je les prie d’en recevoir tous mes remerciements, dans la situation ou sont encore les choses, je craindrais de les compromettre, si je parlais plus explicitement mais je recommande spécialement a mon fils de chercher les occasions de pouvoir les reconnaître.

Je croirais calomnier cependant les sentiments de la Nation si je ne recommandais ouvertement a mon fils Mrs de Chamilly et Hue, que leur véritable attachement pour moi, avait porté a s’enfermer avec moi dans ce triste séjour, et qui ont pensés en être les malheureuses victimes. Je lui recommande aussi Clery des soins duquel j’ai eu tout lieu de me louer depuis qu’il est avec moi comme c’est lui qui est resté avec moi jusqu’à la fin, je prie Mrs de la Commune de lui remettre mes hardes mes livres, ma montre ma bourse, et les autres petits effets qui ont été déposés au Conseil de la Commune.

Je pardonne encore très volontiers a ceux qui me gardaient, les mauvais traitements et les gênes dont ils ont cru devoir user envers moi. j’ai trouvé quelques âmes sensibles et compatissantes, que celles la jouissent dans leur cœur de la tranquillité que doit leur donner leur façon de penser.

Je prie Mrs de Malesherbes Tronchet et de Sèze, de recevoir ici tous mes remerciements et l’expression de ma sensibilité, pour tous les soins et les peines qu’ils se sont donnés pour moi.

Je finis en déclarant devant Dieu et prêt a paraitre devant lui que je ne me reproche aucun des crimes qui sont avancés contre moi. Fait double a la tour du Temple le 25 Décembre 1792.