Maintenant que mgr Blase Cupich a été nommé archevêque de Chicago, beaucoup de gens ont manifesté leur intérêt pour ses années d’épiscopat dans le diocèse de Spokane. Je tiens à préciser que je connais à peine mgr Cupich au plan personnel. Je ne suis qu’un laïc du diocèse de Spokane. J’ai cependant été responsable d’une chaire de philosophie chrétienne à la Gonzaga University [« Université Saint Louis de Gonzague »], j’ai exercé comme conseiller académique du Bishop White Seminary (séminaire pour étudiants à la Gonzaga University) et je suis l’ancien directeur du petit programme d’études catholiques de la Gonzaga University. La Gonzaga University est, essentiellement, une école d’environ 4800 étudiants qui se dit elle-même jésuite et catholique et qui opère à l’intérieur du diocèse de Spokane.
D’abord, les bonnes nouvelles : peu de temps après avoir été nommé évêque à Spokane, Cupich a fait un exposé à Gonzaga dans le cadre de la « Semaine sur l’héritage ignacien ». Sa causerie était consacrée à l’oeuvre de Christian Smith, un sociologue doué qui est le directeur du Centre pour l’étude de la religion et la société à l’Université de Notre Dame. L’oeuvre du professeur Smith est vaste, mais il est particulièrement habite à utiliser les outils sociologiques pour analyser l’incapacité des parents et des programmes d’éducation chrétiens, y compris certains catholiques, à transmettre la pratique et même la simple connaissance de la foi chrétienne aux jeunes des Etats-Unis. Dans sa présentation, mgr Cupich sembla tout à fait convaincu par l’analyse de Smith sur la crise qui se développe actuellement chez nous.
Cela signifie que Cupich reconnaissait qu’il existe de sérieux problèmes à l’intérieur de l’Eglise catholique et de l’éducation catholique aux Etats-Unis. Mais Cupich peut ne pas avoir remarqué qu’après son apparition, la « Semaine de l’héritage ignatien » fut prise en mains par les administrateurs de Gonzaga et que des idées comme celles de Smith n’ont guère été représentées depuis lors au cours de la « Semaine de l’héritage ignatien ».
Peu de temps après l’accession de Cupich à l’épiscopat, l’administration de Gonzaga autorisa la représentation sur le campus des Monologues du vagin. Cela fut largement perçu – même sans que cela soit dit officiellement – comme la répudiation par Gonzaga de l’ancien président le père Robert Spitzer. (Spitzer avait refusé cette autorisation). Dans le tumulte qui suivit l’autorisation des Monologues sous le nouveau régime de Gonzaga, on apprit que Cupich avait donné sa propre accord au spectacle.
Il a été dit que Cupich avait reçu des administrateurs de l’université la promesse que la représentation des Monologues serait insérée dans une sorte de contexte particulier pédagogique, mais par la suite le contexte pédagogique se transforma en une avalanche d’agressions contre, entre autres, l’Eglise catholique et ses évêques. En tout cas, quelle que fût son intention, le résultat de la décision de Cupich fut de saper la position de l’enseignement catholique traditionnel à Gonzaga.
Le Bishop White Seminary à Gonzaga qui avait remporté un extraordinaire succès jusqu’à ce que Cupich devînt évêque, tomba rapidement en désuétude après son arrivée. De plus, quand Gonzaga refusa de prolonger le statut de club pour les Chevaliers de Colomb du campus de Gonzaga, Cupich, on le chuchota partout, dit aux séminaristes restants de ne pas discuter du sujet avec la presse. Il a été aussi largement rapporté que Cupich ne voulait pas que ses prêtres diocésains s’impliquent dans certains groupes pro-vie qu’il considérait comme trop bruyants. Cupich peut même l’ignorer, mais à l’époque, les étudiants mêlés au club « Droit à la vie » de Gonzaga se sont sentis abandonnés, même s’ils ne furent pas sa cible directe.
Je lui ai écrit une fois exprimant en particulier mes préoccupations au sujet de la direction du programme « tronc commun » de Gonzaga. Sa réponse fut polie, mais il précisa clairement qu’il n’avait aucun intérêt à s’impliquer lui-même dans de tels sujets. Gonzaga adopta, et est maintenant en train de mettre en oeuvre, un tronc commun qui diminue de trois à un le nombre de cours que les étudiants prennent en « religion catholique et chrétienne ».
Le cours auparavant obligatoire sur la Bible est en train d’être supprimé et le cours sur le christianisme appliqué qui souvent en pratique signifiait « morale chrétienne », va être transformé en « religions dans le monde ». Les étudiants de Gonzaga, dont beaucoup appartiennent au diocèse de Cupich, devront bientôt consacrer à l’étude de « la religion catholique ou chrétienne », sur quatre années de collège, un cours d’un semestre seulement (3 sur 128 crédits,ou 2,84 %). Le journal local de Spokane décrit Cupich comme « un modéré qui a appelé à la courtoisie dans les guerres culturelles » puisqu’il a dit que le pape François ne veut pas d’ « idéologues ». Autant que je peux le dire, la description est inexacte. Les vrais modérés engagent tous les côtés, essayant de trouver une base commune, si elle est accessible, qui leur permettra de faire avancer leurs principes. En n’impliquant pas sa fonction dans des situations de conflit, Cupich a souvent, intentionnellement ou non, tranquillement cédé beaucoup de terrain à un seul côté, et sans faire avancer ses principes.
Pour être juste, Cupich voulait un débat public avec un conseiller municipal local sur la légalisation du mariage homosexuel. Pourtant, globalement, le dossier n’est guère audacieux. Et on se pose la question : s’il apparaît comme trop timide pour être efficace dans le petit diocèse, plutôt poli et humble de Spokane, quelles sont ses chances d’être efficace dans une place aussi vaste, musclée, aux larges épaules que Chicago ?
Mon conseil aux catholiques de Chicago ? Votre nouvel archevêque est un homme très gentil ; il est aussi très intelligent et doué. Je le respecte beaucoup trop pour le flatter comme beaucoup de mes camarades de Spokane ont l’habitude de le faire. Je refuse de croire qu’il pense réellement que ceux d’entre vous qui essaient de défendre et de faire avancer l’Eglise sur la place publique ne sont que des « idéologues ». Mais il a tendance à avoir – pour user d’une expression polie – « horreur du conflit ».
Nous vous l’envoyons avec nos prières et notre charité. Il a maintenant un très grand travail, et il aura besoin, pour avoir des chances de succès, que vous vous engagiez vous-mêmes, et avec énergie, dans les combats de l’Eglise de Chicago.
Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2014/bishop-cupich-a-view-from-spokane.html
Photo : le cardinal George accueille archevêque Cupich à Chicago.
Mercredi 24 septembre 2014
Douglas Kries, nouveau collaborateur de The Catholic Thing, est titulaire d’un doctorat en théologie du Boston College ; il est maintenant professeur de philosophie à la Gonzaga University à Spokane, Washington. Parmi ses travaux publiés : The Problem of Natural Law (« Le problème de la loi naturelle). Il n’est pas autorisé à parler pour et au nom de la Gonzaga University.
Pour aller plus loin :
- Sournoise tyrannie passive/aggressive.
- Vladimir Ghika : le contexte politique avant la guerre de 1914-1918
- LE MINISTERE DE MGR GHIKA EN ROUMANIE (1940 – 1954)
- Liste des ouvriers pastoraux, Evêques, Prêtres, Religieux, Religieuses et Laics tués en 2011 et 2010
- Sur le général de Castelnau et le Nord Aveyron.