Le matin du Jeudi saint, le Pape François a célébré la Messe chrismale dans la basilique Saint-Pierre et y a prêché. Il s’est adressé aux prêtres célébrant sur les thèmes de la proximité de Dieu, et de la proximité que les prêtres devraient avoir avec leurs fidèles. Cette proximité de la prêtrise est « une attitude qui engage toute la personne .» Il loue les prêtres des rues qui sont proches, disponibles, des prêtres qui sont là pour le peuple, et qui parle avec chacun ».
La proximité, pense-t-il, est « la clé de la miséricorde », et aussi « la clé de la vérité ». Plus loin, il ajoute « la vérité n’est pas seulement la définition de situations et de faits à une certaine distance, par un raisonnement abstrait et logique. C’est plus que cela. La vérité est aussi la fidélité (émeth). Elle vous fait appeler chacun par son nom exact, comme le Seigneur les nomme, avant de les catégoriser, ou de définir -la situation-.
Puis le pape François fit une déclaration étonnante:
Nous devons être attentifs à ne pas tomber dans la tentation de faire des idoles de certaines vérités abstraites. Elles peuvent être des idoles confortables, et toujours d’approche facile; Elles procurent un certain prestige et pouvoir, et sont difficiles à discerner. Parce que la « vérité-idole » imite, elle se vêt des mots de l’Evangile, mais ne laisse pas ces mots toucher le coeur. Bien pire, cette vérité-idole éloigne les personnes ordinaires de la proximité guérissante des mots et des sacrements de Jesus.
Ces mots sont troublants. Une idole est un faux dieu. L’idolâtrie, c’est rendre un culte à un autre que Dieu – c’est un grave manquement au Premier Commandement. L’idolâtrie est essentiellement un culte rendu par l’homme à lui-même à travers une réalité créée. Il décide quelles idoles sont importantes pour lui. Son faux dieu est sa propre création, et ainsi il le sert. C’est le complet renversement du vrai culte que l’homme doit à son Créateur.
L’abstraction est un processus mental par lequel nous accédons à des connaissances de réalités métaphysiques en considérant ces choses matérielles que notre raison appréhende en tirant d’elles des conclusions rationnelles. Par abstraction, nous comprenons ce qui sous-tend la réalité qui est sous nos yeux. Ainsi en voyant des personnes humaines et en faisant abstraction à partir de cette connaissance, nous en arrivons à connaître la catégorie de l’humanité, et nous commençons à comprendre ce qui constitue la nature humaine. L’abstraction permet à la réalité de se révéler à notre esprit.
La vérité est la conformité de l’esprit et de la réalité. La vérité sur Dieu est comprise lorsque nous saisissons correctement la nature et la raison de Sa création (théologie naturelle), et lorsque nous croyons dans la révélation surnaturelle qu’Il peut faire. Jésus nous a dit qu’Il est le Chemin, la Vérité et la Vie. Toutes les vérités ont leur origine dans la Vérité qui est Dieu fait homme. Le Chrétien comprend que la vérité est une Personne.
Les vérités dogmatiques et morales viennent de Dieu et mènent à Dieu. La vérité bannit l’erreur, et particulièrement l’idolâtrie, car toute vérité se trouve dans la Parole faite Chair. Ce qui vrai est bon et beau parce qu’il nous unit au Dieu bon et beau. Il nous a créé pour que nous puissions le connaître grâce à la vérité qu’Il est.
Etant donné cela, est-il possible de transformer la vérité en idole? L’enseignement dogmatique catholique et les vérités de la loi morale peuvent-elles devenir des faux dieux que nous adorons pour gagner « un certain prestige et pouvoir »? Ce n’est pas possible. La vérité telle qu’elle est enseignée par l’Eglise est ce qui nous unit au vrai Dieu et nous libère des erreurs de l’idolâtrie. La vérité n’est pas une idole, c’est le remède contre l’idolâtrie.
Le pape François affirme que le « vérité-idole » imite, se vêt des paroles de l’Evangile mais ne laisse pas ces mots toucher le coeur ». L’Evangile est-il obscurci ou falsifié par des vérités enseignées par le Magistère de l’Eglise – vérités qui sont tirées cet Evangile?.
Si la vérité pouvait être une idole, alors naturellement toute utilisation des Ecritures pour illustrer cette vérité particulière serait une charade. Mais la vérité de Dieu ne peut pas être une idole parce que ce que Dieu nous a fait connaître est notre moyen pour entrer dans Sa réalité – le but de notre existence.
Le pape François assure que le concept « vérité-idolâtrie » en fait « éloigne les personnes ordinaires de l’intimité guérissante des paroles et les Sacrements du Christ.
Ici nous avons la clé interprétative de ce que, à mon avis, il veut signifier. Il défend sa décision dans Amoris Laetitia, de permettre certains, qui vivent dans une union adultère, de recevoir le sacrement de pénitence et la Sainte Eucharistie tout en ayant l’intention de continuer à entretenir des relations adultères;
Cette innovation doctrinale et disciplinaire, qui contredit tous les précédents enseignements et législations et enseignements des papes, fut confirmée comme son intention sans équivoque dans sa lettre aux évêques argentins de la région de Buenos Aires.
Ceux qui défendent l’enseignement constant et les pratiques dans cette matière ont été l’objet de différentes calomnies. Maintenant ils sont catalogués comme s’étant engagés dans lune horrible violation du Premier Commandement parce qu’ils pensent que la Doctrine Catholique est inviolable, et ainsi qu’elle s’impose à tous les croyants.
Si cette vérité pouvait jamais perdre sa qualité d’être le moyen de connaître la volonté de Dieu, et devenir ainsi quelque chose de faux, et donc de mauvais, alors l’humanité est perdue. Sans la vérité immuable, nous n’avons aucun moyen de vivre en unité avec Dieu, en vérité, et les uns avec les autres.
La bonne nouvelle est que la vérité ne peux jamais être fausse. Ce n’est pas une idole, et défendre la vérité n’est pas de détourner les fidèles de Dieu vers de fausses adorations, mais c’est plutôt de les inviter à embrasser ce qui est, en fait, leur plus profond désir pour la bonté, le bonheur et la paix.
La vérité vous rendra libres, elle ne doit pas nous rendre esclaves de l’erreur ou de l’obscurité. Ceux qui cherchent à être guéris en s’approchant plus près du Christ dans ses sacrements réaliseront seulement ce but en connaissant et en faisant ce que Jesus leur demande. Rejeter en pratique sa parole au sujet de la permanence du mariage et l’obligation d’éviter l’adultère, et ensuite de faire valoir le droit de recevoir les sacrements risque de transformer une opinion erronée en idole.
Source : https://www.thecatholicthing.org/2018/04/21/of-truth-and-idols/
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Le Rev. Gerald E. Murray, J.C.D. est le curé de La Holy Family Church, New York, NY, et avocat canoniste.