Nous nous faisions, ma femme et moi, une grande joie d’assister au film qui devait nous présenter les chefs d’œuvres des Musées du Vatican : innombrables, certes, et donc l’heure que nous devions vivre, lunettes 3D sur le nez, laissait présager quelque chose d’unique.
Ce fut dans une grande salle, devant un immense écran.
Il y eut bien de l’unique, en effet, et du grandiose, bien entendu ! De l’étonnement : voir certaines des sculptures grecques et latines « grandir » au point de devenir inquiétantes quoique superbes tant leurs « reliefs » nous impressionnaient (je pense à l’extraordinaire ‘Laocoon’ grec) cela outrepassait ce que nous pouvions concevoir ; jusqu’aux tableaux, en deux dimensions par nature, dont les personnages s’éloignaient dans l’espace, formant des plans à vrai dire trop déroutants et même absurdes. Le cinéma aime les ‘effets spéciaux’…
J’ai été très réticent à propos de toutes les « enjolivures » et autres « ornements » qui envahissaient le « spectacle » et nous faisaient perdre du temps: j’aurais vu mieux employé ces quelques minutes à regarder, plutôt contempler, un plus grand nombre de ces merveilles qui surabondent au Vatican. Mais que venait faire là ce visage, sans cesse de retour, d’un jeune homme censé être on ne sait qui d’abord, puis Raphaël, Michel Ange, d’autres aussi ? Ces nuages de poussières dorées poussées par j’ignore quel vent ? Ces eaux tournoyantes, ces jaillissements de gouttes d’eau traversées de soleil ? Tout cela très beau, certes, mais inutile, à la limite du futile et même du prétentieux…
Un vieux monsieur, sans doute un des patrons de ces Musées, (peut-être « le » patron ?), nous servait, heureusement avec une grande conviction, un topo très et même trop riche en références : de plus on le voyait trop souvent ! Je me répétais avec un peu d’irritation : des œuvres, s’il vous plaît, des œuvres ! J’aurais de fait aimé pouvoir m’attarder plus longtemps sur certaine sculptures, sur certains tableaux qui, à peine apparus, disparaissaient en quelques secondes…
J’avais espéré, non un discours sur l’histoire de l’art, mais une promenade heureuse et lente, non accompagnée de bruits parfois énormes, de coups sourds et violents, d’une musique elle aussi trop envahissante, comme désormais c’est souvent le cas dans les productions contemporaines. Les logiciels de « créations » musicales prennent aujourd’hui la place du compositeur… au détriment de la seule musique qui vaille, celle qui se trouve parfaitement accordée à ce qui est montré.
Ai-je tort ? Sans doute pour ceux qui auront tout apprécié : la consolation, il est vrai, allait avec les regrets, car les images étaient superbes, les moyens techniques employés pour nous faire découvrir les œuvres furent, sans contestation possible, magnifiquement efficaces : l’écran, immense, s’effaçait pour donner, par exemple, aux « chambres » de Raphaël des dimensions sans doute égales à la réalité : pour moi qui, hélas, n’avait jamais pu visiter ces Musées, c’était à la fois une révélation et une admiration sans bornes. J’ai été moins enthousiaste pour les musculatures des femmes de Michel Ange… Il est vrai qu’elles dépassaient de beaucoup les dimensions des dames en train de chuter vers la gueule d’Enfer.
La ‘Piéta’ fut appréciée au point d’en être sidéré. Pouvoir admirer de si près le visage de la Vierge Marie fut une surprise : quelle pureté, quelle tendresse, quelle finesse de trait ! J’avais l’impression de voir le marbre de Carrare dans sa texture même, mais habité réellement d’une âme. Ce n’était plus une photographie mais la pierre elle-même, mais vivante ! Une pierre faite chair. Oui, Michel Ange peut-être dit ‘Le’ sculpteur !
Ainsi, l’heure fut tout de même bienheureuse, malgré toutes mes objections.
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