Que le Pape n’ait pas voulu accepter la démission du cardinal Barbarin n’est pas pour me surprendre. François n’aime pas qu’on lui force la main et l’emballement mimétique, pour parler comme René Girard, qui a suivi le verdict du procès de Lyon, n’était pas fait pour l’impressionner. Au contraire, il lui fallait prendre quelque distance avec cette logique du bouc émissaire, qui condamnait l’archevêque de Lyon au statut de réprouvé. Les deux hommes se connaissent et s’apprécient depuis longtemps. Ce n’était pas la caricature de Philippe Barbarin que François recevait lundi, mais l’homme lui-même dans toute sa densité sacerdotale et pastorale.
Bien sûr, on me dira : il y a les victimes, vous les oubliez ! Non, je ne les oublie pas, mais j’ose affirmer que la stratégie qui consiste à prendre pour cible privilégiée l’archevêque de Lyon peut être efficace, surtout symboliquement, mais qu’elle induit un processus, à certains égards pervers. J’en veux pour preuve la haine de certains médias et cette volonté de piétiner quelqu’un dont on a fait un pantin, privé de sa personnalité. Le Pape ne mange pas de ce pain-là. Au contraire, les photos de la rencontre témoignent de la cordialité des relations entre les deux hommes.
L’un et l’autre sont conscients de la gravité de l’heure et de la nécessité d’une analyse approfondie, liée à une méditation spirituelle pour faire le bilan de la crise dans laquelle l’Église est engagée. Le temps de retraite que le cardinal va observer sera sûrement propice à la poursuite de cette recherche qui concerne l’ensemble du corps ecclésial. Reprendra-t-il un jour le commandement de son diocèse ? On verra bien. Ce qui est sûr, c’est qu’un départ de Lyon ne désarçonnerait pas cet apôtre qui est disponible pour toutes les missions. Cela, Jean-Marie Guénois du Figaro l’a bien compris. Philippe Barbarin est parfaitement capable de « repartir à zéro, notamment comme fantassin de la mission d’annoncer l’Évangile, le seul sujet de sa vie. Jeune prêtre déjà bien lancé, il avait étonné en filant à Madagascar comme missionnaire pendant quatre ans. » Ad multos annos, M. le cardinal !