« Ce qui domine en ce moment, ce n’est pas seulement la violence, c’est la haine. La haine est universelle. Elle est de tous côtés. Tout le monde a une responsabilité dans ce climat que l’on n’avait pas vu en France depuis très longtemps. Sans doute depuis 1962 et la fin de la guerre d’Algérie. Tout le monde dérape. » Tel est en résumé le diagnostic opéré par ce doyen des éditorialistes français qu’est Alain Duhamel. Je serais plutôt enclin à prêter attention à l’analyse qu’il développait ainsi sur BFM TV. C’est vrai que partout le ton monte, l’invective répond à l’invective, parfois même l’injure à l’injure. Ce n’est d’ailleurs pas sur le seul terrain politique.
Si l’on suit, par exemple, les commentaires qui accompagnent parfois le procès du cardinal Barbarin à Lyon, on est effaré de leur violence qu’accompagne souvent un rare degré de sottise. C’est le danger de faire d’un homme d’autorité un bouc émissaire, coupable de tous les maux. Et de ce point de vue, la haine trouve parfois ses relais du côté d’hommes d’Église ou de chrétiens qui règlent leurs comptes avec l’institution ou simplement avec l’archevêque dont ils réprouvent les opinions et les démarches courageuses. J’ose, toutefois, espérer que le procès de Lyon ne contribuera pas à cette amplification de la haine et permettra une meilleure élucidation des graves problèmes qui y sont posés. J’ai plutôt apprécié les propos de François Devaux, président de La parole libérée, qui me semble échapper à la logique du ressentiment.
S’il s’agissait vraiment de « briser l’omerta et de réveiller les consciences », on ne peut qu’être d’accord : « À présent, c’est à la justice, à l’Église et à la société de faire leur devoir, nous, nous avons fait notre devoir de citoyen. » Et de saluer ainsi certaines initiatives de l’Église de France. Mais il ne faut pas se faire d’illusion : la paix, la concorde, la justice, l’équité ne naîtront pas miraculeusement. Encore faut-il que des citoyens de bonne volonté se retrouvent, de partout, pour échapper au terrible piège de la haine et de ressentiment.