Le président de la République a donc engagé l’ensemble de la nation dans un grand débat qui durera jusqu’au 15 mars prochain. Quelle que soit l’attitude choisie à l’égard d’un tel débat – certains se refusent obstinément à y participer – les questions posées ne sauraient être éludées, car il n’est pas douteux qu’elles conditionnent notre avenir. Aucune d’entre elles ne nous est indifférente, et notre journal, d’une façon ou d’une autre, sera appelé à la réflexion collective. Cependant, du point de vue religieux qui est le nôtre, une proposition retient particulièrement notre attention : c’est celle de la laïcité qui consonne avant tout avec la liberté de conscience. « Comment renforcer les principes de la laïcité française, dans le rapport entre l’État et les religions de notre pays ? Comment garantir le respect par tous de la compréhension réciproque et des valeurs intangibles de la République ? » Il est remarquable que cette question intervienne en fin de la liste proposée, ce qui indique qu’il ne s’agit pas d’un sujet mineur, alors même qu’il n’a jamais été évoqué depuis le début de la crise des Gilets jaunes.
Il se trouve, par ailleurs, que la publication de la lettre du président coïncide avec la réception à l’Élysée des différents responsables du culte auxquels un réexamen de la loi de 1905 a été proposé : « Renforcer la transparence du financement des cultes, garantir le respect de l’ordre public en luttant contre les propos haineux et les troubles graves, consolider la gouvernance des associations cultuelles et responsabiliser leurs dirigeants. » Tels sont les trois axes de la réforme envisagée. Mgr Olivier Ribadeau-Dumas, porte-parole de la Conférence des évêques de France, n’a pas fait d’objection au cadre proposé, sous réserve d’un examen approfondi de son contenu.
Pourquoi ne pas le dire ? Il est vrai qu’on ne désire pas froisser la susceptibilité de nos compatriotes musulmans, mais s’il y a nécessité de revoir le fonctionnement de la loi de séparation, c’est en raison de la présence en France d’une forte population musulmane, des difficultés qu’il y a à intégrer une religion qui possède ses propres règles, celles que le législateur n’avait pu prendre en compte en 1905. Il faut compter aussi avec les périls inhérents à l’extrémisme islamiste. Face à ce défi, il reste à espérer que la conception pragmatique de la laïcité à la française parviendra à des solutions adéquates. Ce n’est pas gagné d’avance. Avant toute chose, c’est bien la liberté de conscience qui devra être garantie. Elle le sera d’autant plus que cette laïcité sera exempte de contenu hostile au fait religieux et conservera ses vertus de sagesse prudentielle.
Pour aller plus loin :
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- Vladimir Ghika : le contexte politique avant la guerre de 1914-1918
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- LA « MODERNITÉ » : UN CENTENAIRE OUBLIÉ
- La République laïque et la prévention de l’enrôlement des jeunes par l’État islamique - sommes-nous démunis ? Plaidoyer pour une laïcité distincte