Comme chaque année à la même époque, les quêteurs de l’Ordre de Malte et de la Fondation Raoul-Follereau seront de sortie à l’occasion de la Journée mondiale des lépreux. C’est en 1953 qu’est née l’idée d’une journée de prière pour les lépreux, au cours d’une conversation entre l’abbé Balez et Raoul Follereau. Sous l’impulsion de Raoul Follereau, dès 1954, l’Onu crée la Journée mondiale des lépreux (JML) qui prendra de l’ampleur dans le monde entier grâce à l’infatigable volonté de son fondateur. En 1961, 116 pays y participent. Il s’agit, selon l’expression de Raoul Follereau, de « guérir les bien-portants ».
En effet, la lèpre, maladie qui touche les pays pauvres est aussi une maladie de l’exclusion. Et si elle nous semble, en Europe, une maladie d’hier, elle sévit toujours bel et bien aujourd’hui. Et elle exclut toujours, même si elle n’est que faiblement contagieuse. Tout comme en Europe lorsqu’elle sévissait (elle a pour ainsi dire disparu au XVIe siècle, probablement par le développement de résistances à la maladie, cf. France Catholique n° 3477), les lépreux sont mis à part. Ils ont alors tendance à cacher leur maladie comme en témoigne un ancien malade de la lèpre aujourd’hui guéri grâce à l’action de la Fondation Raoul-Follereau au Bénin, qui a découvert tard que sa mère était elle-même lépreuse et prenait ses médicaments en cachette. Le docteur Roch Christian Johnson, conseiller médical de la Fondation et récemment nommé président de l’Association internationale contre la lèpre (ILA) rapporte aussi le cas d’un chef de village qui ne voulait absolument pas qu’on apprenne qu’il était touché par cette maladie et qu’ils ont dû soigner en cachette. L’exclusion est renforcée quand la maladie atteint le stade de lésions invalidantes irréversibles qui sont particulièrement handicapantes dans des sociétés où on a bien souvent besoin de tous ses membres pour travailler.
Si le nombre de nouveaux cas par an n’augmente pas il ne diminue plus depuis une dizaine d’années (environ 200 000 cas par an). C’est une maladie qui ne fait pas souffrir directement le malade et dont l’incubation est très lente. Elle peut rester présente durant dix ans dans l’organisme humain sans signe clinique apparent, période durant laquelle la personne infectée est contagieuse. Une difficulté réside également dans le dépistage, la formation du personnel médical et l’éloignement des malades des centres de dépistage et de soins. À chaque campagne de dépistage intensif, de nouveaux cas sont découverts. Vingt mille nouveaux cas de lèpre par an diagnostiqués sur des enfants montrent que la transmission a toujours lieu. Une piste de recherche est la transmission par des animaux après la mise en évidence, il y a cinq ans, de la transmission de la lèpre par le tatou. Depuis, on a découvert que l’écureuil roux pouvait en être porteur et des recherches sont menées pour déterminer si des animaux largement consommés au Mexique et au Bénin peuvent être porteurs et transmetteurs de la lèpre.
Autre front de bataille, les soins. La lèpre se soigne à l’aide d’une polychimiothérapie, combinaison de trois antibiotiques pris conjointement, mais le traitement est lourd et dure de six mois à un an. Il nécessite de se trouver à proximité d’un centre de soins. Si la lèpre est présente depuis un certain temps et a provoqué des lésions, celles-ci peuvent nécessiter des soins importants également et parfois une prise en charge qui peut être permanente. De plus, certains malades ont développé des résistances à un antibiotique. Des tests sont actuellement menés avec un anti-tuberculeux (la tuberculose est une maladie « cousine » de la lèpre) qui pourrait réduire le traitement à deux mois et résoudre les problèmes de résistance.
C’est pourquoi, à l’heure où l’OMS a lancé « la stratégie mondiale contre la lèpre 2016-2020 », la Fondation Raoul-Follereau nous propose à nous aussi de « regarder la lèpre en face ».
Pour aller plus loin :
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