Jean Le Cour Grandmaison : L'apostolat des laïcs - France Catholique
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« Ô Marie conçue sans péché »
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Jean Le Cour Grandmaison : L’apostolat des laïcs

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L’Eglise à partir des années 1930 a développé parallèlement deux « types » dont Jean Le Cour Grandmaison aura tout fait pour éviter l’opposition et a fortiori l’affrontement : le « paroissien » et le « militant ». Mgr Gabriel Garonne (alors évêque coadjuteur de Toulouse), rapporteur pour l’épiscopat, était fort optimiste en 1953 en pensant que « le temps des heurts et des vaines discussions était bien révolu ». Pour autant, il regrettait qu’il n’y ait pas de « vraie intelligence mutuelle » et entrevoyait « les signes d’une véritable disjonction » entre « deux types d’esprit, deux conceptions de l’apostolat, deux mentalités sociales et religieuses ». L’histoire a tranché : l’action catholique spécialisée n’a pas échoué, mais elle n’a pas réussi ; la paroisse a survécu mais est minée par la raréfaction des prêtres.

Le souci constant de Le Cour Grandmaison en reconstituant les unions paroissiales était de continuer à inscrire l’Eglise dans le territoire, conçu comme espace identifié, comme lieu matérialisé, où s’incarner, se manifester, se rendre « visible » au monde. Cela va bien au-delà du simple « clocher » au milieu de la campagne ou même en ville, de l’édifice église. C’est bien entendu le rejet d’une église de classe, ou de milieu social, même si l’habitat parfois, surtout en ville, tend à ségréguer les groupes selon le revenu. Il y va de la « catholicité » de l’Eglise qui suppose de toucher et de mêler toutes les populations.

L’objet de la Fédération nationale d’Action catholique (F.N.A.C.) était donc dès le départ en 1946 de rendre les paroisses – et les paroissiens – autant « apôtres » et « missionnaires » que ceux qui allaient vers leurs « frères » de travail. Ce n’est évidemment pas la même chose que d’aller vers des voisins de rue et de quartier.

Le travail de la F.N.A.C. revêtait donc dès l’origine une fonction critique. Le président ne mâchait pas ses mots lors du premier congrès national le 22 juin 1946 : il faisait siennes les critiques adressées en 1943 par les abbés Daniel et Godin tout en étant lucide sur l’utilisation négative qui pouvait en être faite. Mais elles n’auraient pas tant remué l’archevêque de Paris si elles n’avaient été aussi appropriées.

On ne pouvait en rester au constat. On n’a pas fait suffisamment attention aux remèdes proposés. Or qu’est-ce qui fait la pierre d’angle, les fondations de la paroisse sinon l’eucharistie, c’est-à-dire la messe : au sortir de la guerre, le premier réflexe de Le Cour Grandmaison est de s’attaquer à la première des « manifestations publiques de la vie officielle » de la paroisse qu’est… la Messe du Dimanche ! Il prône en toute première mesure le renouveau liturgique !

« Renouveau liturgique, de notre point de vue, signifie une messe, des sacrements, des cérémonies qui donnent le sentiment que tous ceux qui y participent croient de toute leur âme à ce qu’ils font, et que ce qu’ils font a une signification, un sens profond, que la prière qui s’exprime ainsi jaillit du cœur et entraîne l’intelligence, qu’elle est lumière, vérité et amour et non simplement attitude du corps et murmure des lèvres.
C’est cela qui importe, et non la fidélité à certain ritualisme où l’esthétique, et même le snobisme, risqueraient aisément de se glisser.

Nous n’avons donc pas à prendre parti, ici, pour telle ou telle méthode, pour la messe célébrée face à l’assistance ou en lui tournant le dos, pour la substitution plus ou moins complète du français au latin dans la liturgie… »
Ailleurs il écartera d’un revers de la main les arguments sur le style vestimentaire du clergé, soutane ou veston. Là n’est pas « l’essentiel ». On ne fera pas aisément passer Le Cour Grandmaison pour un « intégriste ».
Le reste sera comme donné par surcroit. L’action, le service, tout découle de ce point de départ. L’avoir minimisé fut une des causes des échecs d’un certain militantisme. Mais que dire aujourd’hui de la paroisse ?

« L’Eglise catholique dont la spiritualité est fortement eucharistique, dont la pratique privilégie cette célébration depuis des siècles… en arrive à ne plus pouvoir offrir l’eucharistie dominicale aux fidèles auxquels elle fait par ailleurs un devoir d’y participer. » (P. Bernard Sesboüé, s.j. « N’ayez pas peur. Regards sur l’Eglise et les ministères d’aujourd’hui », DDB, 1996, cité par Elisabeth Abbal, « pour une approche théologique de l’inscription de la paroisse dans le territoire », Communio, XLII, 6, novembre-décembre 2017. Elle a soutenu une thèse sur le sujet : « Paroisse et territorialité dans le contexte français », Cerf, 2016.)

La revue Communio avait déjà consacré un numéro thématique à la Paroisse : n°138 XXIII, juillet-août 1998.

Il n’est donc pas révolu de jeter un coup d’œil en arrière sur le bouillonnement des initiatives qui avaient précédé souvent de vingt ans le Concile Vatican II. On en trouvera un bilan dans le dossier du n° spécial de « la France catholique », n°800 sous la plume de Georges Daix pour le renouveau liturgique (pendant six ans de 1946 à 1952 le R.P. Roquet, directeur du Centre de Pastorale Liturgique, donna des « billets » au journal) et de Louis-Henri Parias pour la « présence à l’apostolat » : « Critiques, mais sympathiques, nous avons été présents à tous les renouveaux ».

INDEX

Feltin (Maurice), 1883-1973, cardinal (1953), archevêque de Bordeaux de 1935 à 1949, puis de Paris de 1949 à 1966.

Gerlier (Pierre-Marie) 1880-1965, cardinal (1937), évêque de Tarbes et Lourdes de 1929 à 1937, archevêque de Lyon de 1937 à 1965, biographie par Olivier Georges, DDB, 2014

Liénart (Achille) 1884-1973, cardinal (1930), évêque de Lille de 1928 à 1968, biographie par Catherine Masson, Cerf, 2001

Suhard (Emmanuel) 1874-1949, cardinal (1935), évêque de Bayeux et Lisieux de 1928 à 1930, archevêque de Reims de 1931 à 1940 puis de Paris de 1940 à 1949, biographie par Jean-Pierre Guérend, préface d’Emile Poulat, Cerf, 2011 ; ses trois lettres pastorales de carême : « Essor ou Déclin de l’Eglise », 1947, « Le sens de Dieu », 1948, « le Prêtre dans la cité », 1949.

Rollet (Henri) 1917-2003, président de la FNAC puis ACGH de 1954 à 1965, auditeur laïc au Concile Vatican II, biographie par Jacques-Hubert Rollet, Sorbonne, 2016

Bibliographie

Adrien Dansette, « destin du catholicisme français 1926-2006 », Flammarion 1957

« Les catholiques dans la République 1905-2005 », sous la direction de Bruno Duriez, Etienne Fouilloux, Denis Pelletier, Nathalie Viet-Depaute, éditions de l’Atelier, 2005

Emile Poulat, « l’ère postchrétienne », Flammarion 1994.

Yvon Tranvouez, « Catholiques d’abord. Approches du mouvement catholique en France. XIXe XXe siècles », Editions ouvrières 1988.

Etienne Fouilloux, « Une Eglise en quête de liberté. La pensée catholique française entre modernisme et Vatican II 1914-1962 », Desclée de Brouwer 1998

Gabriel Garonne (Mgr), « l’action catholique, son histoire, sa doctrine, son panorama, son destin », Fayard 1958