Le mouvement des « gilets jaunes » a déjà fait beaucoup parler et les analyses sociologiques ne font que commencer. C’est à un diagnostic sur la situation française que je voudrais me livrer très simplement en rappelant ce qui est incontestable et ce en cinq points.
1° Le donné financier
Le PNB ( produit intérieur brut ) est de 2200 milliards d’euros et la dette de la France atteint 100% de ce PIB soit les 2200 milliards. Elle représente le cumul de 42 ans de déficit annuel du budget de l’État ! Et le déficit continue. Il va s’accentuer avec les mesures annoncées par le président de la République si aucune dépense n’est supprimée. Chacun sait que les dépenses viennent surtout du nombre de fonctionnaires, l’accroissement ayant été spectaculaire en ce qui concerne les fonctionnaires des collectivité territoriales et de l’intercommunalité (communautés de communes, d’agglomération et métropoles). On évalue à 500 000 le nombre de fonctionnaires des collectivités territoriales embauchés en 15 ans ! Donnons encore deux chiffres très importants : les dépenses publiques (total des dépenses de l’État, des collectivités et sociales) représentent 57% du PIB soit environ 1300 milliards d’Euros. En Allemagne elles ne représentent que 47% du PIB. Ces 10 points d’écart expliquent la différence entre les deux pays. Les dépenses sociales représentent en France environ 700 milliards d’Euros. On n’est pas dans un État libéral mais en plein dans un État Providence fonctionnant à plein régime !
2° Le donné politique
Il faudrait s’étendre sur l’état de la Ve République, ce qui est impossible ici. Disons que le régime semi-présidentiel est mal équilibré. Il faudrait passer à un régime présidentiel où il n’y a pas de premier ministre mais où le président ne peut pas dissoudre l’Assemblée (États-Unis). La proportionnelle serait plus juste en soi pour l’élection des députés mais il faudrait alors des primaires pour constituer la liste dans chaque parti, sinon les leaders se remettront tous en position éligible ce qui réduirait à néant le réforme. Ajoutons que la démocratie locale n’existe pas. Les majorités municipales sont intouchables pendant 6 ans : la minorité n’obtient rien. Le comble est atteint dans l’intercommunalité où le conseil intercommunal n’est pas élu au suffrage universel direct. Les membres sont envoyés par les communes et le citoyen paie des impôts à une intercommunalité qu’il n’a pas élue ! et il paie plus d’impôts à la structure intercommunale qu’à sa commune. Comble de tout : le président et les nombreux vice-présidents sont rémunérés alors qu’ils ne dépendent pas d’un suffrage universel direct. Les métropoles dont on se vante sont dans ce cadre scandaleux.
3° Le donné social
Contrairement à ce que pensent beaucoup de Français, les inégalités en termes de différence de revenus sont moins fortes en France que dans la plupart des pays de l’Union européenne, à cause d’une fiscalité très redistributive et d’un État Providence très développé. La plainte des « gilets jaunes » vient surtout des dépenses contraintes : essence, logement (achats de pavillons) ; dépenses de téléphones portables (les enfants en possédant tous). Ce ne sont pas les plus pauvres qui manifestent, en dehors des mères célibataires (il y aurait à dire à ce sujet sur la valorisation de la sexualité qui engendre des familles monoparentales….)
4° La France est un État Providence
Tocqueville l’écrivait en 1840 ! Les Français dans leur majorité déifient l’État et attendent tout de lui. J’ajoute un chiffre à ceux que j’ai donnés plus haut : les prélèvements obligatoires : impôts et cotisations (maladie, chômage, retraite) représentent 48,5% du PIB. C’est un record dans les pays occidentaux et malgré cela on entend des gens dire que cela ne suffit pas. Il est vrai que plus d’un foyer français sur deux ne paie pas l’impôt sur le revenu : il est facile de réclamer plus de dépenses dans ce cas !
5° Le problème de la formation
Il y a en France un problème de sous-formation scolaire et professionnelle. On pense que 150 000 jeunes quittent chaque année le système scolaire sans diplôme ni qualification professionnelle alors qu’un jeune Allemand sur deux a une qualification technique qui lui permet de trouver un emploi. Plus de la moitié des chômeurs en France n’a pas de véritable qualification professionnelle et les 32 milliards que coûte cette formation professionnelle ne bénéficient qu’à 10% des chômeurs ! Ces données sont impressionnantes mais rien ne change.
Ces quelques éléments décrivent les contours du problème français. Puissent-ils être utiles à tous.