Comme beaucoup des lecteurs de ces colonnes, je suppose, je suis souvent dans l’embarras à propos de ce que j’ai lu dans les media.
Il ne s’agit pas précisément de la rage dont certains font état, mais plutôt d’une sorte de perplexité irritée. En général, je veux savoir ce qui se passe. Et ce, que les nouvelles soient bonnes ou mauvaises. Mais je dois me poser des questions comme : « À qui est-ce que je fais le moins confiance ? »
Il y a plus grave que la violence de rue en Amérique (ou au Canada, ou en Angleterre, ou en Europe, etc…) : C’est la perte vertigineuse de la confiance.
On pourrait mettre un terme à la violence, assez vite, si les autorités le voulaient. Ils pourraient déployer la Garde Nationale, ou tout autre chose. En général, on respecte les policiers armés.
On connait des méthodes pour réduire le crime dans les grandes villes, depuis qu’au XVIIIe siècle, celui-ci est devenu un « problème social ». Là où la volonté est évidente, d’habitude les nettoyages fonctionnent. Nous pourrions en examiner l’histoire, mais pas aujourd’hui.
Cependant que se passera-t-il si les autorités ne veulent pas que fonctionnent ces nettoyages ? Qu’en est-il s’il y a une faction politique qui pense qu’elle peut tirer profit d’un désordre public ?
Pire, qu’en sera-t-il si TOUTES les factions politiques ont quelque chose à gagner en excitant le public aussi bien pour que contre la violence ? Qu’en sera-t-il si « pas de nouvelles, mauvaises nouvelles » est vrai pour TOUS les intéressés politiques, excepté ceux qui n’ont aucun pouvoir, et rêvent de paix, de calme et de sécurité physique ?
Il me semble que c’est la situation actuelle. Les deux principaux partis de votre pays (je suis Canadien) attendent avec impatience une vraie conflagration vers le 3 novembre.
Je parie que le principal bénéficiaire en sera Trump ; mais comme le suggèrent des républicains de ma connaissance, tous les paris sont ouverts. N’importe quoi peut arriver en octobre.
Qu’il en soit ainsi. Ce ne sera pas la première fois que les humains devront traverser des évènements révolutionnaires ; et que beaucoup en mourront. Et que des millions de personnes en seront réduites à la misère. La « loi de la jungle » pourrait prévaloir, et pas seulement dans les villes à « gouvernement progressiste ».
On fait avec ce que l’on est. Alors quoi ?
Avant que l’on ne m’accuse d’hyperbole, laissez-moi demander à qui le gentil lecteur fait confiance ? Car toute faction a un intérêt, pas seulement à gagner les batailles de rues, mais à nous dire ce qui les a causées, et comment elles se sont produites.
Peut-on même tenir pour acquis qu’il s’est vraiment passé quelque chose, alors que les rumeurs tiennent lieu d’informations, et que la seule chose qu’un « échotier » veut savoir, c’est : y a-t-il eu, en fait, une rumeur ? Curieusement, je ne suis pas en train de critiquer les media. Je me concentre sur la perte de la confiance. Bien que, ayant été autrefois un écrivain « dans le vent », j’aie la plus piètre opinion de leur crédibilité, je connais trop bien les circonstances pour tous les accuser de partialité.
Avec la perte plus générale de règles communes, nous avons perdu même l’aspiration à « l’objectivité ». Dites N’IMPORTE QUOI et votre auditeur se demandera de quel côté vous êtes. Dites deux choses et il se sera fait une opinion.
La relation entre « foi » et « confiance » on peut la trouver en anglais et dans d’autres langues occidentales. Sans bona fides, on ne peut pas avancer et pourtant, pendant des siècles, nous avons cru que la confiance était possible. On a même fondé des programmes de discrimination positive sur la base qu’elle l’était.
Mais cela venait d’une longue tradition qui reconnaissait explicitement la foi chrétienne. En l’absence du concept de Dieu, le concept de la Vérité repose sur des fondations instables, et la vision que le bien est ce qui conduit au meilleur résultat pour un parti, est « naturelle » une fois que Dieu s’est éclipsé.
Je ne parle pas seulement de ce qui est « naturel » pour la gauche, mais pour tous les partis. Combien de fois ai-je remarqué, en bavardant avec des amis « conservateurs », que les idées religieuses sont totalement écartées, et que seules les propositions politiques sont autorisées.
Les chrétiens eux-mêmes adoptent l’idée que nous devons plaire à nos alliés non chrétiens, ou même anti chrétiens. C’est seulement à ce moment-là que nous pourrons « gagner » le prix que nous cherchons, si vide soit-il.
Nous devons faire attention à ce que nous disons, et même dissimuler, pour ne pas perdre ce but de vue. Nous devons prétendre que nous sommes « ouverts d’esprit » sur des sujets qu’aucun chrétien ne peut envisager, car sinon, nous n’arriverons jamais à nos fins. La Foi elle-même doit être présentée avec mauvaise foi.
Je dois sembler accusateur, mais je trouve aussi en moi ce mobile. Dans un coin de ma tête, je donne priorité à la politique, avec désinvolture. Je me pose des questions comme « Que se passera-t-il si Trump perd ? » – ou des questions équivalentes dans n’importe quelle autre compétition.
Dans la vision chrétienne centrale, il y avait : « la fin ne justifie PAS les moyens. » Cela venait aussi de Platon et d’Aristote, et peut même être décelé en partie ailleurs. Parmi les juifs, dans les récits bibliques des prophètes, cette idée a été lancée. Cela a rendu leur religion, et c’était choquant, différente de ce qui était commun parmi toutes les autres tribus sémitiques.
Dans les Écritures, les péchés des rois sont franchement acceptés. En ce qui me concerne en tous cas, la sincérité de l’Ancien Testament est ce qui m’a d’abord impressionné. C’est ce qui a préparé la voie au Nouveau Testament.
À travers l’obscurité de l’histoire humaine, cet « exceptionnalisme » se remarquait. Je pouvais croire que les prophètes croyaient vraiment à ce qu’ils disaient, sans titre particulier. Cette sincérité radicale « a tout changé ». Et depuis, tout est différent.
Non seulement il y a « un Dieu », mais cette proposition dépasse le plan philosophique, et par là même, elle dépasse infiniment le plan politique. Car, comme nous l’enseigne l’Évangile, ce Dieu nous aime vraiment. Et Il le fait, tout en établissant des règles absolues, que nous ne respecterons pas, mais que nous n’avons pas le droit de bidouiller.
« La politique ne nous sauvera pas » ai-je lu en titre d’un blog intelligent. Aucun mouvement politique, quelles que soient ses bonnes intentions, n’a la capacité de réparer, pour ne pas dire restaurer, la confiance. En l’absence de celle-ci, aucun progrès en civisme n’est possible. Car, quelle que soit la proposition, elle est facile à réfuter, et nous en revenons à une perpétuelle bagarre dans la boue.
Dans l’obscurité de celle-ci, nous avons besoin de choses qui brillent.