L'intégration heureuse - France Catholique
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Marie dans le plan de Dieu
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L’intégration heureuse

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Et si, au lieu de déplorer le verre à moitié vide, l’on parlait de l’intégration heureuse ? C’était l’objet de l’émission du 11 avril dernier, à l’avant-veille de la publication de Et tout ça devrait faire d’excellents Français (Seuil), préfacé par Jean-Louis Schlegel, le co-directeur de la rédaction de la revue Esprit. Au très touchant témoignage autobiographique de Naïma M’Faddel, née en 1960 à Casablanca, citoyenne française aujourd’hui maire-adjointe de Dreux, est joint son dialogue, un vrai, profond et respectueux dialogue, avec l’islamologue Olivier Roy. D’où il ressort qu’au lieu d’une politique de la ville, ciblant prioritairement les communes ou quartiers « sensibles », coupable d’avoir accentué les cloisonnements, c’est à une politique des territoires que devraient s’atteler les pouvoirs publics.

Grâce aux travaux du géographe Christophe Guilluy (La France périphérique) et de l’économiste Laurent Davezies (La crise qui vient), lesquels recoupent largement les analyses du philosophe Jean-Claude Michéa, sont désormais mises en lumière les populations parfois dites « invisibles », jusqu’à peu inaperçues des médias car rarement impliquées dans des actions violentes et spectaculaires  : non pas celles qui vivent au cœur de banlieues ou de « quartiers » susceptibles de prendre feu au premier incident, mais celles qui, parmi les territoires ruraux ou périurbains voient leur environnement social dépérir inexorablement jour après jour. Il est, en revanche, une population discrète qui, répugnant aux postures victimaires, illustre l’adage « Aide-toi, le ciel t’aidera » : cette classe moyenne issue de l’immigration maghrébine, de deuxième ou troisième génération, qui travaille patiemment et sans bruit à l’amélioration de ses conditions d’existence. Avec ou sans, il faut le souligner, le concours des pouvoirs publics !

Le premier à poser la pierre de cette ascension, c’est M. Abdallah M’Faddel, le père de Naïma (disparu en 1997), du jour où il partit seul de Casablanca pour prendre un poste de soudeur-tourneur dans une usine de Dreux. Quelques années s’écoulent avant que sa femme et ses enfants se retrouvent sous le même toit, dans une petite commune d’Eure-et-Loir puis à Dreux, à La Croix-Tiénac, dans l’appartement d’un grand ensemble tout juste sorti de terre. Gardée par une tante, Naïma ronge son frein pendant un an avant de gagner enfin la France, « Franca », et de rejoindre les siens.

Naïma M’Faddel reconstitue bien le changement de climat qui s’opérera au cours des années 70. L’insouciance de la première phase, où quelles que soient leurs origines, française, portugaise, espagnole, turque, toutes les familles voisines s’entraident, va se dissiper, et laisser cours à un « entre-soi » qu’accélèrent à la fois l’autorisation du regroupement familial et l’accès à la propriété des plus anciens habitants. C’est la fin de « la mixité sociale naturelle », lorsque Naïma comptait parmi ses amies la fille du médecin et de l’infirmière, et encore la Portugaise Maria, la Française Élisabeth. « Nous ne parlons l’arabe marocain qu’à la maison et uniquement avec nos parents. Entre enfants, c’est toujours le français qui est spontanément utilisé ».

Naïma ne s’est pas sentie tenue de privilégier un lien pour s’autoriser à en sacrifier un autre. Fidèle à la culture et piété de ses parents et aïeux, curieuse et respectueuse des diverses coutumes (à table, notamment !) de son pays d’adoption. Chez Naïma qui, très tôt a mis au plus haut la valeur du savoir et l’utilité du « Cercle laïque », la fibre française vibre au diapason de la fibre marocaine, sans que la tonalité de l’une ternisse la tonalité de l’autre. à l’exemple de sa mère, à qui, redoutant sa réaction, elle vient d’avouer une visite à l’église Saint-Pierre de Dreux, et qui la rassure : « Bayt Allah ! L’église est comme une mosquée, c’est la maison de Dieu et nous n’avons qu’un Dieu, que nous soyons massihii, yehoudi ou muslim (chrétien, juif ou musulman).  »

Le climat a changé dans les années 80. Départ des Français « de souche » ou Européens, séparatisme social et culturel. « Les premiers à déserter sont les classes moyennes : aux enseignants, fonctionnaires, à l’infirmière… succèdent des familles françaises plus modestes. Puis la majorité des foyers composés d’ouvriers ou d’employés leur emboîte le pas. à cette époque, être ouvrier n’excluait pas d’accéder à la propriété. De plus, souvent, il y avait de l’entraide et des organisations comme Les Castors permettaient l’auto-construction. »

Naïma M’Faddel déplore les discours qui visent à « fragmenter notre pays ». Elle milite pour une « unité dans la nation », contre une juxtaposition des communautés. Elle est une formidable compatriote, et concitoyenne ! ■