François, le Washington Post, et moi - France Catholique
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La justice de Dieu
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François, le Washington Post, et moi

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La semaine dernière, le Washington Post a publié en première page un article sur des conservateurs qui « critiquaient publiquement le pape » dans lequel j’ai été « cité » (au sens de Pickwick). Il ne faut pas que vous soyez surpris quand vos mots sont déformés par la presse, sortis de leur contexte, ou même inversés dans des positions opposées à celles que vous tenez habituellement, surtout quand il s’agit de catholicisme. Mais cette expérience était quelque chose de nouveau pour moi.

Depuis que l’article est paru, quelques amis m’ont remercié. D’autres m’ont écrit — ou ont eux-mêmes publié des articles — me reprochant de penser que c’était mon travail de contrôler les déclarations du pape. Pour la petite histoire, cela ne m’a même jamais traversé l’esprit. Je suis simplement étonné de voir quel nouvel esprit de miséricorde et quelle capacité de toucher les gens François a apporté au monde entier. Il peut être juste l’homme dont nous avions besoin pour transmettre la richesse de la foi, telle qu’elle a été développée en termes modernes par ses deux grands prédécesseurs, aux catholiques de l’intérieur, aux catholiques déchus et aux non-catholiques de l’extérieur, aux pauvres et aux marginaux à travers le monde .

Ainsi, curieusement, en raison du trouble créé sur le sujet par la journaliste, je me trouve partiellement d’accord avec certaines critiques de ce « je » dis, et m’escrime un peu avec des amis qui pensent qu’ils sont d’accord avec « moi ». Cela n’arrive pas chaque jour. Mais cela arrive — et clairement aussi au pape — lorsque vous avez affaire à des journalistes qui pensent en termes partisans.

Il y a peu de sérieux professionnel dans le journalisme religieux — évidemment pas seulement au Post. Par exemple, après la parution de l’article, j’ai essayé de faire comprendre à la journaliste que, entre autres approximations, elle utilisait traditionnel et traditionaliste en termes identiques. C’est comme un journaliste politique, lui-ai-je dit, ne connaissant pas la différence entre un républicain et un libertaire. Je pensais que cette humble comparaison, tirée du monde simple des nouvelles de première page du Washington Post, pourrait l’éclairer. Ce n’a pas été le cas.

Les différences entre les musulmans sunnites et chiites, comme nous le savons, comptent. Les différences entre juifs orthodoxes, conservateurs, réformateurs comptent aussi. Mais quand il s’agit de catholicisme, tout ce qui est en dehors du champ d’intérêt du libéral laïque, c’est juste « hors sujet ».

En plus d’un manque d’intérêt pour le contenu du catholicisme, il y a un sentiment étrange de fonctionnement déviant. Il est trop difficile de reproduire ici tout l’épisode, mais si vous lisez l’histoire, elle parle d’un conseiller catholique qui avait un client qui se décrit comme un catholique « pape François-Nancy Pelosi ». Maintenant, si cela avait été rapporté pour souligner les conclusions absurdes que certaines personnes ont tirées de quelques remarques ambiguës par le Pape François, on pourrait en tirer quelque chose. Dans l’état actuel, cela donne l’impression que cet hybride politico-religieux improbable est maintenant une partie importante de l’Eglise.

Un problème beaucoup plus important se situe à la croisée de l’ignorance et des préjugés. Dans ce domaine, il n’y a que des camps et des conflits — parfois délibérément exacerbés par la presse. Voir les choses en partie comme ceci et en partie comme cela, comme un processus dans lequel les concepts sont en développement, comme nécessitant une compréhension souple des questions qui ne se prêtent pas à un clivage gauche droite, ovins et caprins, est simplement rejeté comme une obsession de spécialistes. Et ignoré dans le propos.

Dans la même veine, la mésinterprétation la plus troublante s’étend des deux côtés d’une ellipse. À un moment donné, nous avons dit qu’il y avait eu de bons et de mauvais papes. J’ai même plaisanté en disant que Benoît XVI, en théologien prudent qu’il est, s’est abstenu de dire que le Saint-Esprit dicte entièrement le choix, puisque nous avons eu les Borgia etc. « Il y a de bons et de mauvais papes et Dieu permet cela. » Quatre points plus tard, je suis dépeint comme disant que « je m’habitue à cela », ce qui signifie que je m’habitue à avoir un « mauvais » pape. Ce qui est a été évoqué entre les deux, et tout au long de l’entrevue, mais non retranscrit, c’était mon appréciation équilibrée du pape François à ce jour : un homme extraordinaire qui a un don rare pour toucher les gens. Mais qui, dans le feu de l’action, et lorsqu’il improvise, formule parfois mal les choses. Il l’a dit lui-même.

Je me suis « habitué à » un grand pape qui a tendance à laisser certaines choses imprécises — la racine des récentes controverses. La journaliste du Post a revendiqué — et elle continue à le faire — qu’elle ne comprend pas mon point de vue parce que j’ai « blâmé » le pape pour les malentendus qui ont surgi.

Ce que j’ai vraiment dit, c’est que les « conservateurs », loyaux et respectueux que nous sommes, qui que soit celui qui est pape, ne devraient pas simplement trouver de bonnes explications. François peut et doit être défendu ; William Doïno a fait ici un travail remarquable sur ce point. Pourtant, il y a des déclarations imprécises. Et des pensées à demi exprimées. Ce ne sont pas des « mauvaises traductions . » Des controverses similaires ont surgi dans la presse italienne.

Et il y a beaucoup de gens, par conséquent, qui pensent que l’Eglise a déjà changé son enseignement sur l’homosexualité, l’avortement, le divorce et la litanie habituelle moderne. Ils ont tort, bien sûr, vraiment tort. Mais il est utile de se demander pourquoi, d’autant que la presse agit comme un mégaphone pour eux. Un homosexuel a envoyé une lettre par la poste en réponse à cet article, en disant qu’il a assisté à la messe de nouveau après vingt-cinq ans d’absence. C’est très bien, mais il peut être surpris par ce qu’il y entend.

Ce n’est pas « critiquer le pape », par exemple, de souligner : « Quand NARAL 1 vous envoie une note de remerciement, il est clair que quelque chose a été mal communiqué. » Plusieurs évêques, comme nous le savons, ont dû produire des déclarations informant les gens que l’enseignement de l’Église n’a pas changé.

François va mieux appréhender tout cela au fur et à mesure, comme il devient plus familier avec l’ampleur de ses responsabilités en tant que pape. Comme je l’écrivais ici, il a finalement eu le dessus dans l’interview de la Repubblica. Mais les médias modernes – dans laquelle nos paroles apparaissent et sont disséquées dans l’instant, et rarement avec une réflexion pondérée – présentent un défi unique pour tous ceux qui veulent communiquer en dehors de sentiers battus. Et étant donné les préjugés religieux de la plupart des journalistes, c’est un problème qui ne peut être que géré, mais pas entièrement résolu.

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