En 1969, celui qui était alors le père Joseph Ratzinger déclarait dans une émission de radio en Allemagne : «Il me semble certain que l’Église traverse une période très difficile. La vraie crise vient à peine de commencer. Il faudra compter sur de terribles bouleversements. Mais je suis également certain de ce qui restera à la fin : non pas l’Église du culte politique, qui est déjà morte, mais l’Église de la foi. » Prescient, comme toujours, Ratzinger parlait de ce qui ressemblait alors à une Église en pleine agitation. Pourtant, il savait que ce n’était que le début.
Aujourd’hui, nous pouvons voir à quel point il avait – et il a toujours – raison. De son étude de l’histoire des religions, il savait que le catholicisme n’est pas fondé sur la politique. (Écoutez, ô évêques !) Ce serait prendre la route des socialistes. Le catholicisme n’est pas non plus fondé sur la poésie. C’est le fondement de nombreuses religions du monde, qui sont fondées sur des mythes. Et certaines religions sont fondées à la fois sur la politique et sur des mythes, comme on le voit dans le nazisme et le communisme chinois, par exemple.
Ratzinger savait que le catholicisme est fondé sur la foi, un type particulier de foi, une foi surnaturelle qui décrit toute la réponse humaine, remplie de grâce à la révélation surnaturelle de Dieu. La réponse est un abandon de soi complet du type décrit dans les Écritures.
Un dimanche plus tôt dans l’année, par exemple, le génie de l’Église a couplé l’histoire des afflictions de Job avec l’enseignement de Jésus sur les croyants qui ont la confiance ouverte que l’on voit chez les petits enfants. En fait, Job est comme le petit enfant : « Le Seigneur a donné, le Seigneur a repris. Que le nom du Seigneur soit béni. »
Job reposait si complètement sur la vérité de Dieu qu’il illustrait ce que sainte Thérèse d’Avila a exprimé dans les mots : « Dieu suffit ». Une fois que l’on est complètement lié à Dieu, tout le reste est relativisé. On lui donne sa place relative par rapport à cette relation unique et dévorante. Cette relation illumine toutes les autres relations que nous avons, chaque travail que nous faisons.
Un érudit moderne des Écritures l’a expliqué : « Quand il croit en Dieu, l’homme connaît la vérité, révélée par la connaissance infaillible que Dieu a de lui-même, et partage par conséquent la conscience divine. » (Juan Alfaro, OSB) La connaissance ineffable qui vient de la foi est, à des fins d’enseignement, en partie réduite à des propositions sur le salut. Mais sa pleine portée est de nous conduire dans l’esprit du Dieu Tout-Puissant Lui-même. « La foi est une participation divinisante et surnaturelle à la vie même de Dieu. »
C’est ce qu’indiquait Ratzinger (Benoît XVI) dans son émission. Cette participation permettra à l’Église, ou ce qui en restera, de traverser toutes les vicissitudes. Les hommes et les femmes vraiment fidèles vont maintenir le cap parce qu’ils se sont jetés complètement entre les mains de Dieu. Ils sont comme l’enfant dans l’Évangile qui se tient en présence de Jésus-Christ, le Sauveur du monde.
À l’image juste et sombre de notre temps – si l’on n’est pas complètement abandonné au Christ – Ratzinger ajoutait : « Pour le dire plus positivement : l’avenir de l’Église, encore une fois comme toujours, sera remodelé par des saints, par des hommes (des femmes), c’est-à-dire dont l’esprit sonde plus profondément que les slogans du jour, qui voient plus que les autres ne voient, parce que leurs vies embrassent une réalité plus large.
Nous devons avoir un recours constant aux saints. Ils sont avec nous à chaque messe. Nous sommes potentiellement de leur compagnie. Bien sûr, ils sont glorieux au Ciel pendant que nous luttons ici sur terre. Le point que Ratzinger faisait valoir est que chacun des saints a vécu autrefois sur terre. C’est ici que la foi est devenue si vitale pour eux. Eux aussi ont vu des crises, mais dans le contexte de la Crucifixion et de ce qui est arrivé trois jours plus tard. Ils voient nos crises dans le contexte de la prière de sainte Monique, de la majesté de l’enseignement de saint Thomas d’Aquin, du drame de saint Maximilien Kolbe dans le camp. Juste au-delà de la Croix, il y a la gloire, gagnée pour nous et garantie.
La suggestion de Ratzinger pour une stratégie personnelle ? Tout droit sorti de l’Évangile, il constate que « l’altruisme, qui rend les hommes libres, ne s’obtient que par la patience de petits actes quotidiens d’abnégation. Par cette passion quotidienne, qui seule révèle à un homme de combien de manières il est asservi par son propre ego, par cette passion quotidienne et par elle seule, les yeux d’un homme s’ouvrent lentement. » Nos yeux sont ainsi ouverts à la réalité plus large que seule la foi peut donner.
Même au milieu des crises dans l’Église, nous devons rester pleinement conscients de ce qui les dépasse – un endroit vers lequel de nombreux dirigeants actuels de l’Église ne semblent pas nous conduire. À l’heure actuelle, la violence est un phénomène quotidien et le virus en afflige beaucoup, mais nous avons toujours nos libertés, petites et cruciales. Nous pouvons encore faire des actes de charité. Nous pouvons encore prier. De plus en plus d’entre nous peuvent aller à la messe. Nous pouvons, aux moments et aux saisons appropriés, nous prononcer sur des questions qui nécessitent que la foi catholique soit bien comprise.
Bref, même maintenant, malgré tous les défis et toutes les déceptions, rappelons-nous en cette Toussaint : nous aussi, nous pouvons devenir des saints !