« Mais ses disciples ont dit à Jésus : Vous voyez comment la foule vous presse, et pourtant Vous demandez : ‘Qui m’a touché ?’ » (Mc 5,31) On sympathise avec les disciples. La question de Notre Seigneur semble déraisonnable. C’est une célébrité, après tout. Toute la ville et la campagne désirent le voir. Ils veulent être proches de Lui, peut-être par dévotion, mais tout aussi probablement par désir de dire qu’ils l’ont vu. Il y a l’inévitable bousculade de la foule et beaucoup de gens l’ont probablement croisé.
Mais une personne Le touche différemment. La femme avec l’hémorragie tend la main pour toucher Son manteau intentionnellement, avec foi. Beaucoup de gens viennent de Le croiser. Un seul Le touche. Ce contraste fournit une façon de considérer une tension que nous vivons maintenant, entre un catholicisme culturel et un catholicisme intentionnel.
Le catholicisme a besoin d’une culture. Ou plutôt, il forme une culture pour sa propre continuation. La foi catholique n’est pas un passe-temps que nous pouvons reléguer à un domaine de notre vie. C’est un mode de vie – en fait, le Chemin, comme l’église ancienne l’appelait. (Actes 9:2) Il devrait façonner tous les aspects de la vie du croyant : les pensées, les paroles, les actions et les relations. Il est vécu par le cœur, l’esprit, l’âme et le corps. Il prend notre temps avec ses saisons et ses fêtes. Il remplit notre espace avec son art et son architecture.
Une culture correctement imprégnée par la doctrine catholique s’accroche plus facilement à la foi. Nous ne sommes pas censés apprendre la foi uniquement dans une salle de classe ou par des livres. Nous l’apprenons de nos parents et de nos grands-parents, ainsi que par le biais de chansons, de sites et d’odeurs. Avec autant d’aide autour de lui, une personne peut embrasser et intérioriser la foi plus naturellement, paisiblement et complètement. Ainsi, une culture catholique produit des saints extraordinaires et divers comme Thomas d’Aquin, Charles Borromée et Thérèse d’Avila. Nous devons nous efforcer de construire une telle culture.
Dans le même temps, le danger d’une culture catholique devrait être douloureusement évident. Si elle n’est pas correctement entretenue, elle devient simplement du catholicisme culturel. Cette contrefaçon a produit de nombreuses personnes qui ont grandi avec les atours et dans l’atmosphère du catholicisme, qui prétendent en effet être catholiques (peut-être même « dévotes »), mais qui sont loin de la foi réelle. Les catholiques culturels commencent souvent leurs paroles de dissidence par : « J’ai passé douze ans dans une école catholique. »
Ces catholiques accidentels sont comme la foule qui entoure Jésus. Ils Le croisent à l’occasion, en étant au même endroit. Ils permettent aux atours de se substituer à l’investissement personnel. Ils ne Le touchent pas vraiment avec foi. Notre Seigneur lui-même a mis en garde contre ces contacts superficiels : « Et vous direz : ‘Nous avons mangé et bu en votre compagnie et vous avez enseigné dans nos rues. Puis Il vous dira : ‘Je ne sais pas d’où [vous] venez. Éloignez-vous de moi, vous tous, ouvriers d’iniquités !’ » (Lc 13, 26)
En réponse au danger du Catholicisme culturel, nous parlons maintenant d’être « intentionnel » et de former des « disciples intentionnels ». Le désir est de produire des catholiques qui ne se contentent pas de se frotter à notre Seigneur, mais de Le toucher par foi.
C’est absolument nécessaire. Les supports extérieurs qu’une culture catholique fourniraient à l’âme ont disparu. Bien sûr, une paroisse devrait essayer de construire une culture catholique. Mais c’est quand même une petite chose contre le tsunami de notre culture toxique. Depuis longtemps, il est insensé de présumer que, dans notre société laïque, les atours catholiques pourraient conduire à une foi catholique vibrante. Maintenant, juste pour survivre, les catholiques doivent être intentionnels et délibérés en professant et en vivant leur foi.
Mais cette intentionnalité présente aussi des inconvénients. Une « communauté intentionnelle » peut rapidement devenir gnostique avec un esprit de clique ou bien de country club. Trop d’emphase ou une emphase mauvaise sur l’intentionnalité peut conduire à penser que nous L’avons choisi. Ce qui peut obscurcir la puissance de Ses paroles : « Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, mais moi qui vous ai choisi. » (Jn 15,16) Notre choix intentionnel n’est qu’une réponse à Son initiative. Nous choisissons parce que d’abord nous avons été choisis.
Une grande défense contre ce danger est la paroisse catholique, qui (à quelques exceptions près) est géographique, pas intentionnelle. En effet, une « paroisse de destination » – bien que soit nécessaire en certains endroits – est un oxymore. L’une des belles choses à propos d’une paroisse catholique est l’échantillon représentatif de personnes qu’elle attire. Un dimanche donné, les fidèles ne sont pas rassemblés en raison d’un passe-temps partagé ou d’un intérêt mondain, mais parce qu’ils sont tous des pécheurs qui ont trouvé la rédemption dans l’Église catholique. Il ne s’agit pas d’un groupe de personnes qui se retrouveraient ensemble pour d’autres raisons.
La célèbre définition du catholicisme par James Joyce – « Ici chacun vient » – se retrouve dans toutes les paroisses. Les fidèles – quel que soit leur degré – sont dans une paroisse non pas parce qu’ils l’ont choisie, mais parce que Dieu, dans Sa Providence, les a glissés dans ses limites. Ils réagissent à cette réalité.
Bien sûr, certains paroissiens sont moins intentionnels que d’autres., Nous ne les excluons pas pour cette raison. Au lieu de cela, nous espérons que la doctrine catholique authentique, la dévotion, la liturgie – en un mot, la culture – les rapprocheront du centre de la paroisse et du cœur de l’Église.