Pendant un certain temps, Lord Erringham a été soigné pour une “aggra-quelquechose” Par un médecin bien connu et cinglé, Sir Roderick Glossop. Y a-t-il un autre endroit de la littérature anglaise où l’adjectif « loony » apparaisse de façon aussi amusante que dans Wodehouse ?
Chacun de son côté, deux de mes amis m’ont envoyé la délicieuse critique de Christopher Buckley sur « l’hommage à P.G. Wodehouse » de Sébastien Faulks, intitulée Jeeves et les cloches du mariage. Si l’imitation est la meilleure forme de flatterie, l’inoubliable Woodehouse, dans cette maison de campagne anglaise qu’il habite certainement au ciel, est très satisfait.
La page de garde du livre énumère 14 romans où un personnage cultivé nommé Jeeves set de majordome au fringant, et très élégant mais souvent malheureux en amour Bertram Wooster, dont nous apprenons que les ancêtres ont combattu aux croisades et bravé les flèches à la bataille d’Azincourt.
Quand on lit Woodehouse, – et a fortiori Faulks – le premier principe est qu’il faut connaître les anciennes traditions, les Ecritures, la féodalité, l’histoire de l’Angleterre, les philosophes modernes au moins depuis Kant jusqu’à Schopenauer, le nom des meilleurs vins de porto (Warre 1885), et la manière de s’habiller correctement pour les dames et les gentilshommes – « Que diable, Jeeves, il y a des moments où la question des vêtements appropriés n’est simplement pas d’actualité. » « Il faut encore que j’en rencontre un monsieur ».
Si on ne connait pas Wordsworth, Keats et « Browdig » comme l’a bafouillé une jeune fille à la fête de Malbury Hall, le séjour à Oxford ou au collège de Gonville et Caïus à Cambridge, sera plutôt un fiasco.
Bien sûr, Shakespeare est essentiel. L’intrigue tourne autour de Titania et Bottom dans le Songe d’une nuit d’été. L’héroïne de cette histoire a joué le rôle de Rosalind dans « Comme il vous plaira » En plus, il faut s’y connaître en pur sangs et sur l’habitude de parier dans le monde des courses de l’Honnête Sid Levy.
La connaissance du jeu de Cricket, est également vitale. Ce sport est pour l’Angleterre et ses anciennes colonies, spécialement l’Inde, ce que le Baseball est pour les Etats Unis. Pour paraphraser George Wil, si on ne connait pas le cricket, on ne connait pas l’Angleterre.
Quand B. Wooster n’a pas réussi à attraper une balle volante cruciale pour gagner complètement le match, faisant perdre par-là à Lord Hackwood son énorme mise, il n’y a pas eu de joie à Mudville, ou pour le dire de manière plus élégamment anglaise, dans un style imagé : « Mon dîner à Melbury Hall ce soir-là était aussi amusant que l’enterrement de Sir John More à Conunna ! » (1809, en Espagne, le poême de Charles Wolfe dit : «On n’a pas entendu un seul roulement de tambour… » )
Dans la vie de B. Wooster, les femmes avaient souvent été formidables, à commencer par sa tante Agatha, qui, apparemment avait été en classe avec Lady Hackwood, et Madame Julia Puxley. Aucune de ces imposantes dames n’a accordé à Bertie le crédit du moindre signe d’intelligence. Et les trop nombreuses jeunes filles que le jeune B. Wooster avait un jour choisi d’honorer – Cora « Corky » Pilbright , Zenobia « Nobby » Hopwood, Pauline Stocker, Florence Craye, Bobbie Wickham, et l’inoubliable Madeline Bassett, qui pensaient que les étoiles étaient les chaînes de pâquerettes de Dieu, – à la fin se sont toutes révélées bonnes à fuir. Comme l’écrit Jeeves : « Vos enchaînements précédents avec le beau sexe se sont rarement terminés de façon heureuse. »
Sur la grande différence entre les mâles et les femelles, Woodehouse est contre culturel : « Les femelles de l’espèce ne sont pas seulement plus redoutables que les mâles, elles sont aussi fameusement plus bizarres. » Bertie confesse sa propre perplexité : « Pour être tout à fait franc, je n’ai jamais compris pourquoi les filles tombent amoureuses des mecs, mais je suppose que si une nana de 24 carats comme Pauline Stocker peut déclarer un amour immortel à un crétin comme Chuffy Chuffnell, alors, tout est possible ! » Il est bon de se souvenir que la phrase « tout est possible » se trouve dans les Ecritures (Matthieu 19 – 26)
Cette différence complémentaire et providentielle entre les hommes et les femmes forme le cœur des « cloches du mariage » qu’à son grand étonnement, B. Wooster entendra après sa première rencontre apparemment due au hasard, avec une certaine Georgiana Meadowes sur la côte d’azur.
Je dis apparemment due au hasard car B. Wooster après avoir réalisé qu’il a enfin trouvé chaussure à son pied –elle « comprend qui est le vrai Bertram » – se demande si nous sommes « des jouets aux mains de forces obscures ». Il apparaît que ces « forces obscures » ont été lancées par Jeeves et sa propre fiancée Madame Tilmon. Jeeves la décrit comme une «personne qui étudie les individus », ce qui est caractéristique de toutes les gentilles dames. Elles voient ce qui se passe dans l’âme des hommes avant de se préoccuper des idées, nobles ou non, qui préoccupent ces « messieurs ». Jeeves et Madame Tilmon ont été ensemble les agents de ces forces invisibles mais providentielles qui ont facilité les cloches du mariage de Bertie et Georgiana.
A la fin du livre on réalise que Faulks a réussi à donner à Wooster une fin correcte car on peut dire que finalement lui et Georgiana ont été heureux le reste de leurs jours, ce qui n’est pas le cas de Woodehouse. Bertie a même remarqué qu’une des pièces de Malbury Hall dont Georgiana devait hériter, pouvait devenir une chambre d’enfants. Le « Code des Woosters » n’autorisait aucune nouvelle escapade, et il n’en désirait pas.
Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2014/the-real-wooster-b.html