Le Pape est donc arrivé hier à Panama, pour retrouver les participants aux JMJ. Le choix de ce petit pays d’Amérique centrale est significatif de la volonté de François de rejoindre toutes les régions du monde, y compris les plus modestes en population, y compris les plus déshéritées. L’archevêque de Panama, qui désirait depuis longtemps un tel événement dans son pays, expliquait dans La Croix d’hier que les jeunes y souffrent « de situations de marginalisation, de pauvreté et sont tentés par l’émigration par manque de perspectives ». Le même évêque se montre ambitieux, en estimant que les jeunes qui seront présents à cette rencontre ont un pouvoir de transformation sociale, en raison de leur foi.
Ainsi faut-il sans doute dépasser la pure image festive des JMJ, qui est certaine et même indispensable, pour saisir à quel point ces journées peuvent être l’occasion d’une réflexion et d’un engagement inspirés par la prière. Je suis convaincu, pour ma part, que les précédents rassemblements mondiaux, ont été, pour beaucoup, l’occasion d’une décision qui a orienté toute leur existence. Je me permets d’insister sur ce point, parce qu’il m’est arrivé d’en discuter avec des amis très en réaction contre un certain style de christianisme, qui leur paraissait relever de la pathologie dénoncée par Philippe Muray : celle de l’homo festivus, l’homme festif qui veut s’évader du monde réel et de l’histoire. N’est-ce pas, me disait-on, la tentation d’un certain christianisme joyeux et expansif qui justifierait le grief de Marx à l’encontre du religieux perçu comme opium du peuple ?
Je ne suis pas d’accord, parce que telle n’est pas l’orientation des JMJ, dont il ne faut pas oublier qu’elles comportent une forte part d’enseignement doctrinal. C’était déjà le cas en 1989, à Saint-Jacques-de-Compostelle où avaient lieu les premières grandes JMJ. Il ne faut pas oublier non plus qu’elles comportent l’exercice liturgique du chemin de croix où l’homo festivus a sûrement beaucoup de mal à se retrouver. Quant à Panama, le Pape et les jeunes vont y retrouver le défi considérable dont parle son archevêque. Défi qui suppose un total réalisme qu’il s’agit d’allier avec une espérance qui est tout autre chose qu’une sortie de l’histoire.
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 24 janvier 2019.
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Photo : © Isaac Gutierrez