L'unique chose nécessaire - France Catholique
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« Ô Marie conçue sans péché »
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L’unique chose nécessaire

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« Adam et Ève chassés du Paradis » par Benjamin West, 1791.

« Adam et Ève chassés du Paradis » par Benjamin West, 1791.

[Galerie Nationale d'Art, Washington]

Il y a environ deux semaines, le Wall Street Journal rapportait une histoire ayant pour titre « La réalité virtuelle apporte de la joie aux gens par des équipements d’aide à la vie ». Le thème de l’histoire était fort simple : des études montrent que les gens âgés utilisant la réalité virtuelle se sentent en meilleure santé et plus heureux parce qu’ils peuvent voyager et faire du tourisme – virtuellement – à peu près partout sur la planète.

Alors c’est une très bonne nouvelle pour deux raisons. Tout d’abord, si j’étais dans une maison de retraite, et tout particulièrement à New-York, je voudrais au moins avoir l’illusion d’être capable de m’évader à Paris ou Tahiti. Et deuxièmement, cette histoire est un excellent alibi pour le coûteux casque de réalité virtuelle qui trône maintenant sur mon bureau dans notre sous-sol. Je suis joueur de jeux vidéos depuis près de 40 ans, et jouer en réalité virtuelle est tout simplement fantastique. Et il se trouve que la merveilleuse Suann, mon épouse depuis un demi-siècle, m’encourage pleinement à cela parce que lorsque j’ai le casque de réalité virtuelle sur la tête, je ne peux pas l’importuner.

Mais voici où je voulais réellement en venir. Suann et moi avons tous deux été façonnés par une culture du livre ; une culture rendue possible par la typographie et ancrée dans la logique séquentielle d’une phrase imprimée bien bâtie. La culture de l’écrit charpente la façon de penser. Elle nourrit notre imagination, gouverne nos discours et ordonne notre vie. Elle a une forme de stabilité et de permanence.

Donc, en ce qui me concerne, quels que puissent être les effets négatifs de la réalité virtuelle, ils seront modestes et de court terme parce que je n’ai pas été formé dans ce monde. La même culture de l’écrit à façonné les Pères Fondateurs de l’Amérique et la Fondation de l’Amérique et de ce fait notre politique, nos lois et toutes nos institutions civiques. Nos petits-enfants grandissent dans un monde de pensée fort différent, et cette expérience aura des répercussions publiques et pas uniquement personnelles.

Nous vivons une réforme, non pas tant dans la doctrine religieuse ou la théologie, lesquelles sont vues comme une perte de temps par beaucoup de nos classes dirigeantes, mais dans notre compréhension fondamentale de la culture et de l’anthropologie – en d’autres mots, dans ce qui signifie pour nous être humain. Cette « grande réinitialisation », pour emprunter un terme du Forum économique mondial, est pilotée par des progrès très rapides en sciences et techniques, et c’est un mélange d’ombre et de lumière.

Nous avons vu d’admirables avancées en médecine, communication, transport et aide aux handicapés. Et nous avons également vu une croissance cataclysmique d’illettrisme culturel, d’attaques internet et de pornographie. Tout garçon de 15 ans un peu calé peut facilement trouver et télécharger des jeux de sexe forts réalistes en réalité virtuelle sans problème. Les nouveaux outils techniques actuels vont inévitablement avoir un impact sur l’apprentissage, la santé mentale et le comportement sexuel des jeunes.

Mais le problème encore plus immédiat est la façon dont nos techniques nous installent douillettement dans le nombrilisme, avec des distractions perpétuelles et des appétits constamment nouveaux. Le pronom « nous » qui constitue notre identité en tant que nation rétrécit proportionnellement à l’expansion du pronom « je ». Et cela n’est pas une bonne nouvelle, parce que les Pères Fondateurs ont créé un pays qui requiert une citoyenneté réfléchie et activement engagée, avec un sens des responsabilités partagé pour la res publica, la « chose publique » ou république que nous connaissons comme les USA.

Ce n’est pas la nation que nous avons maintenant. La compréhension américaine courante de la liberté personnelle n’est pas la liberté de savoir et de faire ce qui est bien, mais un rejet de la vraie réalité elle-même. Cela a des conséquences.

Les États-Unis sont une création exclusivement humaine. Comme pays, nous ne sommes pas fondés sur le sang, le territoire ou même la langue, mais sur un système d’idées – des idées exploitées en lois. Au commencement, l’Amérique a été un mariage unissant réalisme biblique d’une part et aspiration aux Lumières d’autre part. Plus le côté biblique du mariage est exclu, plus notre politique devient désincarnée et irréaliste.

Le transgenre en est un bon exemple. Nous avons créé un monde virtuel imaginaire dans lequel le fait corporel du sexe, les différences véritables, incarnées, palpables entre les corps mâles et femelles, peuvent être simplement gommées par une abstraction telle que la théorie de genre.

Dans le roman de Lewis Carroll De l’autre côté du miroir, il y a un moment où Humpty Dumpty dit à Alice d’un ton dédaigneux : « Quand j’utilise un mot, il signifie exactement ce que j’ai choisi qu’il signifie – ni plus ni moins. » C’est exactement où nous en sommes maintenant. Et cela soulève une question : quelle est notre vocation de catholique dans la vie publique de plus en plus irréaliste de notre pays ?

Vingt pour cent des catholiques américains ont quitté l’Église depuis l’an 2000. Certains pourraient trouver cela démoralisant. Il peut être tentant de repenser à notre vie de foi comme stérile et au bien que nous essayons de faire comme vain. Mais cette sorte de défaitisme est en réalité une forme subtile d’orgueil. Ce que nous faisons, ou ne faisons pas, a de l’importance. Mais aucun de nous n’est suffisamment important pour faire capoter la volonté de Dieu.

Nous sommes importants parce que Dieu nous aime. Quand nous croyons vraiment cela, nous devenons un peuple de l’espérance et nous irradions notre espérance sur les autres. Notre ouvrage n’est pas de réussir mais de témoigner. C’ est la leçon centrale de la Croix, de Pâques et de toute l’histoire chrétienne – Dieu fait surgir la vie de la mort et la victoire de l’échec et de la défaite.

Saint Augustin, qui vivait il y a longtemps mais dans des conditions fort semblables aux nôtres, disait que les gens se plaignent toujours de la noirceur des temps, mais nous faisons les temps, nous sommes les temps. Et si nous ne travaillons pas à rendre les temps meilleurs au nom de Jésus-Christ, alors les temps nous rendrons pires au nom de petits dieux glauques.

Ce qui signifie que l’hostilité du monde envers l’Église est un cadeau imprévu. Les tièdes s’en vont et les convaincus deviennent plus forts. La haine envers Jésus-Christ a l’effet miraculeux de donner une épine dorsale aux gens qui connaissent réellement Jésus et qui L’aiment. La vocation des catholiques, ici, dans le monde réel, est de ce fait toujours la même : faire des disciples de toutes les nations, y compris la nôtre et être le levain dans la société, surtout dans la nôtre.

Si nous poursuivons ce but de tout notre cœur, nous faisons l’unique chose nécessaire.