Le cardinal Walter Kasper souhaite modifier la doctrine de l’Eglise en ce qui concerne le refus de la Communion à ceux qui ont contracté un second mariage invalide. Récemment, le cardinal Francesco Coccopalmiero, président du conseil pontifical des textes législatifs et lui aussi membre du Collège Sacré, s’est joint à sa cause.
Il a été interviewé après le synode extraordinaire sur la famille pour le magazine « Inside the Vatican » en novembre 2014. Il affirme ceci: « Prenons un cas en exemple: Un mari est abandonné par sa femme. Ils ont 3 enfants. Une femme vient vivre avec cet homme ; elle l’aide, élève ses trois enfants. Dix années passent, leur union est solide. Si cette femme venait à moi pour communier, lors des funérailles de son père, ou le jour de la confirmation de l’un de ces enfants, que devrais-je faire? Lui refuser la communion, puisqu’elle est dans une situation inappropriée ou la laisser communier, mais dans ce cas c’est moi qui commettrait un acte illicite, puisque je reconnaîtrais indirectement que le mariage de cet homme n’était pas indissoluble ?
C’est déjà beaucoup, mais il a ajouté : “ Ou alors, en reconnaissant le caractère illégitime de cette situation, comment pourrais-je lui demander, en acceptant qu’elle communie, d’abandonner cet homme et ces trois enfants? Que deviendrait cet homme ? Que deviendraient ces enfants? Dans ce cas très réaliste, il serait impossible de gérer une (sic) situation illégitime sans causer davantage de souffrance et de peine. Serait-il vraiment impossible de l’admettre à la Communion ? En la laissant communier, est-ce que j’irais contre la doctrine de l’indissolubilité du mariage ? Je ne pense pas : en fait, c’est un cas exceptionnel ».
La conclusion du cardinal est particulièrement inquiétante puisque son travail consiste à publier des interprétations authentiques, en lien avec le code du Droit Canonique. Ici, il contredit manifestement la « Déclaration sur la communion pour les personnes divorcées et remariées du 24 juin 2000 par son prédécesseur au Conseil Pontifical pour les Textes Législatifs, le cardinal Julian Herranz.
Cette déclaration dit : « Naturellement, la prudence pastorale conseille vivement d’éviter que l’on en vienne à des cas de refus public de la sainte communion. Les pasteurs doivent s’employer pour expliquer aux fidèles concernés le vrai sens ecclésial de la norme, de sorte qu’ils puissent la comprendre ou au moins la respecter. Quand pourtant se présentent des situations dans laquelle ces précautions n’ont pas eu d’effet ou non pas été possibles, le ministre de la distribution de la communion doit se refuser de la donner à qui en est publiquement indigne. Il le fera avec une extrême charité, et il cherchera à expliquer au moment opportun les raisons qui l’y ont contraint. Pourtant il doit le faire aussi avec fermeté, conscient de la valeur que possèdent ces signes de force, pour le bien de l’Église et des âmes.» La Déclaration se termine en disant : « aucune autorité ecclésiastique ne peut dispenser, en aucun cas, de cette obligation du ministre de la sainte communion, ni produire des directives qui la contredisent.»
Cette approche du cardinal Coccopalmiero ne montre pas de fermeté dans son jugement mais montre plutôt un refus d’appeler cette femme hypothétique à la conversion. Une femme catholique qui vit avec un homme catholique (qui est en fait marié à quelqu’un d’autre), est tout à fait consciente qu’elle est dans le péché. S’il elle n’en est pas consciente, il est du devoir d’un pasteur attentif aux âmes de ses fidèles de l’en informer.
Quelque soit le bien honorable que cette femme puisse apporter aux enfants de cet homme avec lequel elle cohabite, ne change pas la nature de son obligation au sixième commandement : tu ne commettras pas d’adultère. Le désir d’un catholique à recevoir la communion doit être guidé par la doctrine de l’Eglise. Dans le cas théorique du cardinal Coccopalmiero, il montre une bonne connaissance de la situation de la femme, ce qui explique pourquoi il a eu et continue d’avoir la possibilité de la catéchiser à propos de son péché d’adultère. Il peut également lui faire part de l’incitation de l’Eglise à ne pas vivre dans le péché. Dans sa situation, elle peut l’éviter en vivant avec cet homme en tant que frère et sœur, puisque pour le bien des enfants, il est nécessaire qu’ils ne se séparent pas. (Lui demander d’abandonner l’homme et ces trois enfants n’est pas la seule alternative possible).
Au lieu de cela, il pose cette « exception » inexistante à la loi morale concernant la gravité du péché adultère. Il fait appel à nos émotions, en caricaturant la fidélité du sixième commandement et la discipline de l’église par rapport à la Communion, et en la décrivant comme un rigorisme peu charitable. La supposition passée sous silence dans le scénario du cardinal est que cette femme mérite de recevoir la sainte communion car c’est une bonne personne, et que son comportement adultère ne devrait pas être pris au sérieux.
La prétention étonnante dans cette situation est que Dieu lieu-même n’est pas offensé, alors pourquoi l’église devrait-elle exclure cette femme. Cette supposition est au détriment de la doctrine catholique et de la vie. Peu importe les exceptions, la vérité de la foi demeure : l’adultère est un péché mortel, et ceux qui sont dans cet état de péché mortel ne doivent plus recevoir la Communion parce que la recevoir offense Dieu, et peut conduire d’autres dans ce même péché.
Qu’est-ce que cette approche révèle ? Que pour certains hommes d’Église, la mission première de l’Eglise est de prévoir le réconfort de fidèles dans certains cas similaires. Les doctrines contrariantes et la discipline commune de l’Eglise doivent être mises de coté. Mais l’appel à la conversion de l’Evangile implique souvent le bouleversement d’un pécheur dans l’espoir de lui montrer que ce n’est pas la loi de Dieu qui nous blesse, mais nos péchés. Le vrai réconfort est dans la redécouverte de la joie de vivre dans la grâce de Dieu en rejetant le péché. C’est à la fois le chemin de la paix de l’âme, et celui du salut du monde à venir.
Malheureusement, il est possible que nous connaissions beaucoup de « cas difficiles » avant le synode en octobre prochain, ce qui va compliquer les choses davantage.
Du 19 décembre 2014
Photo : Le cardinal Francesco Coccopalmerio.
Source : http://www.thecatholicthing.org/2014/12/19/hard-cases-make-bad-doctrine/
A propos du Père Gerald E. Murray
Le Révérend Gerald E. Murray, Doctorant en Droit canonique est pasteur de l’Eglise de la Sainte Famille à New York, et un avocat du droit canonique.