FAUT-IL CONCILIER TOUT CELA AVEC LA BIBLE ? - France Catholique
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Marie dans le plan de Dieu
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FAUT-IL CONCILIER TOUT CELA AVEC LA BIBLE ?

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Précisons quelques faits montrant l’étrangeté de l’homme de Néandertal (HSN) et de sa destinée. Nous avons vu dans l’article précédent ce qui marque la distance entre cet homme et nous : il avait un cerveau différent1. D’où une première question : quelle est l’origine de cette différence ? 1. Quand on classe les crânes HSN selon leur âge, on constate que « les Néandertaliens ont vu leurs caractères particuliers s’accentuer au fur et à mesure que le temps passait. Les squelettes les plus récents sont plus néandertaloïdes que les squelettes exhumés de sédiments plus anciens qui se rapprochent davantage du type Homo sapiens. » 2. « Plus l’enfant est jeune, moins sont marqués ses caractères néandertaliens. » (Grassé, p. 355)2. Ce qui frappe particulièrement, c’est « la capacité endocranienne précocement grande (ibid.) ; c’est ainsi que le petit Néandertalien de Tashik Tash, dans l’Uzbekistan. possède à l’âge de 8–9 ans un volume cérébral de 1 490 centimètres cubes, donc supérieur de plus de cent grammes à notre moyenne adulte actuelle et de plus de trois cents grammes à la moyenne des enfants de neuf ans actuels3. Grassé met justement en garde contre « la valse des généalogies » (p. 84) à laquelle on pourrait se laisser entraîner à partir de tels faits (son avertissement vaut pour toute l’ascendance humaine). Pour l’instant, il est impossible de remonter le temps en suivant la trace d’HSN jusqu’à sa source, c’est-à-dire jusqu’à l’époque où se fit la divergence entre lui et nous. Tout au plus peut-on dire que les plus anciens HSN découverts jusqu’ici remontent à au moins 100 000 ans et qu’à cette date les caractères de l’homme moderne sont aussi déjà visibles sur une autre lignée appelée parfois « praesapiens » : visibles, comme des indices certains, mais non pas développés comme ils le sont maintenant. La séparation est donc antérieure : il y a plus de 100 000 ans, les deux lignées coexistaient déjà en évoluant vers deux formes de plus en plus différentes : Néandertal et nous4. Ce qui est très intéressant si l’on veut réfléchir aux mécanismes (inconnus) de l’évolution : deux espèces « presque humaines » ont évolué séparément vers un niveau final où toutes deux ont consciemment médité sur le mystère de la mort et inventé des formes d’art (rappelons, une fois de plus, ce que j’appelle ici « évolution » : c’est seulement l’ordre chronologique d’apparition des êtres, ce n’est en aucune façon quelque explication que ce soit). L’effet de l’héritage instinctif La précocité de l’enfant néandertalien doit plus encore attirer notre attention. Je ne peux ici que donner une idée des réflexions des paléontologistes. La longueur de l’enfance mesure celle de la dépendance. En outre, l’âge de la reproduction ne survient que lorsque l’enfance est finie. Plus longue elle est et plus longtemps l’enfant reste en état d’acculturation par les parents et par l’environnement social. Plus courte, et moins l’enfant a pu apprendre au moment où, devenu adulte, il commence à se reproduire5. L’enfant néandertalien arrivait plus tôt que les nôtres à cet âge où, ayant appris des autres, on commence à transmettre ce qu’on sait à la génération suivante. Il semble donc clair que plus l’enfance est brève et moins se transmet l’expérience acquise par l’adulte. Plus tôt l’enfant « se débrouille tout seul » et plus lente est l’évolution culturelle, cumulative. Cette dernière remarque doit éloigner de la pensée tout rapprochement imprudent avec l’époque actuelle. Il s’agit, en effet, de bien autre chose, l’évolution actuelle n’étant que culturelle. Il est probable que si la machine à remonter le temps de Wells nous permettait de rencontrer une bande de galopins néandertaliens, nous subirions le plus grand choc de notre vie. Nous serions stupéfaits, peut-être effrayés, de leur « intelligence ». Car, si leur enfance était plus brève, cela signifie qu’ils avaient moins à apprendre, et donc probablement (comme je le disais dans le précédent article) qu’ils recevaient davantage par voie d’hérédité. HSN, adulte, devait moins que nous à son éducation et plus à ses instincts. De là encore, par une autre voie, l’on peut supputer que si l’homme de Néandertal n’a pas survécu, c’est par l’effet d’un héritage instinctif plus riche, avantage au début de la vie, mais obstacle ensuite aux variations et adaptations culturelles rapides. L’adaptabilité culturelle multiplie, en outre, ses effets, ce qui certainement explique les progrès explosifs et ininterrompus qui, au cours des 30 000 dernières années, si brèves dans l’histoire complète de notre espèce, nous ont conduits des cavernes à la conquête de la Lune. Où l’on ne peut dire « espèce » Il y aurait beaucoup à dire encore sur HSN, mais ne considérons qu’une dernière question : peut-on dire qu’il y a eu dans la préhistoire deux espèces humaines différentes ? HSN réfute-t-il la thèse de l’unité de l’espèce humaine ? Le lecteur aura, je pense, remarqué que je n’ai en aucune façon appelé l’Homme de Néandertal une espèce. Et comment le pourrais-je ? L’espèce délimite la possibilité de fécondation. L’espèce humaine actuelle est bien une, car il y a interfécondité entre tous ses membres. Les races actuelles, autant que races il y a, peuvent se métisser à mesure que le temps passe. Il est trop tard pour observer des métissages HSN–HSS. Certes, HSN était très différent de nous, plus encore par son psychisme que par son corps. Mais quelques paléontologistes disent qu’en réalité sa disparition n’a été qu’une fusion au sein de notre lignée, plus nombreuse. Si nous n’en gardons aucune trace, c’est que notre génotype serait faite d’une alouette HSN et d’un cheval HSS6. Comme argument, ces savants apportent plusieurs fossiles « sapiens » découverts en Palestine et montrant des caractères néandertaloïdes. Un argument moins connu est proposé par un anthropologue médecin, le docteur Vassal, qui dit avoir observé parmi ses clients (tous parisiens) plusieurs spécimens de dents typiquement néandertaloïdes. Cependant, l’hypothèse de l’extinction reste plus probable. Le professeur Grassé appelle HSN une sous-espèce d’HS, mais très particulière. HSS (c’est-à-dire nous) serait une autre sous-espèce. C’est l’opinion désormais généralement admise7. Laissons les baleines aux savants Mais, me demande-t-on, comment conciliez-vous tout cela avec la Bible ? À la vérité, je ne vois pas ce qu’il faut « concilier ». Si les faux savants de jadis s’étaient abstenus de chercher dans la Bible ce qu’ils n’étaient pas capables de trouver par les voies de la science, la Révélation ne resterait pas chez tant d’esprits inquiets obscurcie par la fausse science d’un autre âge8. Un de mes livres préférés dans la Bible, je veux dire un de ceux qui m’apprennent le plus à chaque relecture, est le Livre de Jonas. La prière de Jonas dans le ventre de la baleine me console et m’éclaire dans ce monde de ténèbres. Mais faudra-t-il encore, après avoir reçu cette lumière, la seule qui éclaire notre âme, que je me creuse la cervelle sur la très spéciale anatomie de la baleine biblique ? Que je sache et dise, livre en main, si cette baleine était un cachalot ? Ou bien plutôt une de ces très grosses sardines si encombrantes parfois sur les bords de la Méditerranée ? Pitié ! Laissons les baleines aux baleiniers et aux savants. Et lisons la Bible en essayant de comprendre la Bible. Aimé MICHEL Chronique n° 351 parue dans F.C. N° 1832 – 22 janvier 1982 [|Capture_d_e_cran_2014-11-10_a_12-28-10.png|]
Notes de Jean-Pierre ROSPARS du 20 juin 2016

 

  1. C’est le sujet de la chronique n° 350, Néandertal ou la fin d’un robuste gaillard – Sciences : le récit de la Genèse 4 – La libération des instincts, mise en ligne il y a deux semaines. Sur les variations d’orthographe (Neandertal ou Neanderthal) voir la note 1 de cette chronique. Pour la présente chronique, j’ai conservé le sous-titre originel « Les énigmes de l’homme de Néandertal » mais ajouté la question « L’espèce humaine est-elle unique ? » qui en résume le thème et signale sa connexion avec le récit de la Genèse. Aimé Michel avait, semble-t-il, accompagné le présent texte d’au moins une note de bas de page et peut-être de trois (car l’unique renvoi était numéroté 3) mais elles ont été perdues à l’impression. J’ai donc retiré l’unique renvoi qui était à la fin de la première phrase du dernier paragraphe de la section « L’effet de l’héritage instinctif », donc en rapport avec la moindre adaptabilité culturelle des Néandertaliens.
  2. Sur le grand zoologiste Pierre-Paul Grassé voir la note 1 de la chronique n° 268, Lyssenko est toujours vivant – À propos d’un livre de Pierre-Paul Grassé (08.06.2015). Le livre de Grassé auquel Aimé Michel renvoie est très probablement son Précis de Zoologie des vertébrés. Reproduction, biologie, évolution et systématique, vol. II et III, Masson, Paris, 1977.
  3. Effectivement, les traits néandertaliens sont moins marqués chez les jeunes ; notamment, leur crâne est arrondi au lieu d’avoir la forme de bombe des adultes. « [L]e jeune enfant néanderthalien devait donc ressembler au jeune Homo sapiens. Puis, en grandissant, il s’en éloigne avec l’apparition des traits typiquement néanderthaliens comme les forts reliefs sur l’arrière-crâne, le développement du bourrelet sus-orbitaire et la projection du massif facial inférieur en relation avec la mise en place des dents permanentes (à partir de six ans). » (Mylène Pathou-Mathis, Neanderthal. Une autre humanité, coll. Tempus n° 239, Perrin, Paris, 2006, p. 60). La grotte de Teshik-Tash, mentionnée par Aimé Michel, située près de la frontière afghane à 1500 m d’altitude, est le site le plus oriental où l’on ait découvert des fossiles de Néanderthaliens. Elle a été fouillée en 1938 et 1939. Son remplissage sédimentaire de 1,50 m d’épaisseur, formé de cinq couches archéologiques séparées par des strates argileuses stériles, est daté de 44 000 ± 1 000 ans BP (avant le présent). La couche la plus riche contenait trois foyers et de nombreux outils de type Moustérien. C’est dans la couche stérile juste en-dessous qu’on a découvert la sépulture, apparemment bouleversée par un carnivore, de l’enfant néanderthalien.
  4. Dans un schéma de son livre Quand d’autres hommes peuplaient la Terre (avec Bernard Seytre, Flammarion, Paris, 2008, p. 225) Jean-Jacques Hublin montre qu’« il y a 500 000 ans l’ancêtre commun de l’homme de Néandertal et de l’Homo sapiens coexistait avec les Homo erectus asiatiques. Il y a 30 000 ans, l’Homme de Néandertal et l’Homme moderne coexistaient encore, peut-être également avec l’Homme de Flores. » Le plus ancien représentant de la lignée néandertalienne (crâne de Ceprano en Italie) daterait de 700 000 ans, mais certains paléoanthropologues y voient un Homo erectus, d’autres une nouvelle espèce. Dans ce cas, les premiers pré-Néandertaliens dateraient de 500 000 ans ; le crâne de Petralona et ceux de la Caune de l’Arago, dont nous avons déjà parlé (dans les chroniques n° 284, Les origines de l’homme ou des légendes qui s’écroulent – L’évolution buissonnante des Primates depuis 75 millions d’années, 13.07.2015 et n° 288, Le jardin de la genèse a existé – À propos d’un livre « téméraire et génial » de Jean-Jacques Walter, 27.07.2015), en sont des représentants. Les principaux caractères néandertaliens sont acquis vers 350 000-250 000 ans (période interglaciaire de Mindel-Riss) mais l’architecture crânienne définitive seulement vers 130 000-120 000 ans (dernière période interglaciaire Riss-Würm). On parle alors de Néandertaliens classiques et on les trouve dans plus de 80 sites en Europe. Leur émergence est donc le résultat d’un très long processus d’évolution qui s’étend sur au moins 400 000 ans et qui s’est entièrement déroulé en Europe. Cependant, à ce jour, il n’y a pas encore d’accord entre les chercheurs sur l’origine exacte de l’homme de Néandertal et de l’homme moderne. Deux théories s’affrontent. Selon la première, majoritaire, dite monocentriste ou « Out of Africa », ou du « Jardin d’Eden » ou encore de « l’Arche de Noé », il n’y a que deux lignées : celle des Homo erectus d’Afrique qui sont à l’origine de l’homme moderne et celle des H. erectus d’Europe qui sont à l’origine des Néandertaliens. Au contraire, selon la seconde, dite polycentriste ou multirégionale ou du « candélabre », les hommes actuels proviendraient d’évolutions séparées des H. erectus dans les différentes régions (Afrique, Europe, Asie, Indonésie-Australie).
  5. Mylène Patou-Mathis du Muséum national d’histoire naturelle confirme que le jeune Neandertal était adulte à quinze ans (op. cit., p. 61) ; il en résulte « deux conséquences majeures, ils sont résistants plus tôt (ce qui permet de lutter contre une mortalité précoce) et ont une période d’apprentissage, sociétale et comportementale, moins longue ». Toutefois, « [t]ous les chercheurs ne sont pas d’accord avec cette hypothèse de croissance rapide car il est difficile d’estimer l’âge d’individus fossiles. » (p. 62)
  6. C’est exactement ce que confirment les récentes études génomiques, notamment du généticien suédois Svante Pääbo et ses collègues du département de Génétique de l’Institut Max-Planck d’anthropologie évolutionniste de Leipzig. Grâce au recueil et à l’analyse de l’ADN de Néandertaliens, on a pu montrer qu’il y avait bien eu des croisements entre ces derniers et les hommes modernes. Voir la note 4 de la chronique n° 333, Avant d’être des hommes qui étions-nous ? – Ou comment la science progresse par de longs débats contradictoires (28.03.2016). D’après ces travaux, la séparation de ces deux lignées a probablement eu lieu entre 600 000 et 500 000 ans. Comme quoi, contrairement à ce que pensait Aimé Michel il y a une trentaine d’années, il n’est pas encore trop tard pour observer des métissages HSN–HSS !
  7. L’attribution des fossiles (voire même de spécimens actuels) à telle espèce ou sous-espèce n’est pas un problème facile à résoudre. Aussi a-t-on longtemps débattu si les Neandertaliens devaient être considérés comme une espèce à part entière (Homo neandertalensis) ou une sous-espèce de notre propre espèce (Homo sapiens neandertalensis), solution à laquelle P.-P. Grassé s’était rallié, d’où les abréviations HSN et HSS utilisées par Aimé Michel dans cette chronique. Par la suite, des études anatomiques plus précises, notamment de la région nasale du crâne, ont conduit à considérer que les deux Homo appartenaient à des espèces différentes (http://www.pasthorizonspr.com/index.php/archives/11/2014/research-supports-neanderthals-as-a-separate-species). Il y a dix ans, Mylène Pathou-Mathis écrivait : « Neandertal nous ressemble, c’est indéniable. Pourtant il diffère de nous sur bien des aspects, morphologiquement et peut-être génétiquement (Homo neanderthalensis et non Homo sapiens neanderthalensis). Si cette hypothèse est confirmée, Neandertal, étant une espèce différente de la nôtre, ne pouvait pas avoir de relations interfécondes avec l’homme moderne, Homo sapiens » (op.cit., p. 247-248). Or, les travaux récents sur l’ADN d’hommes fossiles indiquent, semble-t-il, qu’il y a eu un métissage récent entre sapiens et Neandertal. En note 4 de la chronique n° 333, Avant d’être des hommes qui étions-nous ? – Ou comment la science progresse par de longs débats contradictoires (28.03.2016), j’ai résumé les conclusions de plusieurs études récentes (2008-2016) montrant un métissage il y a moins de 90 000 ans et non d’un lointain ancêtre africain il y a plus de 500 000 ans. Une autre étude récente va dans le même sens (Seguin-Orlando et al., « Genomic structure in Europeans dating back at least 36,200 years », Science, 346, 1113-1118, 2014). En se fondant sur l’analyse du génome d’un des plus vieux fossiles d’homme moderne trouvé en Europe, à Kostenki (Russie) en 1954, récemment daté de 37 500 ± 1 250 ans BP, cette étude montre qu’il contient plus d’ADN de Neandertal, présent en plus longues séquences, que les Européens actuels. Selon cette étude, ce métissage a eu lieu il y a environ 50 000 ans, c’est-à-dire à l’époque de l’arrivée des premiers H. sapiens en Europe. Par ailleurs, on a remarqué que l’ADN des mitochondries, qui est indépendant de l’ADN du noyau des cellules, contrairement à ce dernier, ne montre pas de trace de métissage. Comme les mitochondries sont transmises uniquement par les mères (le spermatozoïde n’en transmet pas à l’ovule) on en a déduit que le croisement d’une femme Neandertal avec un homme moderne était infécond ou produisait une descendance stérile et que seul le croisement inverse (homme de Neandertal avec femme moderne) était fécond. Malgré tout, cette interfécondité au moins partielle n’a pas conduit à rejeter formellement l’idée que les Néandertaliens forment une espèce différente. Sans doute parce qu’il s’agit de déterminer le pourcentage de divergence génétique au-delà duquel on passe de la sous-espèce à l’espèce. C’est peut-être faute de résultats assurés sur ce point que les articles les plus récents n’utilisent pas la nomenclature scientifique, Homo neandertalensis et Homo sapiens, mais se contentent des noms vernaculaires, Neandertalien et homme moderne.
  8. C’est une leçon constante d’Aimé Michel : les tentatives de conciliation (que l’on appelle aussi concordisme) des enseignements de la Bible et des enseignements de la science sont un piège dans lequel il ne faut pas tomber. L’une des dernières chroniques à traiter ce sujet est la n° 319, Un petit caillou sur la berge : qui peut scruter au télescope le mystère divin ? – Une pensée scientifique libérée du concordisme, du dogmatisme et de l’athéisme, 16.02.2015. Le caractère limité de la révélation biblique est également discuté sous un tout autre angle dans la chronique n° 296, L’espace silencieux – Les questions que pose l’absence de visiteurs extraterrestres, 14.03.2016.