Dans le film Rudy, le jeune Daniel « Rudy » Ruettinger parle à l’ancien président de Notre-Dame, le père John Cavanaugh. Rudy se plaint de ce que ses efforts n’ont servi à rien, et bientôt son rêve de jouer dans l’équipe de foot-ball à Notre-Dame sera hors d’atteinte. « Ai-je fait tout ce que je pouvais ? » demande Rudy « Pouvez-vous m’aider ? » « Mon fils, » répond Cavanaugh, « en nombre d’années d’études religieuses, j’ai abouti à seulement deux conclusions incontournables : Il y a un Dieu… et je ne Le suis pas. »
Il n’est pas sûr que cette conversation ait eu lieu comme elle est présentée dans le film. Mais un peu d’histoire pourrait être éclairant. Cavanaugh était le président de Notre-Dame avant Théodore Hesburgh. On savait qu’il était très proche de Joseph P. Kennedy, et de la famille Kennedy – tant et si bien qu’il célébra de nombreux mariages de la famille Kennedy.
Après l’assassinat du président John F. Kennedy, Cavanaugh a séjourné avec la famille Kennedy dans leur propriété de Hyannisport, avant de faire avec eux le voyage à Washington D.C. pour les obsèques. Il a dit une messe spéciale dans la chambre Est de la Maison blanche avant les funérailles de John F. Kennedy, et fut l’un des trois prêtres qui ont célébré les funérailles elles-mêmes.
Ainsi, Cavanaugh ne manquait pas de relations. Quand Rudy lui a demandé « Pouvez-vous m’aider » la requête n’était peut-être pas aussi naïve qu’on pouvait le croire. La plaisanterie sous-jacente implicite dans la réponse de Cavanaugh aurait pu être ceci : « Ecoute, petit, il se peut que j’aie des relations au plus haut niveau du gouvernement des Etats Unis, et c’est vrai que c’est moi qui ai mis Ted Hesburgh à la présidence de l’université. Mais pour ce qui est du foot-ball à Notre-Dame, tu sais, je ne suis pas Dieu ! ».
Chaque jour nous rapporte des violences, des bagarres, des attaques d’églises, des inondations, des désastres et des morts. Il serait facile de conclure que Dieu n’existe pas, que ce que nous appelons « Dieu » n’est qu’un rêve, une image idéalisée d’un être que nous aimerions bien voir exister, mais qui n’existe pas.
Et pourtant, à travers tout cela – à travers tous les doutes, les problèmes et les détresses – nous avons besoin de nous répéter sans cesse : « Dieu existe. Et il nous garde. Son amour providentiel recouvre toute contingence. Il a un plan. Et Il ne nous abandonnera pas. »
Ainsi, nous pouvons espérer – espérer que, à la fin, le bien triomphera du mal, qu’il s’agisse du mal dans le monde ou du mal dans nos cœurs ; l’espoir que chaque larme sera essuyée, et que le peuple de Dieu entier se réjouira ; l’espoir que nos luttes et nos sacrifices de maintenant, même s’ils semblent vains, auront un sens.
Qu’est-ce qui peut nous donner confiance que cela se passera ainsi ? Pour les chrétiens, c’est leur foi en l’incarnation, la mort et la résurrection de Jésus Christ. Le Dieu qui tire du bien de la torture et de la mort de Son propre Fils peut tirer du bien de n’importe quoi.
« Tout sera bien et ce sera bien de toutes les manières » nous assure Julian de Norwich dans sa treizième révélation de l’amour divin, fameux passage cité par T.S. Eliot dans Petite enchère, quatrième de ses Quatre quartets.
Alors, nous y allons, pour « faire le bien » pour « combattre le bon combat », pour « lutter, chercher, trouver, et ne pas céder ». Et avant longtemps, nous commençons à remarquer, non seulement notre propre état de pécheur, mais aussi nos limites.
Avez-vous jamais, allant à la messe, regardé les visages des autres personnes agenouillées là, priant dévotement pour la douzaine de choses dont elles ont si désespérément besoin, comme vous le faites pour les douzaines de choses dont vous-même avez si désespérément besoin ?
Les avez-vous remarqués, et avez-vous pensé « je ne peux même pas commencer à comprendre tous les espoirs et les joies et les craintes qui sont au cœur de cette seule personne, et il y en a des centaines dans cette église. » Puis vous sortez dans la rue et croisez encore plus de gens. Vous regardez leurs visages et vous y voyez le souci et le tourment ou de l’espoir mélangé à de la peur, de l’amour mélangé à de la rancune, et vous vous demandez comment vous pourriez le moins du monde aider ces personnes.
Le crime fait rage dans la ville ; la luxure et la cupidité ravagent les vies des gens ; la maladie et la mort emportent les gens que nous connaissons et aimons. Et que pouvons-nous y faire ? Pas grand-chose. Nous sommes comme les apôtres sur la colline qui regardaient ces 5.000 personnes, n’avaient que quelques minables morceaux de pain et un peu de poisson, et se disaient : « Il n’y en aura jamais assez, et de loin ! »
C’est à ce moment que nous avons besoin de nous répéter la deuxième vérité importante : « Dieu existe, et je ne Le suis pas. » Quand tout paraît « trop », nous avons besoin de nous souvenir que Dieu ne s’attend pas à ce que nous soyons Lui. Nous sommes appelés à aimer et servir les gens que Dieu met sur notre route. Mais nous n’avons pas la responsabilité de prendre soin du monde. Seul Dieu est assez grand pour le faire.
Le bon samaritain n’était pas capable d’empêcher le crime dans son pays, ni même sur la route de Jérusalem à Jéricho. Mais il a été capable de relever le juif à moitié mort qu’il a rencontré sur la route et de prendre soin de lui.
Mère Theresa n’a pas été capable de résoudre le problème de la pauvreté en Inde – qui le pourrait ? Mais elle a été capable de ramasser le prochain homme, la prochaine femme, le prochain enfant qu’elle a trouvés à moitié morts sur le bord de la route.
« Il y a un Dieu » donc nous pouvons et devons agir. « Mais nous ne Le sommes pas ». Aussi après que nous ayons fait ce que nous pouvons, nous offrons le reste aux bons soins de Dieu dans son amour providentiel. Nous prions, et c’est ce que nous avons de mieux à faire. Il y a un Dieu, mais je ne Le suis pas.
Source : https://www.thecatholicthing.org/2018/09/01/there-is-a-god-i-am-not-him/
Photo = Le Dôme d’Or à Notre-Dame.
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