À l’heure d’Internet et des réseaux sociaux, le meilleur et le pire se côtoient dans des échanges incessants. Il y a souvent danger de monter dans la violence, jusqu’à échange de noms d’oiseaux. On peut être soi-même parfois exaspéré par des propos insupportables, des erreurs manifestes, l’étalage de préjugés, surtout s’ils s’insèrent dans des discours de dénonciation et vont jusqu’à la calomnie. Trop c’est trop. Mais l’avantage de ces échanges est précieux, lorsqu’il met en évidence ce que Jacques Maritain appelait de bons désaccords. C’est-à-dire des désaccords qui mettent en valeur la difficulté d’une question controversée et qui se doit d’être creusée.
Le différend est d’abord d’ordre intellectuel, même s’il met en cause des données factuelles, des expertises nécessaires. Par exemple, la révolte des Gilets jaunes conduit à des élucidations politique et même à la philosophie politique. Est-il légitime de se révolter contre l’autorité ? Les institutions de la Ve République doivent-elles êtres modifiées ? Qu’en est-il de la représentation des citoyens, des populations et des territoires ? Mais il y a lieu aussi de rechercher quels sont les territoires en déshérence, quelles catégories de population souffrent de leurs conditions économiques.
Je pense aussi à une question très différente, mais aussi cruciale que celle des territoires : à propos de l’immigration, de l’intégration et de la cohabitation des différentes religions. Le sujet est également explosif et ne manque pas d’enflammer les réseaux sociaux. Il concerne les chrétiens, notamment les catholiques qui ne manquent pas de se diviser. Je viens de relever deux cas récents. Le premier concerne la présence de Mgr de Moulins-Beaufort à la Grande mosquée qui vient d’être inaugurée à Reims. Présence qui a provoqué récriminations et même reproches véhéments au nouvel archevêque. Celui-ci a répondu dans un communiqué qui a le mérite de faire les distinctions nécessaires mais qui n’a pas mis fin à la querelle.
Le second cas concerne une conférence de Mgr Jean-Paul Vesco, évêque d’Oran, sur le dialogue interreligieux tel qu’il s’est présenté lors de la béatification des martyrs d’Algérie. Le dialogue interreligieux met-il fin à l’impératif missionnaire pourtant clair dans l’Évangile ? Et puis il y a aussi la réalité massive et concrète de l’islam aujourd’hui. Voilà de quoi échanger, on l’espère dans un esprit de vérité, ne serait-ce que pour parvenir à de bons désaccords…
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 28 mars 2019.
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