Les fausses allégations sont rares – et réelles - France Catholique
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Les fausses allégations sont rares – et réelles

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St. Jean Népomucène par José Campeche y Jordán, 1798

St. Jean Népomucène par José Campeche y Jordán, 1798

[Smithsonian American Art Museum, Washington, DC]

Les fausses allégations d’abus sexuels par le clergé sont relativement rares, mais il y en a. Par exemple, le rapport John Jay de 2004 comprenait une enquête sur 10 667 allégations signalées d’abus par des prêtres ou des diacres. De ce nombre, à peine plus de la moitié de ces allégations (5 681) ont donné lieu à des enquêtes par le diocèse ou l’ordre religieux, qui ont produit des « résultats définitifs ». De ces « résultats définitifs », seulement 83 allégations ont été jugées fausses. Cela représente environ un et demi pour cent.

Ce nombre – 83 allégations jugées fausses – exclut 298 prêtres et diacres qui avaient été « entièrement exonérés » au moment de l’enquête et qui n’ont donc pas été inclus dans l’enquête.

En outre, sur les 5 681 allégations ayant abouti à des enquêtes qui ont produit des « résultats définitifs », le résultat définitif dans 1 028 de ces cas était que l’allégation ne pouvait être étayée. Autrement dit, dans un cinquième des cas examinés (19,6%), les allégations ont été soit réfutées de manière concluante (1,5%), soit n’ont pas pu être étayées (18,1%).

Cela vaut la peine d’offrir quelques mises en garde sur ces chiffres. Ces statistiques, et ce qui suit, ne visent nullement à diminuer les crimes et les péchés des prêtres qui ont abusé, ni à élever les souffrances des prêtres accusés au-dessus de celles des survivants d’abus. Et cela ne change certainement pas le fait que la grande majorité des allégations d’abus se révèlent être vraies, ou que les abus sexuels sur des enfants sont largement sous-déclarés. Et cela ne signifie certainement pas que, simplement parce qu’une allégation ne peut pas être étayée, les abus allégués n’ont pas eu lieu.

Alors que les fausses accusations sont rares, il y a des centaines de prêtres aux États-Unis qui ont été faussement accusés d’abus sexuels, et probablement des milliers de prêtres qui ont eu contre eux des allégations sans fondement. Certains de ces hommes sont morts et enterrés. Certains n’ont même jamais eu l’occasion de répondre aux allégations portées contre eux.

Toutes les statistiques citées ci-dessus proviennent d’une enquête sur des affaires survenues avant la Charte de Dallas de 2002. Depuis la Charte, le processus de traitement des allégations d’abus est devenu plus uniforme dans les diocèses. Mais le critère pour suspendre un prêtre du ministère – pour ce qui compte comme une allégation « crédible » – n’est uniforme qu’à cet égard : il est faible. Dans mon diocèse d’origine d’Arlington, en Virginie, par exemple, une allégation peut être jugée crédible – entraînant ainsi une suspension automatique du ministère de l’accusé – si l’allégation est simplement « crédible et plausible ». C’est un seuil très bas.

Compte tenu de la relativement faible fréquence des fausses accusations et compte tenu de la longue histoire de l’Église à ne pas réagir suffisamment aux allégations graves, un seuil bas de suspension temporaire est probablement approprié. Une action rapide est applaudie lorsque l’accusé se révèle coupable. Dans un cas comme celui de Theodore McCarrick, avec des rumeurs qui circulent sur les cercles cléricaux depuis des années, beaucoup se demandent – pour dire les choses modérément – pourquoi une action énergique n’a pas été entreprise beaucoup plus tôt qu’elle ne l’a été. (Et au bout de presque deux ans, où est le rapport du Vatican sur tout cela ?)

L’une des réalités sous-estimées de la crise des abus est qu’une partie importante des prêtres accusés ne sont ni manifestement coupables, ni manifestement innocents. Et cela crée un problème épineux pour les prêtres et pour les évêques.

La Charte de Dallas – conformément au droit canonique – est attentive aux droits de l’accusé, y compris le droit de protéger sa réputation : un prêtre ou un diacre accusé d’abus sexuels sur mineur doit bénéficier de la présomption d’innocence pendant l’enquête sur l’allégation et toutes les mesures appropriées doivent être prises pour protéger sa réputation. Il doit être encouragé à se faire assister par un conseil civil et canonique. Si l’allégation est jugée non fondée, toutes les mesures possibles doivent être prises pour rétablir sa réputation, si elle a été lésée.

Maintenir la présomption d’innocence et protéger la réputation de l’accusé sont des choses extrêmement difficiles, surtout lorsque le diocèse et les ordres religieux publient les noms des hommes qui ont été accusés.

Dans un tribunal pénal, la culpabilité doit être démontrée hors de tout doute raisonnable. Aujourd’hui, devant la cour de l’opinion publique, la présomption d’innocence des prêtres accusés est de plus en plus lettre morte. La charge de la preuve incombe à l’accusé et, à moins qu’il puisse prouver son innocence, la tache de l’accusation persiste. (C’est précisément l’argument avancé par la défense dans l’affaire du cardinal George Pell, dont le dernier appel est toujours en instance en Australie : il a été condamné, non pas parce que sa culpabilité était hors de doute, mais parce que son innocence n’a pas été prouvée.)

Les cas les plus difficiles sont peut-être les cas vraiment ambigus. Qu’arrive-t-il à un prêtre qui, « accusé de façon crédible », est acquitté ? Ou à un prêtre qui a été accusé de façon crédible, mais pour une raison ou une autre, ne peut être traduit en justice ? Que se passe-t-il lorsque l’évêque doit décider – sans se fier au jugement d’une cour ou d’un tribunal – de l’aptitude d’un de ses prêtres ? L’évêque le ramène-t-il au ministère ? Le garde-t-il indéfiniment dans les limbes pastorales ?

Quel évêque veut renvoyer au ministère un prêtre « jadis accusé de manière crédible », avec rien de plus que le principe « innocent jusqu’à preuve du contraire » pour justifier la décision ? Les enjeux de telles décisions sont immenses : pour l’évêque, le prêtre, le diocèse et, potentiellement, pour les victimes.

Ce sont des questions désagréables à méditer, surtout en période de suspicion et de méfiance. La façon dont nous réfléchissons à ces questions a beaucoup à voir avec le fait de connaître ou non quelqu’un qui a été maltraité, ou un prêtre qui a maltraité, ou un prêtre qui a été faussement accusé.

Les protocoles de traitement des allégations d’abus sont importants. Les procédures judiciaires et la transparence sont des éléments essentiels pour garantir la justice à la fois des survivants d’abus et des prêtres accusés. Mais nous ne devons pas oublier qu’aucun protocole ou processus ne peut éliminer complètement les décisions difficiles et conséquentes. La plus lourde de ces décisions incombe souvent à nos évêques, y compris à l’évêque de Rome. Rien ne remplace le jugement, la sagesse et la prudence.

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[(À propos de l’auteur

Stephen P. White est directeur général de The Catholic Project à l’Université catholique d’Amérique, et chercheur en études catholiques au Centre d’éthique et de politique publique.)]