Séisme ! Le mot prononcé hier, à propos de la garde à vue de Nicolas Sarkozy, n’est pas exagéré. Il y avait eu la condamnation de Jacques Chirac, alors que celui-ci ne bénéficiait plus de l’immunité présidentielle. Mais là, ça fait encore plus mal. L’ancien président est traité comme n’importe quel justiciable. Et il faut bien le dire, cela a quelque chose d’humiliant. Bien sûr, il y a présomption d’innocence, tant qu’il n’y a pas de jugement et de condamnation. Mais ce qu’il y a de spectaculaire dans l’événement renforce son symbolisme extrême. Pourtant, il n’y a rien d’étonnant et de scandaleux dans un État de droit qui suppose cette sorte de prééminence du pouvoir judiciaire, devant lequel tout citoyen est semblable à un autre et ne saurait se prévaloir d’aucun privilège de titre et de situation.
J’entends bien ce discours, notamment dans la bouche d’un magistrat honoraire comme Philippe Bilger. Discours qui contredit la célèbre tirade du bon Jean de la Fontaine, en finale de la fable Les animaux malades de la peste.
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. »
À ceux qui s’insurgent contre l’acharnement judiciaire qui s’abat sur Nicolas Sarkozy, on répond que les magistrats ne font qu’appliquer le droit et la procédure. Je ne le contesterai certes pas, et je laisse complètement ouvert le champ judiciaire, avec ses règles. Cependant, j’ai toujours en tête la formule de Montesquieu, rappelée par Pierre Manent : La justice est le plus terrible des pouvoirs. Elle a la possibilité de vous mettre en pièces, et même avant qu’il y ait eu la moindre condamnation. Comment ne pas être sensible aussi à l’interférence des procédures et du combat politique ? Les choses se mêlent inextricablement. C’est inévitable ? Sans aucun doute. Souhaitons simplement que l’indépendance des juges soit plénières, qu’elle ne soit pas entachée de soupçons idéologiques ou partisans.