Le 16 mars 2012, Lucie Taurines s’envolait pour une mission de deux ans aux Philippines. Envoyée par l’association de coopération de la communauté de l’Emmanuel, Fidesco. À la suite d’une session d’envoi avec 36 autres volontaires à Paray-le-Monial et à quelques jours de son départ, elle nous avait confié son « bouillonnement intérieur » (cf. France Catholique n°3302) mais aussi qu’elle se sentait désormais totalement prête à répondre à l’appel de la mission (les volontaires Fidesco ne savent pas d’avance pas où ils vont, dans une démarche d’abandon, de don de soi et de gratuité). Une mission dans laquelle elle avait choisi de s’engager, animée par « une quête de sens », pour quitter sa vie de commerciale, « une vie autocentrée », et pour retrouver les valeurs de son éducation catholique.
C’est donc pour l’association LP4Y (Life Project for Youth) qu’elle est partie, donner de son temps et de sa joie de vivre au service des plus pauvres dans une mission qui engage toute sa personne en vivant auprès de jeunes (et de leurs familles) confrontés à toutes les difficultés liées à l’extrême pauvreté. Elle en avait encore témoigné pour nous après deux ans passés là-bas, au moment où elle s’apprêtait à prolonger sa mission pour une année supplémentaire (cf. France Catholique n°3404).
Elle aura, durant son séjour, effectué diverses missions, toujours à destinations de ces jeunes de 17 à 24 ans issus des bidonvilles, des mères célibataires, des orphelins, des jeunes aux parcours incroyables, avec beaucoup de force et de volonté mais aussi des blessures, des cicatrices qui parfois leur collent à la peau, des jeunes « marqués à vie ».
Marqués à vie c’est le titre du livre qu’elle a publié à son retour de mission, après plus de trois ans passés là-bas, dont les profits des ventes seront reversés à l’association qui n’a pas quitté son cœur. Car elle aussi a bien été marquée à vie par ces années riches et forcément vécues intensément qui l’ont fait évoluer, ont changé son regard. Au contact d’abord de bénévoles aux parcours divers et aux profils atypiques, qu’elle a appris à estimer et à apprécier même lorsqu’ils étaient bien différents d’elle et qu’elle n’aurait probablement jamais fréquentés dans un autre contexte.
Marquée également par un pays dont le sourire des habitants la marquera dès le jour de son arrivée, « un champ magnétique de joie de vivre » qui l’enveloppe et ce malgré les difficultés de la vie locale, ne serait-ce que le climat, très chaud et humide, caractérisé par des typhons réguliers et bien sûr les difficultés liées à la grande pauvreté d’une partie importante de la population. Elle a enfin été marquée par ces jeunes, si touchants, au service desquels elle s’est mise.
Le récit de son cheminement sur ces trois années, évidemment plein d’ellipses (sans rester sur notre faim on en redemanderait parfois encore) et de ses différentes missions est entrecoupé de l’histoire de la vie de quelques jeunes qu’elle a côtoyés. Des confidences sur des souvenirs traumatisants, dont le récit est parfois difficilement soutenable, qu’elle a obtenues par sa proximité avec les jeunes et grâce à la confiance qu’elle a gagné par un engagement constant, dans un rôle difficile où il faut savoir être compréhensif mais aussi ferme et plein d’autorité avec des jeunes rompus à l’existence dans la rue et aux techniques qu’elle nécessite parfois pour y survivre.
Si cette mission et ces rencontres ont changé sa vie, l’action des volontaires sur le terrain et l’implication des jeunes dans les programmes développés par l’association change aussi la vie de nombre d’entre eux. Quand est venu le temps de rentrer en France pour retrouver les siens, c’est de cela que Lucie Taurines a voulu témoigner.
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Lucie Taurines, Marqués à vie. Sortir de l’exclusion, Youth 4 Change Network, Éditions Emmanuel, 200 p., 5 €.
