Êtes-vous neutre, transparent ou muet ? - France Catholique
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Marie dans le plan de Dieu
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Êtes-vous neutre, transparent ou muet ?

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Pour lire ce texte, cher lecteur, prendre vos précautions : je me lâche dans le cirque des mots pour « ne rien lâcher », comme cela se dit désormais un peu partout. Les poissons désormais sont noyés.

Depuis quelques mois il ne se passe pas de jour sans que les saltimbanques du PS ne découvrent de nouvelles planques idéologiques : l’une des plus récentes est le déguisement « neutrogénique », susceptible de transformer un homme normal en un muet consentant. Système Coué à tous les rendez-vous médiatiques : « L’État est neutre, neutre, neutre : telle est la règle de la laïcité à la française et il n’y en a pas d’autres ». On croirait un verset de la Bible. Le peuple éberlué nous regarde et nous interroge :

« Hello les cathos ! Vous êtes neutres vous aussi ?

– Que dites-vous ?

– Ah ! Vous ne l’êtes donc pas ? C’est pourtant obligatoire aujourd’hui !

– Pourquoi voudriez-vous que l’on soit neutre ?

– Parce qu’être laïque, le Premier ministre venu de Nantes dit qu’il le faut, les opinions non-laïques doivent rester enfermées dans les maisons, qu’elles soient grandes ou petites. Le privé ne doit pas déborder le public et seul le public peut s’adresser à tous.

– Très bien, très bien ficelé, mais dites-nous à quoi bon réfléchir ou penser derrière des murs si on ne peut pas au dehors exprimer les fruits de ses cogitations ?

– Pour que la paix règne parmi nous.

– Oui, nous vous comprenons, mais alors il n’y a plus qu’à aller se coucher dans les cimetières ; là aussi règne la paix ».

Je me fais mon petit théâtre : ces répliques avec l’accent de Marseille ou du Congo Kinshasa, là où la paix se cherche indéfiniment, juste pour laisser mes neurones « seurfer » sur ce thème. Règle du jour : ne jamais se laisser avoir par les chattemites du Rabinagrobis élyséen.

Neutre le parti socialiste ? Allons-donc, j’entends encore les propos du député Binet – son ignorance doit être son excuse, ce dont je le plains – quand il s’adressait à Monseigneur Vingt-Trois ; ce seul exemple suffit : la neutralité n’existe que chez les morts. Pas un juge qui soit réellement neutre, sinon son jugement le serait aussi. Pas un historien, malgré l’ampleur dramatique de ses efforts pour l’être : ses ouvrages seraient alors d’un ennui à rendre cafardeux toute la clique des comiques de « Rire », station radiophonique que je fuis chaque fois qu’elle s’affiche sur l’écran de mon poste. Quant aux politiciens, surtout surtout qu’ils restent partiaux : c’est ainsi qu’ils plaisent aux électeurs !

François Hollande neutre lors des présidentielles aurait été un candidat vaincu, et Sarkozy le fut pour s’être voulu moins vindicatif que son adversaire qui, lui, s’affirmait son ennemi ! François Fillon, parlant des sectaires de sa droite et de sa gauche, donne l’exemple de l’engagé volontaire. Non, la neutralité est réservée à la laïcité conceptualisée de telle manière qu’elle soit impraticable pour tous ceux qui ne pensent pas en socialistes. Quel enseignant oubliera qu’il est membre du FN ou de la Ligue des Bien pensants ? Quel journaliste qu’il écrit pour Je suis partout ou pour Marianne ? Un orateur catholique, s’il en reste, prononcerait-il le panégyrique neutre d’un académicien membre actif du Grand Orient ? Et un calviniste grand teint oserait-il, sur la place publique, faire l’éloge neutre de la Vierge Marie ?

Qui me citera un seul militant neutre ? Or tout le monde milite aujourd’hui… Un seul gourmet objectivement neutre ? Un seul publicitaire concevant un placard sans mentir ? Quant à moi, je sais qui je suis : il est sûr que je ne suis pas neutre. Partisan, oui ! Certainement à juste titre : expression qui prouve à tout un chacun que je dis vrai quand je m’affirme incapable de toute neutralité, surtout quand il s’agit de dire la vérité.

Voici le moment de citer le Cardinal de Paris : « Ce serait une illusion de croire que la société dans laquelle nous vivons est une société neutre. Elle véhicule des valeurs, des conceptions de la vie, des choix moraux qui s’imposent progressivement à ceux qui n’ont pas la capacité de réagir. » La neutralité hollandienne ou peillonesque serait donc de laisser sans voix ceux-là qui n’ont pas cette capacité mais n’en pensent pas moins ? J’espère être compris, mais pas comme le furent les manifestants arabo-kabyles-pieds noirs du 13 mai 1958.

Il est évident ici qu’il n’est pas question de la neutralité telle que la conçoit la Suisse ; pas plus de celle d’un terrain où s’entretenir sans être inquiété : il s’agit de la neutralité du point de vue de l’individu que je suis. L’homme seul, en ses choix, voire en ses haines, ses répulsions, ses désirs, ses détestations, bien entendu en ses amours, ne saurait être neutre. Il a le devoir de ne pas les imposer, il a également celui de les défendre. (Que l’on ne se méprenne pas : la haine ici évoquée concerne le mal, le péché, non l’auteur de ces péchés, de ce mal ; toujours distinguer entre les actes qu’il faut combattre et l’être qui les commet, sauvé en puissance sur la Croix où le Fils le garde en son pardon. Le glissement de nos jugements des faits vers leurs auteurs est coutumier mais coupable. Toute ma compassion pour ceux que je cite, toute ma vigueur pour rejeter ce qu’ils veulent et que je ne saurais approuver sans trahir.)

Je tiens ici une citation de Victor Hugo : « On comprend à merveille le républicain chrétien, on ne comprend pas le démocrate catholique. C’est un composé de deux contraires. C’est un esprit dans lequel la négation barre le passage à l’affirmation, c’est un neutre. Or, en temps de révolution, qui est neutre est impuissant. »

Nous sommes en temps de révolution, dixit Vincent Peillon : « La Révolution n’est pas achevée ». Ce n’est donc pas aujourd’hui et pas plus demain qu’il conviendrait d’être neutre, soit s’obliger complaisamment à l’impuissance. Être neutre exclut de montrer de la vigilance : qui demande de posséder une puissance supérieure, un esprit sans cesse attentif qui dépend entièrement de la vigueur de ses conceptions. Un neutre, même s’il peut témoigner de convictions fortes, se trouve obligé de les garder pour lui : le contraire même de ce qu’exige le devoir de vigilance.

La neutralité à la française, laïque donc, supprime l’échange des idées : elle s’impose et refuse la contrepartie. Il semblait, dans un lointain passé, que la notion n’avait droit de cité que dans les écoles de la République : elle revendique tout, jusqu’aux trottoirs. Et c’est elle qui choisit les affiches.

Ainsi, les Veilleurs, qu’ils soient debout ou assis, sont aux antipodes de cette neutralité dictatoriale. Leur vouloir est connu, mais il ne s’affiche que par une détermination pacifique. Ils n’agressent personne, mais affirment leur choix.
J’étais avec eux hier soir : excellent moment passé en leur compagnie. Philippe Ariño était présent. J’avais assisté à sa conférence le 17 au Centre Saint-Jean d’Angers. Il avait su créer une ambiance des plus sympathiques alors que les sujets abordés n’étaient pas simples. J’ai pris son livre sur l’homophobie 1., très étonné des réponses apportées à ce sujet, qui sont fort éloignées des simplismes véhiculés par nos médias, pourtant aux mains d’experts d’une intelligence qui, désormais, reste à démontrer…

  1. « L’homophobie en vérité », éditions Frédéric Aimard, 60, Rue de Fontenay – 92350 Le Plessis-Robinson