« Les victimes déçues par le Pape ». Ce titre résume les doléances rapportées par les médias à la suite du discours conclusif de François, dimanche à Rome, au terme du sommet exceptionnel sur les crimes sexuels contre les enfants dans l’Église. Sont-elles justifiées ? Il est pour le moins prématuré de prétendre qu’aucune mesure ne sera prise en ce qui concerne « la tolérance zéro, l’exclusion définitive des violeurs d’enfants et des agresseurs sexuels employés par l’Église » pour reprendre la protestation d’un porte-parole. Les conséquences pratiques de la réflexion menée en commun, et suite d’ailleurs aux témoignages poignants de plusieurs victimes, vont être formalisées de façon précise par l’administration du Saint-Siège. C’est à partir de leur étude, que l’on pourra exercer un jugement fondé sur leur crédibilité et leur efficacité.
Certes, on comprend la colère et l’impatience de ceux et celles qui ont été blessés à vie par des ministres consacrés. La monstruosité de telles atteintes constitue une profanation. Le Pape a trouvé les mots les plus durs pour les caractériser. Que l’on ait trop tardé est aussi une certitude. Que l’autorité ait été défaillante et coupable, cela est désormais reconnu dans l’Église. Cela ne signifie pas pour autant qu’il faut négliger tout jugement prudentiel et historique pour comprendre ce qui s’est passé. Nous avons affaire à un phénomène universel qui n’a été révélé par les diverses institutions que dans les années 90.
Que le pape se réfère aux enquêtes des grandes formations internationales pour marquer ce caractère universel, ce n’est nullement pour noyer le poisson, comme le prétendent certains. Qu’il mentionne les fléaux que constituent l’inflation pornographique contemporaine, le tourisme sexuel à grande échelle, le fait que les abus contre les enfants se pratiquent en premier lieu dans le cercle familial, avec les proches, les entraîneurs et les éducateurs, ce n’est nullement pour se décharger de la responsabilité ecclésiale. C’est pour rappeler des réalités contemporaines massives dont l’ignorance produit un aveuglement généralisé. N’est-ce pas aussi pour les médias le moment d’un examen de conscience et d’une très impérative mise au point ?
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 26 février 2019.
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