Le Conseil d’Administration de l’Université de Notre Dame se réunit cette semaine sur le campus. Les réunions des comités auront lieu jeudi, et seront suivies par la réunion de tout le Conseil vendredi ; puis samedi il y aura le match de football américain très attendu contre l’université de Stanford. On ne s’attend pas à ce que les réunions elles-mêmes produisent grand-chose. Elles ressembleront à des réunions d’affaires ordinaires. Mais, en fait, il sera arrivé quelque chose de profondément troublant.
Malheureusement, à Notre Dame – comme en fait dans de nombreuses autres universités catholiques – beaucoup de membres du Conseil de gestion sont essentiellement des spectateurs passifs choisis surtout pour leur « potentiel généreux » comme on le dit délicatement, plutôt que pour les qualités requises pour remplir la sérieuse responsabilité qui leur est confiée dans Ex Corde Ecclesiae de maintenir et de renforcer l’identité catholique de l’université.
Les membres du Conseil ne connaissent généralement pas bien l’éducation supérieure catholique. Ils se laissent facilement « guider » par l’administration vers les décisions souhaitées. Quels que soient leurs points faibles, cependant, il n’y a pas de doute que beaucoup sont des catholiques engagés qui désirent vraiment que Notre Dame soit une institution catholique authentique. Et la plupart des membres du Conseil n’ont pas abîmé la mission de Notre Dame en tant qu’université catholique.
Ceci va changer à la réunion d’octobre, quand Ms Katie Washington prendra dans le Conseil le poste d’« administrateur junior », auquel elle a été élue en mai dernier. Ms Washington était major de la promotion 2010 de Notre Dame et elle est maintenant inscrite à la faculté de médecine de l’université de Johns Hopkins
En 2012, elle s’est jointe à plusieurs de ses collègues de l’école de médecine pour écrire un article d’opinion dans le journal Baltimore Sun, critiquant la position de l’Eglise catholique au sujet du mandat pour la contraception/l’avortement de l’Obamacare. Elle a fait connaître sa conviction que tous les employeurs religieux devraient être obligés, conformément à la loi, de couvrir la contraception et l’avortement quelles que soient leurs objections religieuses.
Son article d’opinion visait particulièrement les « leaders catholiques de la nation » et critiquait spécifiquement celui qui était alors le cardinal désigné Edwin O’Brien de Baltimore. Son animosité envers la positon de l’Eglise –celle même que Notre Dame a adoptée dans son procès contre l’administration Obama – était claire. Depuis, elle n’a pas modéré ni désavoué sa déclaration.
Elle préfère vraisemblablement la contrainte que le gouvernement fédéral exerce sur ceux, comme les Petites Sœurs des Pauvres, auxquels leur conscience défend d’être d’accord avec les dispositions moralement répréhensibles de l’Obamacare. Pourtant, cette partisane de l’assaut de l’administration Obama sur la liberté religieuse des institutions comme Notre Dame a été élue au Conseil d’Administration de l’université.
C’est bien regrettable, mais cette élection a été faite à l’initiative du président de l’université, le Fr. John Jenkins et par le vote des douze membres du « Board of Fellows », composé de six prêtres de la Sainte Croix et de six laïcs. C’est arrivé, cependant, sans qu’ils connaissent l’hostilité de Ms Washington à la liberté religieuse et à la revendication de conscience de Notre Dame.
Ainsi, le groupe ne savait pas si Ms Washington serait une promotrice fiable de la mission catholique de Notre Dame. Il n’y a pas non plus eu d’évaluation de la répercussion possible sur le procès même de Notre Dame après la nomination d’un administrateur qui est si manifestement opposé à la revendication de conscience de l’école.
Les Fellows auraient peut-être voté autrement s’ils avaient su. Mais cette mésaventure est bientôt devenue publique, et la nomination est toujours valide.
Les directeurs de l’université, le Fr. Jenkins et le président du Conseil d’administration, Richard Notebaert ont évité de commenter en public. Le contraire s’était passé quand Mr. Notebaert a défendu vigoureusement la nomination de la femme d’affaires de Chicago Roxanne Martino il y a plusieurs années après la révélation qu’elle avait donné une grosse somme d’argent à un comité d’action politique pro-avortement.*
Quand la controverse a éclaté, Madame Martino a eu la bonne grâce de démissionner. Cette fois-ci, le Fr. Jenkins et M. Notebaert ont permis au bureau des relations publiques de Notre Dame de défendre Ms. Washington en raison du fait que les membres du Conseil d’administration ne sont pas obligés d’être d’accord avec tout ce que fait l’université.
C’est un fait. Mais cette action implique que Notre Dame ne voit rien de mal à nommer comme administrateur quelqu’un qui s’oppose publiquement à la position de l’université sur des sujets qui menacent le droit de Notre Dame d’être l’université catholique qu’elle veut être. Elle dit que Notre Dame se sent libre d’ignorer l’injonction des évêques : « Tous les membres du Conseil doivent s’engager à soutenir les implications pratiques de l’identité catholique de l’université. »
De plus, cette nomination sera probablement utilisée par le gouvernement dans le litige sur la contraception et l’avortement pour mettre en doute le sérieux des objections religieuses de Notre Dame au mandat de l’Obamacare – argument dangereux devant les juges qui ont déjà exprimé des doutes quant à la sincérité de Notre dame.
Ces inquiétudes ont été communiquées au Fr. Jenkins et aux Fellows, mais n’ont apparemment eu aucun impact. Au lieu de cela, Ms Washington peut s’attendre à être fêtée à la prochaine réunion. Bien intentionnés, quoique sans information, les membres du Conseil feront comme les autres de peur d’être jugés peu aimables.
Et cependant, les administrateurs courageux qui prennent au sérieux la mission catholique de Notre Dame ont le grave devoir de continuer la tâche désagréable de soulever ouvertement des questions sur l’aptitude de Ms Washington à faire partie du Conseil. Cela est vrai surtout pour les membres du Conseil des Fellows de la Sainte Croix qui ont la responsabilité spéciale de préserver l’identité catholique de l’université que nos ancêtres ont fondée et développée.
Trop de communautés religieuses sont maintenant marginalisées, à la périphérie des institutions qu’elles ont construites. Des décisions comme celle-ci demandent de choisir d’une manière ou d’une autre pour la Sainte Croix à Notre Dame.
La tâche la plus cruciale tant pour les administrateurs que pour les membres du Conseil dans les universités catholiques contemporaines est de préserver et d’améliorer la mission catholique et l’identité de leurs institutions. La nomination de Ms Washington au Conseil d’administration de Notre Dame est l’exemple d’un échec notoire de direction et de jugement. Elle fait du tort à la vocation spéciale de Notre Dame en tant qu’université catholique. C’est une erreur qui doit être corrigée.
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Le Frère Wilson D. (Bill) Miscamble, C.S.C., nouveau rédacteur à The Catholic Thing, est prêtre de Holy Cross/la Sainte Croix et professeur d’histoire à l’université de Notre Dame.
Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2014/a-moral-challenge-for-notre-dames-trustees.html
Illustration : des étudiants manifestent avec des écriteaux dont l’un dit « Honte à Notre Dame ».
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