L’information m’est parvenue fin mai de mon ami et collègue Austin Ruse : La Maison Blanche met au point une politique qui contraindrait les organismes charitables et humanitaires à accepter les candidatures de personnes « LGBT » [Lesbiennes, Gay, Bi- et Trans-sexuels] pour bénéficier de subventions gouvernementales, même si ces organismes ont des objections à caractère religieux. Ce serait une nouvelle étape après la directive de Juillet dernier interdisant aux Entreprises adjudicataires de contrats fédéraux de pratiquer une discrimination à l’embauche sur la base de « l’orientation sexuelle » ou de « l’identité de genre ».
Comme le remarquait Austin, « les organismes à caractère religieux luttaient déjà contre cette directive,» et la nouvelle étape montre un caractère plus agressif, étant encore plus nette dans son but et ses intentions. Remontons en 2012 : les observateurs politiques chevronnés s’étonnaient que l’Administration Obama souhaite engager un conflit avec l’Église Catholique et la piéger sur son attitude anti-féministe. Mais c’est désormais bien pire. Il s’agit pour le moins du début de la partie finale engagée pour exclure du domaine public les vrais Chrétiens et les Juifs orthodoxes.
On commence par énoncer la légitimité claire et ifféfutable de l’avortement et de la libération des mœurs sexuelles au-delà des lois naturelles et des restrictions morales. Ceux qui réfutent cette légitimité, par leurs paroles ou leurs actes, sont fautifs, et, selon la « logique morale », le « bon droit » doit être promu et les « fautifs » doivent être dénoncés et poursuivis.
Et, pour mettre les points sur les « i », il ne faut accorder aucun refuge aux affreux qui voudraient échapper aux reproches publics. La loi et notre règle politique ne sauraient leur accorder le moindre murmure d’approbation. Et, en définitive, il faut faire honte aux gens respectables qui exprimeraient de telles opinions en public.
À nouveau nous assistons à cet étrange mais prévisible renversement. Les gens qui réfutaient a priori tout droit à porter des jugements moraux sur autrui tournent leur veste et font gronder le tonnerre d’une impérieuse logique catégorique sous-jacente. Mais il est maintenant question de promouvoir leur propre doctrine indéfendable.
Ainsi donc ils exigent que leur vérité morale soit la règle, respectée « même si le ciel nous tombe sur la tête » — quelles qu’en soient le conséquences. Accepteraient-ils que les organismes charitables catholiques cessent leur travail remarquable en refusant de confier des petits à l’adoption par des couples homosexuels ? Faudrait-il que ces organismes de bienfaisance renoncent à sauver des vies menacées par des inondations, des famines, des séismes de par le monde ?
Oui, car cette œuvre immense irait, insupportable pour eux, à l’encontre de leurs principes,
L’objet de ces organismes humanitaires pourrait être fortement handicapé si le gouvernement lui-même réfutait les services rendus par ces organismes privés religieux. Mais la question de savoir si ces organismes pourraient survivre sans ces subventions du gouvernement fédéral (ils le pourraient vraisemblablement) n’est pas là. Il n’est pas non plus question de savoir si ces organismes religieux ont « droit » à de tels subsides.
Si le gouvernement fédéral n’était pas fortement impliqué dans l’aide à l’étranger par des missions de sauvetage dans le monde, nul ne prétendrait à un « droit » d’exercer de telles missions avec des aides gouvernementales. Mais alors que les programmes sont lancés on peut à juste titre poser sérieusement la question tant morale que constitutionnelle sur l’éviction des organismes religieux.
Rappel d’une affaire en 1993 : le jeune James Zobrest, atteint de surdité, bénéficia d’un interprète dans son école publique. L’aide lui était accordée selon les lois des USA et de l’État d’Arizona. Mais on la lui refusa quand sa famille l’inscrivit au Lycée Catholique de Salpointe. L’avocat du Comté soutenait que l’emploi de fonds publics dans une école catholique était contraire à la Constitution.
La Cour Suprême des États-Unis cassa cette sentence, mais en appuyant avec trop d’insistance sur la question de répartition des aides publiques. Le point essentiel était cependant le suivant : s’il n’existait pas de budget pour des interprètes, James Zobrest ne subirait aucun préjudice d’un refus. Mais les interprètes lui avaient été accordés selon les lois du gouvernement fédéral et de l’État d’Arizona. Le priver de cette assistance parce qu’il avait changé d’établissement vers un lycée catholique était rien moins que lui faire subir un handicap à cause de sa religion.
Le même principe serait évoqué en empêchant les organismes religieux de recevoir des subventions pour leurs actions à l’étranger. Mais il n’y aurait alors que peu de poids pour argumenter car rien n’est exactement spécifié dans la Constitution. Interdire les subventions n’est pas précisément empêcher le « libre exercice » de la religion (Premier Amendement) ni attribuer un « caractère religieux » aux actions en question.
Mais comme le relevait le Juge Scalia [Doyen à la Cour suprême des États-Unis] dans une affaire analogue en 2004, quand le gouvernement interdit l’attribution de subventions uniquement pour des raisons religieuses, il viole la « Clause de Libre Exercice » tout comme s’il imposait une taxe supplémentaire. Ce ne sont pas les termes exacts figurant dans la Constitution. Mais le Juge Scalia tire sa conclusion avec la certitude de conformité à la logique de la « Liberté religieuse ».
Certains amis se plaignent, quand les juges s’écartent du texte de la Constitution, que rien ne peut confirmer leurs jugements. Mais le Juge Scalia nous montre à nouveau comment on peut s’écarter du texte et trouver, au fin fond des principes, à la fois directives et contraintes.
2 juin 2015.
Source : http://www.thecatholicthing.org/2015/06/02/obama-and-the-culture-war-endgame/
La fuite des prisonniers [Début de l’exil de Babylone]
JamesTissot, ca 1900 – Musée Juif de New York