Plusieurs fois dans ce journal je suis revenu, parce qu’elles me fascinent, sur les conséquences conceptuelles qu’il faut reconnaître à l’événement fondateur que fut l’Explosion initiale, ce jaillissement soudain d’une lumière en ce « rien » dont on ne peut se faire une idée. Il n’y avait « rien », mais vraiment « rien de rien », soit pas « un rien de rien » qui semblerait signifier un petit quelque chose, non, seulement une absence totale de ce quelque chose que certain souhaiterait pour effacer le côté abrupt du « rien absolu », et donc qui aurait eu une apparence à opposer, aussi légère qu’elle aurait été, à cet absolu incompréhensible à nos esprits étant donné l’hyperbolique accumulation de ces choses que nous observons aujourd’hui remplir l’univers et dont quelques esprits égarés s’imaginent qu’elles justifient nos existences. Rien donc, pas même un atome de quoi que ce soit, ou même une simple particule élémentaire ! Et pourtant c’est pas grand chose qu’une particule de cette espèce !
Il faut en outre et aussitôt que nous comprenions l’extravagance de ce qui a surgi à ce moment précis d’il y a au moins 13 milliards et demi d’années ! Je nomme cela Explosion initiale plutôt que de ce ridicule et insignifiant surnom adopté universellement comme pour en dénigrer la survenue – tout de même « Big-Bang » ! qu’est-ce que ça peut exprimer de compréhensible 1 ? – il est ce que l’on peut concevoir de plus extraordinaire et de plus incompréhensible du fait qu’il est en lui-même formidablement complexe.
Rien, mais rien en notre monde présent n’égale cette complexité : en ce sens qu’il réunit en lui, qui est minuscule, la totalité des informations nécessaires pour qu’il se développe et que, peu à peu, se forment tout ce qui sera nécessaire à l’apparition de l’Univers que nous contemplons, puis de la vie et enfin de l’Homme. Il y a peu de temps, je l’ai comparé à l’embryon par quoi commence l’être… qui porte en sa toute première cellule, l’Unique, toute la description qu’il est, qu’il sera !
Je devine naturellement que mon lecteur se demande si j’ai perdu le sens : après avoir donné pour titre à cette réflexion « Laïcité athée, laïcité ignorante, laïcité injuste », me lancer ‘’subito’’ dans la description de la lumière apparue au tout commencement, est-ce raisonnable ? Oui, cela est tout à fait raisonnable et de ce fait justifiable. Je compare en effet le contenu de la laïcité à la française au « rien » d’avant le commencement, d’avant l’événement de création, autre nom possible à donner au ‘’Big-Bang’’. Parce que tout ce qui est exprimé au nom de cette « valeur », sans cesse revendiquée comme républicaine, n’est rien puisque rien d’absolu ne le justifie. Que mon lecteur veuille bien avoir la patience de m’écouter. Je serai bref. Peut-être…
Les scientifiques d‘avant l’irruption du Gros Bruit croyaient dur comme fer que la matière était éternelle. Oui, éternelle ! Autant dire ce que je vais écrire ici : un quelque chose d’énorme et qui risque de me faire envoyer dans quelque désert, mais qui peut être dit, doit même l’être ; maintenant en effet nous comprenons qu’à partir de ce présupposé sans explication, qu’ils avançaient pour se sentir confortablement installés dans un athéisme irréfutable, il était impossible à ces messieurs et dames d’entrer valablement dans l’étude approfondie de ce qu’est notre univers. Ce n’est pas que ce soit facile désormais, mais c’est productif, fécond : on marche sur du ‘’certain’’ et non sur un conjecturable à qui manquait le noyau central.
Eh bien, j’ose dire que la laïcité, elle aussi, marche dans le « rien » auparavant sacré quand les savants se sentaient soutenus par l’éternité de la matière. Ils l’avaient « conjecturé » sans disposer du moindre élément de preuve, ils voulaient seulement donner au hasard de Jacques Monod le temps dont il avait besoin afin d’en arriver enfin, on ne savait quand, à construire cet univers. Bien plus de milliards d’années, beaucoup plus, que les pauvres treize aujourd’hui reconnus.
La laïcité peut dire ce qu’elle veut, tout ce qu’elle décide à partir du présupposé qui est le sien ne pourra jamais être considéré comme exact. C’est du ‘’n’importe quoi’’ comme était du ‘’n’importe quoi’’ ce qui se disait à propos de la matière pensée éternelle, exprimé pour s’éviter d’avoir à tenir compte d’un Dieu qui ne pouvait pas, s’il existait, être autre chose qu’éternel : c’est-à-dire n’appartenant pas à ce temps que crée peu à peu en ses agrandissements le noyau de départ.
Ainsi, la laïcité ressemble à ces savants qui, encore aujourd’hui, rabâchent le concept mort de la matière éternelle sur lequel cependant s’appuient, avec l’aide des désormais invalides du GOdF, les laïcistes purs et durs accrochés aux basques de la République. Ils entendent interdire aux citoyens français de penser que Dieu puisse exister : ils croient et veulent donc faire croire que l’existence de ce Dieu éternel est impensable, de ce fait impossible, tandis que les scientifiques sérieux qui s’aventurent dans la description de « l’événement de création » aboutissent nécessairement à retenir un concept bien plus que déroutant, affolant !, d’une « Intelligence organisatrice », ce qui revient au même que si je disais qu’il a fallu un auteur pour rédiger un livre (j’en sais quelque chose !). Il a fallu également un auteur pour déclencher ce qui a mis fin au « Rien ».
La laïcité à la française est une laïcité impossible puisqu’elle se justifie par un mensonge : la voici impensable pour la raison simple que l’être humain doit vivre dans un environnement vrai, c’est-à-dire vérifiable, ou ce qui essentiel pour lui ne soit pas mis de côté, évacué, rendu inintelligible et remplacé par un argument invalide : parce qu’alors cet être humain se retrouverait comme amputé de son noyau primordial.
Je tiens, en tout cas pour moi, que le développement de l’être, très progressif, ne se peut valablement que dans la mesure où on lui signale le pourquoi de son commencement, ce qui lui permet ensuite de s’orienter vers ce qui sera sont aboutissement temporel.
Tant que la matière éternelle gouvernait les pensées des savants, ces savants se retrouvaient dans l’incapacité de penser l’univers. Ils en étaient réduits à expliquer que la pomme tombait parce qu’existait une loi dont ils ne pouvaient situer la cause.
La laïcité à la française cherche, par exemple et en toute bonne foi, mais bonne foi divagante, à mettre en forme une morale à enseigner aux enfants : ce qui a été déclaré par Jean-Paul Sartre impensable parce qu’alors il faudrait disposer d’un repère absolu à partir duquel les axes divers de cette morale se développeraient harmonieusement. Mais, disait-il, l’absolu n’étant pas présent au rendez-vous exigé (ce en quoi il avait tort) la morale se découvre à jamais infondée, comme frauduleusement conçue.
La Science, en laquelle croit la laïcité à la française, s’est trouvé un absolu puisqu’elle l’a découvert en « l’événement de création », lequel, grâce au concept d’« Intelligence organisatrice », permet à l’esprit de reconnaître en elle un Vivant qui seul peut revendiquer l’éternité de son être.
Le philosophe est donc tenu de saisir le concept afin de l’élargir comme je viens de le faire très succinctement même si audacieusement. Ce qui suffit au savant ne satisfait pas le philosophe et encore moins le théologien. Je ne suis ni l’un ni l’autre, mais je découvre que pour moi également l’Intelligence organisatrice a besoin d’une reconnaissance et d’une mise en relation avec tout ce que la philosophie et la théologie sont parvenus à exprimer.
Cependant, il ne faut pas en demander autant à la laïcité : ce serait déjà pour elle un immense pas en avant que de définir ce qu’elle nomme « le vivre ensemble » en tenant compte de ce que modifie en effet l’existence certaine de l’auteur de ce « Commencement », lequel ne saurait abandonner en chemin la suite de son développement. Nul besoin en effet qu’elle se mette à désigner Dieu à la façon des chrétiens, des animistes, des musulmans, des juifs : cela revient à chaque religion d’enseigner ce en quoi elles croient. L’important est de bien faire entendre à tous ceux auxquels elle s’adresse que « Dieu existe ». Seulement cela, rien de plus, quoique ce soit fondamental. Il n’appartient plus à l’impossibilité »dogmatisée » par la laïcité, ce qui équivaut à une amputation des êtres et donc à quelque chose qui s’assimile à un crime. Commis de bonne foi, on l’espère, mais en s’appuyant sur des absurdités.