Mon bureau de Président de l’Association « Aid to Church in Need » (ACN) [Aide à l’Église en Détresse pour les USA] est couvert de documents relatant des atrocités commises contre des chrétiens. J’ai souvent eu l’occasion de rencontrer des témoins de ces crimes.
Le mois dernier j’ai passé l’après-midi au bureau d’ACN à Greenpoint, à Brooklyn, avec Mgr Elias Sleman, Ordinaire maronite de Syrie. Il dépeignait les crimes commis par des musulmans contre les chrétiens, chassant ses ouailles vers des refuges dans la montagne, où il n’y a guère de moyens de subsistance.
On n’a en général que très peu d’informations diffusées par les grands médias ou enregistrées par les historiens contemporains sur les souffrances endurées par les chrétiens au cours du vingtième siècle. La journaliste italienne Francesca Paci avoue que « nous ignorons bien des événements concernant les chrétiens en Irak, en Algérie, en Inde, et, ce qui est inacceptable, nous prétendons ne pas voir grand’chose.»
Exception remarquable: l’ouvrage incisif de Robert Royal, « The Catholic Martyrs of the TwentiethCentury » [Les catholiques martyrs au vingtième siècle] publié en 2000, à l’époque des célébrations du nouveau millénaire. Quant au vingt-et-unième siècle, nous avons la chance de disposer du nouvel ouvrage du reporter catholique John L. Allen, Jr : « The Global War on Christians: Dispatches from the Front Lines of Anti-Christian Persecution ». [Guerre aux chrétiens dans le monde entier – dépêches depuis les diverses lignes de front anti-chrétiennes].
Mr Allen précise que le mot « guerre » est actuellement galvaudé au profit de diverses causes, par exemple « guerre anti-femmes », ou « guerre contre les fêtes de Noël ». À son avis, le mot s’applique correctement « quand on est confronté à une situation urgente.» Et comme 80% des actes de discrimination religieuses sont actuellement commis dans le monde contre des chrétiens, Allen soutient l’urgence absolue de parler de guerre.
Son livre ne traite pas de questions de liberté religieuse en Amérique ou en Europe, mais de véritables menaces corporelles, physiques, sur les chrétiens dans d’autres régions du monde. Ce livre évacue l’idée que la violence anti-chrétienne est « rare et exceptionnelle ».
Divers organismes ont estimé que depuis le début de ce siècle cent à cent-cinquante mille chrétiens ont subi le martyre chaque année. Les chrétiens subissent d’autres formes d’agression, spécialement dans les pays où ils sont minoritaires, discrimination sociétale, discrimination à l’embauche, discrimination devant la loi, allant même jusqu’à la suppression d’établissements missionnaires, et à la contrainte à renier la foi chrétienne.
Un organisme américain d’étude sur les relations entre la religion et les comportements de par le monde révèle qu’entre 2006 et 2010 des agressions contre des chrétiens ont été commises dans nombre de pays — en gros les trois quarts des nations dans le monde. 37% de ces pays appliquent des restrictions « sévères » ou « très sévères » aux activités chrétiennes.
L’ONG « Open Doors World Watch List » [Observatoire des pays pratiquant la persécution anti-chrétienne] a établi cette année une liste des « pays où il est le plus dangereux d’être chrétien.» En tête de la liste de vingt-cinq pays, la Corée du Nord, l’Afghanistan, l’Arabie Saoudite, la Somalie et l’Iran. Dix-huit de ces pays sont en majorité musulmans.
C’est un phénomène global selon Allen, car les vingt-cinq principaux sont éparpillés à la surface du globe.: six en Asie, sept en Afrique, huit au Moyen-Orient … et quatre en Europe de l’Est, dans l’ancien bloc soviétique.
Allen cite dix motifs de l’accroissement vertigineux des persécutions contre les chrétiens les deux principaux étant:
– Dans de nombreux pays s’établit une relation étroite entre nationalisme et religion; le christianisme, ou certaines de ses formes, est perçu comme une menace à l’identité nationale.
– Les chrétiens sont par endroits devenus les avocats débridés des droits de l’homme et de la démocratie, ils seraient donc une menace contre les régimes autoritaires — en particulier à cause des réseaux mondiaux de soutien auxquels ils ont accès, contrairement à la plupart des autres groupes religieux.
Allen décrit les persécutions contre les chrétiens, spécialement dans vingt-huit pays d’Afrique, Asie, Amérique latine, Moyen Orient et Europe de l’Est.
J’ai été frappé en découvrant que la Colombie est considérée par le Vatican comme le pays le plus dangereux au monde pour travailler avec l’Église.
La Colombie, nation de quarante-six millions d’habitants comporte d’immenses zones hors la loi, peuplées de membres de cartels de drogue, de groupes para-militaires révolutionnaires et de tribus païennes. Le point commun à ces groupes disparates est la haine envers les prêtres et travailleurs chrétiens.
« Rescue Christians » [Secourir les chrétiens], association Évangéliste, suit de près la violence en Colombie et révèle :
– 30 pasteurs (en moyenne) sont assassinés chaque année.
– Plus de 200 églises ont été fermées, interdites d’accès.
– Les habitants chrétiens de nombreuses agglomérations ont été chassés de chez eux et placés en camps de concentration.
– En 2011 et 2012, 60% des assassinats de travailleurs d’ONG « droits de l’homme » ont été commis en Colombie.
En conclusion, à la question « Que faire ?» Allen suggère: des prières collectives comme celles que l’on disait naguère à la fin de la messe pour la conversion de la Russie; le but de ces prières instituées en 1930 par S.S. Pie XI était d’ « appeler à la tranquillité et à la liberté de pratiquer sa foi pour le peuple affligé de Russie.» Des prières pour les chrétiens persécutés dans le monde rappelleraient aux catholiques que des gens souffrent pour leur foi.
Allen appelle à soutenir les organismes catholiques de bienfaisance, « fournisseurs d’assistance humanitaire aux chrétiens en souffrance ». Et enfin il invite les catholiques à exercer des pressions sur leurs gouvernants afin de promouvoir la liberté religieuse, en particulier en faveur de la religion la plus persécutée au monde.
Lors d’une conférence à Londres en 2011 sur les problèmes de la chrétienté au Moyen-Orient, le Patriarche catholique de Jérusalem, Mgr Fouad Twal posait la question qui s’adresse à tous :
« Quelqu’un entendra-t-il nos cris ? »
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Photo : John L. Allen Jr.
Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2013/the-global-war-on-christians.html