23 novembre, 23 h 30 – Je viens de suivre la longue émission consacrée au bien-être des animaux que l’époque maltraite avec une vigoureuse et infâme inconscience – j’approuve naturellement l’indignation de Franz Olivier Giesbert, quoique ses opinions, par moment fort bien venues, atteignent parfois des sommets de crânerie stupide – ce qui m’oblige, quoique l’heure soit bien avancée, à réagir sur le champ. C’est pourquoi, j’assiste au débat où se trouvent réunis des antagonistes peu décidés à s’entendre : deux végétariens et des défenseurs de l’économie dont les animaux sont la « matière première ».
Je commence par citer F.O.G. : « Les animaux sont intelligents », « Les animaux sont proches de l’homme », « Les animaux sont comme l’homme », « Les animaux sont des hommes comme nous » : cette sorte de matérialisme touche au plus profond du ridicule mais aussi de la provocation.
Nul ne conteste aujourd’hui, si toutefois l’on accepte de comprendre que cette intelligence animale est bornée par des limites rapidement atteintes, même si l’on reste parfois admiratif de certaines prouesses réalisées par des perroquets et des singes, aussi des chiens, des chats ou des mainates… Le chimpanzé énonçant la théorie de la Relativité avec son cortège de calculs, d’explications et de fractions etc. est encore à des années lumières de l’intelligence telle qu’elle s’exerce chez les êtres humains : on pourrait par exemple distinguer entre divers types d’intelligences, soigneusement cataloguées et explicitées, soit l’intelligence pratique, qui nomme la capacité d’agir de manière adaptée aux situations ; l’intelligence transcendantale dont l’imagination est l’une des voies productrices à partir notamment de l’expérience qui n’offre d’intérêt qu’en fonction de la capacité de réfléchir par exemple aux moyens de se sortir d’un mauvais pas, de choisir le meilleur outil possible, d’aboutir à la solution d’un problème qui pourrait être vital… tout cela permettant d’aboutir à ce que l’on nomme intelligence conceptuelle, laquelle se sert d’outils complexes telles la logique, la spatialité et l’abstraction. Ce qui sépare l’humain de l’animal tient à ces diverses capacités que sont le raisonnement, la pensée logique aboutissant au questionnement comme à la déduction scientifique, à la systématisation philosophique, à la création poétique et artistique, sans oublier le sommet du tout, l’ouverture aux aspirations spirituelles et à l’écoute comme à la perception de l’action de l’Esprit.
Là-dessus j’assiste à cette discussion annoncée que j’ai quittée assez rapidement parce que les « tonalités » vocales commençaient à monter à des degrés excessifs… Et qu’ai-je entendu de la bouche de Frédéric Caron, l’inamovible provocateur de l’émission On n’est pas couché ? Que « l’être humain n’est qu’un animal comme les autres ». « Ni plus ni moins ! »
Profession de foie athée qui ne ménage aucun espace de doute : chacun se retrouve à la fois vivant et cadavre. Seulement cela. Les merveilles de l’esprit humain que je viens d’énoncer – il en resterait bien d’autres à citer ici – ne sont probablement dues qu’à l’étonnant hasard qui survient toujours pour prêter main forte à ces négativistes de l’être dont le visage virtuel n’est que visage de la Mort.
Dominique Daguet