Votre école est-elle un lieu de mission ?
Père Jean-Bernard Plessy : Comme dans toutes les écoles catholiques sous contrat, la majorité de nos élèves ne sont pas croyants ou pratiquants. L’école est donc, pour eux, le premier lieu de rencontre avec l’Église. Le premier lieu d’évangélisation des jeunes. La dimension missionnaire est essentielle : c’est la mission de l’enseignement catholique par excellence. Mon premier regard va donc d’abord vers les jeunes qui n’ont encore rien reçu sur le plan de la foi. Je veux que tous, en quittant les Chartreux, sachent ce qu’est l’Évangile et connaissent les fruits apportés par les sacrements de l’Église. Ils ne sont pas obligés de croire, mais ils n’ont pas le droit de ne pas connaître la foi catholique.
Comment transmettre la foi ?
Nous n’avons pas d’aumônerie. Je considère que la communauté tout entière est catholique. Cela implique que l’instruction religieuse est obligatoire : elle fait partie de l’emploi du temps. Par ailleurs, les cours sont interrompus pour les cérémonies religieuses. Nous sommes extrêmement clairs sur notre identité, lors de l’inscription. Et cela se passe très bien.
Quels en sont les fruits ?
Les chapelles sont remplies pour les cérémonies. Beaucoup prennent part aussi aux nuits d’adoration. Nous avons environ 140 confirmands chaque année et au moins 40 baptêmes de jeunes de tous les âges, qui font un véritable chemin de foi. Par ailleurs, les témoignages d’anciens élèves sont édifiants. C’est motivant de penser qu’ils représentent une partie de la France de demain !
Comment expliquer toutes ces demandes de baptême ?
Les jeunes non croyants sont « contaminés » en voyant vivre des jeunes catholiques ! Lors du recrutement, je fais donc très attention à avoir toujours un noyau fort de jeunes catholiques engagés. Il n’a pas besoin d’être majoritaire, mais il doit être suffisamment fort pour être attractif.
Comment rester libre en étant sous contrat ?
Nous n’avons aucun problème avec le rectorat. Nous sommes parfaitement dans notre droit. La ligne directrice est la loi Debré de 1959, qui nous demande de suivre les programmes et d’accueillir des enfants non catholiques. En retour, nous leur demandons juste d’accepter le caractère propre de notre établissement et le contrat de départ : suivre l’instruction religieuse. Nous les laissons bien entendu totalement libres quant à l’adhésion à la foi et les sacrements ne sont jamais obligatoires.
Comment faites-vous concernant les programmes ?
Nous les respectons, mais nous savons prendre nos libertés à l’intérieur de ce cadre. Je rappelle chaque année aux enseignants de SVT que nous enseignons le programme dans le respect de nos convictions propres. Ainsi, sur les questions liées à la procréation, nous accompagnons ces programmes d’éclairages anthropologiques chrétiens. Et nous donnons parallèlement aux jeunes une formation à la vie affective, assurée par des associations catholiques ou par nos formateurs ou nos directeurs spirituels – six prêtres en tout. Sur les questions du genre, nous sommes en vérité et fermes avec les jeunes. Nous les accompagnons dans la bienveillance, mais en leur disant ce en quoi nous croyons. En général, ils nous sont très reconnaissants de leur avoir donné des repères clairs dans cette période de turbulences…