Acteur de premier plan, Michael Lonsdale a eu, depuis les années 50, une carrière exemplaire au service d’un théâtre souvent d’avant-garde à Paris, ce qui lui a permis d’avoir des liens forts avec les grands auteurs de notre temps : Becket, Duras, Ionesco, Anouilh… Au cinéma, il a accepté une variété inouïe de rôles dans des films français ou anglo-saxons. Il est aussi un metteur en scène de théâtre à succès et encore un peintre exigeant qui expose de temps à autre. Le ton de sa voix est inimitable et il s’est laissé recruter pour d’innombrables lectures publiques ou enregistrées ou « voix off », pour des entreprises culturelles ou… spirituelles…
Car, baptisé à l’âge de 22 ans en 1953 dans l’Église catholique, Michael Lonsdale, qui a vécu de près le phénomène du Renouveau charismatique dans les années 70 et 80, est, pour beaucoup, un repère dans la foi. Peut-être encore plus depuis qu’il a interprété Frère Luc, l’un des martyrs de Tibhirine, dans le film de Xavier Beauvois, Des Hommes et des Dieux. Ce n’est pas un Père de l’Église pour autant et il fait parfois preuve d’une indépendance qui frise l’originalité. Peut-être la dissidence ? C’est justement ce qui le rend accessible. On lui demande le secret de sa sérénité face aux épreuves de la vie ou bien comment il fait pour prier…
Mais comme Michael Lonsdale est d’un caractère réservé et qu’on ne peut pas répondre à toutes les sollicitations, même s’il n’a pas été avare de sa présence en de nombreuses rencontres, il a fini par répondre dans des livres, d’abord à base d’entretiens, puis dans des œuvres plus personnelles. C’est, dit-il, une chose qu’il n’avait pas imaginée : que ses livres suscitent autant de réactions, fassent visiblement autant de bien. Il vient donc de se remettre à l’ouvrage et, sous un beau titre 1 figure un sous-titre – Petit traité d’espérance – qui laisse percevoir la volonté, le grand âge venu, de transmettre une sagesse, peut-être une méthode.
Bien sûr, de méthode, il n’y a pas vraiment. Car la vie de Michael Lonsdale est unique, étonnante. Tout le monde ne peut pas, par exemple, descendre à la fois du duc de Morny et de Talleyrand « par la cuisse gauche ». Mais il y a une manière d’accepter ce que la vie nous propose valable pour tout homme en quête du bonheur. Chacun pourra tirer profit pour lui-même de cette suite de souvenirs très personnels, d’hommages à certains de ceux qui ont donné à Michael Lonsdale sa chance de devenir ce qu’il est, tous ceux qui l’ont « guidé vers l’amour ». Par exemple le fameux père Régamay, son père spirituel, dominicain promoteur du renouveau de l’art religieux en France. Mais aussi les autres, à qui il a fini par savoir pardonner…
Ceux qui suivent l’artiste depuis longtemps ont déjà entendu la plupart des anecdotes ici rapportées et même les réflexions plus théoriques et infiniment intelligentes sur son art. Mais cet essai de 160 pages n’est pas de trop, car l’auteur a trouvé un rythme d’écriture très séduisant. On reconnaît le peintre qui dépose les couleurs par petites touches. Qu’on soit convaincu ou non des idées exprimées, on ne peut pas rester insensible à ce style allègre qui pulvérise la morosité au fur et à mesure de la lecture. Cerise sur le gâteau, le court et dernier chapitre « Petites confidences sur ma prière », qui justifierait presque tout l’essai et, en tout cas, l’illustre magnifiquement.
THÉÂTRE DE L’ALLEGRIA 26/11/2016 au Plessis-Robinson
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