Objectif : rendre l’islam « aussi banal que le catholicisme » - France Catholique
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Objectif : rendre l’islam « aussi banal que le catholicisme »

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J’ai participé un jour à Istanbul à une conférence sur « Le futur dialogue des civilisations ». Les Turcs savent (ou savaient avant la récente réislamisation) que si le « choc » des civilisations annoncé par Samuel Huntington se produit, ils seront pris entre deux feux.

Parce que je devais me rendre dans d’autres villes turques, je n’ai pas pu participer à une émission-débat par téléphone (en réalité par fax) organisée à l’intention d’interlocuteurs non-turcophones. Le fax cracha en premier le commentaire suivant : « Vous êtes tous des infidèles et vous mourrez ce soir ».

C’est un collègue invité à cette conférence, un Britannique ayant une bonne expérience du Moyen-Orient, qui m’a raconté cet épisode plus tard. Aucun des intervenants n’était surpris. Ils savaient que c’était courant dans la région, même dans la Turquie à moitié laïque d’Atatürk.

A présent, respectant les directives morales de notre président, je ne veux pas reprocher à « tous les musulmans ce que les adeptes d’autres religions font aussi ». Et, pour ne rien vous cacher, j’ai été un jour menacé de voies de fait, sans doute par un chrétien progressiste, après avoir pris part à une émission télévisée de Bill Moyers – les risques du métier d’expert.

Mais je pense souvent à cet épisode turc lors d’événements du genre du massacre qui s’est récemment produit à Paris. Les commentaires se répartissent en deux camps bien connus. Le premier adopte le refrain : « il s’agit d’une infime minorité » et « l’islam est une religion de paix ». Le second camp accuse à juste titre le premier de mentir, mais tend à se rallier à une vague condamnation générale de l’islam.

La vérité, c’est que de très nombreux musulmans abhorrent ce type de violence. J’en ai rencontré beaucoup à Washington, en Turquie et ailleurs. Certains se sont exprimés avec force à cette occasion et à d’autres. La presse ne leur accorde pas toute l’attention voulue.

Mais il est également vrai que cette «infime minorité », mantra que nous continuons à répéter pour calmer nos peurs et proclamer notre tolérance, représente des dizaines de millions, voire des centaines de millions de terroristes potentiels, dans l’ensemble du monde. Rappelez-vous ces gamins du Moyen-Orient qui dansaient dans la rue après le 11 septembre ? Et plusieurs pays occidentaux sont à présent la cible constante de menaces et d’intimidations de la part des musulmans (comme ce qu’on m’a raconté en Turquie) qui ne sont que rarement relatées.

Ces menaces ne sont pas surprenantes, étant donné que, selon les sondages, d’importants segments de la population musulmane, surtout parmi les jeunes, soutiennent l’islam radical : 42 pour cent en France, 35 pour cent en Grande-Bretagne, et 26 pour cent en Amérique (oui, même en Amérique) estiment que les attentats-suicides sont justifiés. Espérons qu’ils se calmeront avec l’âge.

Entre temps, vous pouvez vous gargariser tant que vous voudrez de ces expressions « infime minorité » et « religion de paix ». (Laissons tomber la formule « cela n’a rien à voir avec l’islam » qui n’est qu’un grossier mensonge). La dure réalité, à brève échéance, c’est que nous faisons face – ou, dans le cas de nos dirigeants, évitons de faire face – à une situation qui va continuer dans l’ensemble à susciter la violence.

Les commentaires sur les attentats de Paris semblent ne pas devoir s’arrêter. Ce qui n’aide pas non plus à y voir clair. La revue Charlie Hebdo n’était pas seulement « satirique ». Elle était totalement imprégnée d’un anarchisme teinté d’une bonne dose du type spécial d’autoritarisme propre à ce mouvement. Avec, en plus, une animosité particulière contre la religion. Comme le rédacteur l’a dit un jour, son objectif était de rendre l’islam « aussi banal que le catholicisme ». Dans la noire ténèbre de l’anarchie, toutes les religions sont aussi obscurantistes.

Sauf que ce n’est pas vrai. Et les musulmans radicaux ne redoutent pas les railleries. C’est une preuve de l’irresponsabilité de Charlie Hebdo que d’avoir pensé que ses âneries présenteraient de l’importance pour l’islamisme. Charlie Hebdo n’était pas la voix courageuse d’une quelconque dissidence. La revue est au fond inoffensive (même pour les hommes politiques français qui redoutent, eux, les railleries), car c’est le genre de charge féroce que les esprits adolescents boivent comme du petit-lait, et que les adultes oublient rapidement.

Pour racheter leurs nombreuse tares et stupidités, les rédacteurs de Charlie Hebdo avaient une vertu de taille : ils ne se sont pas laissé intimider par l’islamisme, même après un attentat à la bombe dans leurs locaux en 2011. A la différence de nos médias, ils ne cédaient pas aux pressions des islamistes, pas plus qu’ils ne feignaient de reculer par égard pour la religion.

La France est particulièrement divisée sur l’attitude à adopter envers l’islam. Pendant des années, elle a endoctriné les enfants contre le « racisme », comme si les adeptes de Mohammed étaient dotés d’un ADN spécial. Pourquoi ? La seule réponse valable est qu’il était plus facile pour les hommes politiques d’utiliser un terme considéré partout comme un tabou plutôt que d’affronter sérieusement le problème religieux. Ils sont en train de changer de disque.

Voici un exemple éloquent.

L’immeuble parisien d’un ami proche a été touché il y a quelques années par une émeute musulmane. (Ces incidents sont plus courants qu’on ne croit. Des supermarchés français sont parfois pillés, mais, par autocensure, la presse ne mentionne pas ces faits divers afin de ne pas nourrir l’« islamophobie ». Mon ami, un bon catholique plutôt progressiste sur le plan politique (il a travaillé pendant des dizaines d’années pour une organisation charitable catholique à Paris) était partagé, mais ne put s’empêcher de condamner l’émeute. La police ne s’était pas opposée au pillage des magasins, à la destruction des biens ni au blocage des rues, etc. Les enfants de mon ami qui fréquentaient des écoles catholiques françaises lui rétorquèrent qu’il n’avait pas le droit de parler ainsi. C’était « raciste ».

Il n’est pas le seul. Le Front national, qualifié en général de parti « d’extrême droite » a obtenu 25 pour cent des voix (le pourcentage le plus élevé pour la France) lors des dernières élections européennes. Non pas, selon moi, parce que ses opinions parfois ignobles sont subitement devenues plus populaires. Comme Charlie Hebdo, le Front national, qui martèle quelquefois des vérités difficiles à entendre, dit en fait tout haut ce que beaucoup ont vécu dans leur quotidien. Le combat contre « l’islamophobie » a, malheureusement pour les Français, rendu les musulmans encore plus redoutés et impopulaires.

D’autres réactions, plutôt rares, sont possibles. Une ancienne étudiante qui a vécu et travaillé dans des pays musulmans écrit de Paris qu’elle se sent plus vulnérable que jamais en France. Et voici aussi ce commentaire :

« La réaction à cet attentat a été très intéressante… le clergé catholique français a été l’objet de bien des satires venimeuses de la part de Charlie Hebdo. Une grande partie de ces attaques étaient personnelles, de mauvais goût, voire complètement ordurières… Ce soir, un groupe de prêtres avec lequel elle se trouvait a prié pour les victimes et leurs familles. Ces prières étaient récitées pour les persécuteurs par ceux-là mêmes qui avaient été persécutés. Je me demande combien de mosquées de par le monde auraient réagi de la même manière ».

Ah, la banalité du catholicisme !

Source : http://www.thecatholicthing.org/2015/01/30/making-islam-banal-catholicism/

Photographie : La manifestation parisienne du début de ce mois organisée pour protester contre le terrorisme

Robert Royal est le rédacteur en chef de The Catholic Thing et le président du Faith& Reason Institute de Washington (D.C.). Son dernier ouvrage, The God That Did Not Fail : How Religion Built and Sustains the West est à présent disponible en livre de poche (Encounter Books).