HOMMAGE À MAÎTRE ROLAND JOUSSELIN - France Catholique
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HOMMAGE À MAÎTRE ROLAND JOUSSELIN

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Roland Jousselin : un nom, un ton, un maintien, un style…

Doté d’un très fort charisme, Maître Roland Jousselin laisse une vive impression à tous ceux qui l’ont approché, qu’ils aient été en leur temps de jeunes avocats stagiaires ou des candidats sollicitant leur admission au sein d’une institution chevaleresque.

Tous gardent aujourd’hui le souvenir impérissable de sa belle et forte personnalité.

Parisien par son ascendance paternelle, Alsacien par sa mère Lucie Geiger native de Haguenau, le jeune Roland naît le 3 septembre 1925 à Paris.

Sur les traces de son père Maître Jean Jousselin, avocat à la Cour, il entame des études supérieures qui l’amèneront notamment à se pencher sur les questions juridiques.

Brillant, le voilà bientôt docteur en droit, licencié ès-lettres et diplômé d’études supérieures d’histoire.

Il est, avant tout, un homme d’ordre : l’ordre au singulier et les Ordres au pluriel…

L’ordre au singulier : Maître Jousselin déteste non seulement le désordre, mais aussi l’improvisation et l’approximation, les combinaisons et les petits arrangements fussent-ils appelés de nos jours « des accommodements raisonnables »…

Il est entier, d’un seul bloc : monolithique comme un menhir et, quand il le faut parce que la vie l’impose parfois, tranchant comme un silex taillé…

Homme d’honneur et de fidélité, il pourrait faire sienne la devise de Guillaume d’Orange-Nassau : « Je maintiendrai ».

Homme de rigueur et de loyauté, Roland Jousselin a le regard clair d’un homme de droiture et le verbe précis d’un homme de culture…

Au cours de sa vie d’adulte, voilà qu’il devient membre de multiples institutions ordinales.

Juriste éminent et remarqué, Roland Jousselin devient d’abord avocat à la Cour avant de rejoindre le prestigieux Ordre des avocats au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation. Un ordre professionnel très sélectif, qui regroupe, pour toute la France, une centaine d’avocats dans seulement soixante cabinets. Un Ordre prestigieux qui, dans son organisation actuelle, fête cette année son bicentenaire, mais dont les origines remontent à l’édit royal de septembre1643 et à la déclaration de Louis XIV de janvier 1644…

Roland Jousselin exerce cette noble charge d’avocat aux conseils durant trente et un ans, avant de se voir conférer l’honorariat.

A 29 ans, en 1954, il épouse Marguerite-Marie Rousselin et entame alors une longue période de soixante-trois années de fidélité et de félicité conjugales.

Un peu plus tard, alors âgé d’à peine une trentaine d’années, Roland Jousselin devient massier…

Les bons dictionnaires nous enseignent que le massier est, dans un atelier de peinture, de sculpture ou de gravure, un élève chargé de recueillir les cotisations (la masse), de pourvoir aux dépenses communes et de seconder le maître.

Dès lors, le jeune Roland bifurque-t-il vers une formation artistique ? Après la faculté de droit, fréquente-t-il l’Ecole nationale supérieure des beaux-arts de Paris ? Le quai Malaquais après la place du Panthéon ?

Il n’en est rien et son rôle de massier consiste, dans une seconde acception du terme, à porter sur ses épaules la lourde masse d’armes de la Lieutenance de France de l’Ordre équestre du Saint-Sépulcre de Jérusalem, lors des cérémonies d’investiture en l’église Saint-Leu et Saint-Gilles à Paris.

En effet, la foi solide qu’il a reçue dès l’enfance, son goût pour la tradition et pour l’histoire, vont le mener vers d’autres Ordres : ce qu’il est convenu d’appeler les Ordres militaires et religieux de la chevalerie chrétienne.

Le 19 novembre 1955, à 30 ans, il devient membre de l’Ordre souverain de Malte.

Quand on a un coeur généreux et une foi ardente, ce qui est le cas de Roland Jousselin, rien n’est impossible. Sa sollicitude particulière envers les pauvres et les malades se double d’un engagement auprès des chrétiens de Terre Sainte.

A 34 ans, le 20 juin 1960, après avoir été massier, le voilà adoubé chevalier du Saint-Sépulcre. Son père a été admis dans ce même Ordre six ans plus tôt, en 1954, à l’âge de 62 ans.

Fils de chevalier et devenu chevalier lui-même, Roland est un jeune homme sérieux et fiable. Il se voit confier en 1961 la responsabilité de cérémoniaire-adjoint de la Lieutenance.

Six ans plus tard, en 1967, il devient cérémoniaire en titre.

En 1973, ses qualités de juriste, alliées à sa connaissance intime de l’Ordre, le désignent tout naturellement pour occuper la charge de chancelier. Il incarne cette fonction durant très exactement un quart de siècle, jusqu’en 1998 : un record inégalé au cours du XXe siècle !
Il bénéficie ainsi de la pleine confiance de deux éminents Lieutenants de France de l’Ordre du Saint-Sépulcre : le Général Henry de Chizelle et le Général Comte Louis d’Harcourt.

Promu commandeur de l’Ordre en 1966, Maître Roland Jousselin devient Grand Officier en 1979, puis Grand Croix en 1985.

Sa double appartenance Malte et Saint-Sépulcre l’amène à adhérer à l’Association des chevaliers pontificaux, qui regroupe, outre les membres des deux Ordres précités, les Gentilshommes de Sa Sainteté et les titulaires des distinctions purement honorifiques décernées par le Saint-Siège : les Ordres de Pie IX, Saint-Grégoire le Grand, Saint-Sylvestre, ainsi que les Croix du Latran, « Pro Ecclesia et Pontifice » et « Bene Merenti ».

Au milieu des années 1970, Maître Jousselin devient le chancelier de cette noble association créée en 1890.

Son inlassable dévouement est reconnu et récompensé par le Saint-Siège, avec l’attribution de la croix de chevalier de Saint-Grégoire le Grand.
Il devient officier du Mérite « Pro Merito Melitensi » de l’Ordre souverain de Malte en 1974. Il reçoit la croix du Mérite avec plaque d’or de l’Ordre du Saint-Sépulcre en 1999, tandis que le président de la République le nomme chevalier de la Légion d’honneur en décembre 2000.

Sa fidélité à l’égard du Saint Père et du Saint-Siège n’est pas un vain mot. Toute sa vie, Roland Jousselin est le fils très dévoué de Notre Saint Père le Pape, autant que le fils très aimant de Notre Sainte Mère l’Eglise.

Chaque année, à l’occasion de l’assemblée générale des Chevaliers pontificaux, il envoie au Pape un télégramme par lequel il l’assure de ses sentiments déférents à l’égard de sa personne et de son action, ainsi que de son entier dévouement envers le Saint-Siège.
Animé d’une authentique piété filiale, Roland Jousselin est un homme extrêmement courtois et méticuleux. Il n’omet jamais de donner lecture de cet immuable télégramme, devenu au fil des ans quasi-rituel et légendaire, au cours du dîner qui clôture l’assemblée générale dans les salons du Cercle France-Amériques, avenue Franklin-Roosevelt à Paris.
Et quand, poussé par la nécessité, il faut se résoudre à l’abandon du bon vieux télégramme, Roland Jousselin poursuit sa mission en envoyant son message désormais sous la forme d’un téléfax…

Il est un fait patent que les innovations technologiques, l’irruption de l’économie numérique et tout ce que l’on nomme de nos jours les nouvelles technologies de l’information et de la communication, ne font, à l’évidence, pas partie des centres d’intérêt de Maître Jousselin.

Avec sagesse, il sait cependant s’y plier quand les évolutions deviennent irréversibles.

Car sa passion est l’histoire et son violon d’Ingres, l’écriture.

En tant que juriste, Maître Jousselin a, bien sûr, écrit de très nombreux articles dans les revues spécialisées.

Mais sait-on qu’il est aussi l’auteur d’une demi-douzaine de livres sur des sujets historiques ?
En effet, ce ne sont pas moins de six ouvrages qui sont répertoriés sous son nom dans la base de données de la Bibliothèque nationale de France, dont quatre biographies.

Son premier ouvrage, qui traite d’héraldique, est édité en 1972. Puis, plus rien n’est publié jusqu’en 1998.
C’est cette année-là que paraît aux éditions Christian un livre intitulé « Au couvert du Roi, XVIIe – XVIIIe siècles » : il s’agit d’une étude des charges des Officiers du Gobelet et de la Bouche du Roi, tant au Louvre qu’à Versailles…
Et voilà subitement l’austérité des publications juridiques qui s’efface devant l’évocation de la magnificence des tables royales !

C’est en étant arrivé à l’âge de la retraite professionnelle que Roland Jousselin se met à publier, selon un rythme de production impressionnant, ainsi qu’en témoignent les dates de dépôt légal : 1998, 2001, 2004, 2006, 2008.

Comment ne pas voir dans cette activité d’écriture la volonté d’un homme déjà mûr de transmettre, au soir de sa vie ?
Et comment ne pas voir dans ce souci de transmission une attention particulière portée à ses jeunes lecteurs, en particulier ses chers petits-enfants Tristan, Lucille, Guilhem, Marie-Pia et Jean-Gualbert.

Oui ! Derrière la rigueur du juriste se cache l’érudition de l’historien, laquelle dissimule l’affection d’un grand-père…

Tout le monde connaît sa culture générale. Mais Maître Roland Jousselin sait, en outre, révéler en privé sa sensibilité. Bien au delà d’une parfaite courtoisie formelle, il sait accorder sa confiance et son estime à ceux dont il a éprouvé la fiabilité.

Sous Louis XIV, les avocats aux conseils avaient le privilège de pouvoir plaider devant les différents Conseils du Roi. D’où leur devise contenant une allusion au Roi-Soleil : « Solis fas cernere solem » (« À eux seuls, l’heureux destin de faire face au soleil »).

Maître Jousselin vient de nous quitter ici-bas, mais le baptisé Roland est appelé à faire face désormais, non pas au soleil, mais à son Créateur.
Il le fera en adoptant l’attitude évoquée dans la belle prière des chevaliers du Saint-Sépulcre : « Humblement mais sans crainte ».

Les prières de tous ceux qui l’ont connu et aimé l’entourent à présent pour son ultime pèlerinage : celui qui doit le mener vers la Jérusalem céleste.

Roland est appelé à voir Dieu face à face.

Puisse la droiture de sa vie l’amener à la table du festin, à la droite de ce Dieu qu’il a toujours aimé et servi.

Oui ! Porté par nos prières, puisse-t-il s’asseoir à la seule Table Royale qui vaille : celle du Royaume des Cieux…