Il y a vingt ans je me suis lancé dans la course comme candidat des partis Conservateur et des Droits de la Vie, pour la mairie de New York. J’étais opposé au démocrate en exercice David Dinkins et au républicain libéral Rudy Giuliani.
Je suis entré dans la course pour offrir un choix aux New-Yorkais, en particulier en ce qui concerne les questions sociales. Tant Dinkins que Giuliani étaient d’accord pour soutenir le droit à l’avortement, la distribution de préservatifs dans les écoles, les droits des homosexuels et s’opposaient aux allocations scolaires.
J’ai cru qu’il convenait que je brigue cette fonction parce qu’ayant fréquenté la municipalité une grande partie de ma vie, j’étais bien placé pour avoir connu, durant des décennies, les dommages afférents au « renouvellement urbain », issu de projets d’ingénieurs sociaux.
J’ai vu des milliers de maisons des classes moyenne et populaire détruites au bulldozer et remplacées par « les projets ». J’ai vu des bureaucrates créer un système de protection sociale qui, pour reprendre les termes de Daniel Patrick Moynihan, avait pour résultat la formation d’une « classe dépendante permanente ». Je fus fréquemment témoin de l’ effondrement des relations anciennes de voisinage pour quelque chose appelé « la communauté », avec ses défavorisés permanents, son racisme rampant, ses crimes incontrôlables et d’innombrables programmes sociaux dont les rêveurs imaginaient qu’ils pourraient résoudre les problèmes ainsi créés. Et ces programmes sont devenus un monstre à l’appétit insatiable pour les dollars du fisc.
En novembre de 1993, j’ai perdu. Mais la bataille valait la peine.
Passons vite à 2013. Dans la course de cette année pour la ville, les candidats sont une collection d’ambitieux d’extrême gauche qui voudraient ramener New York aux jours où le maire de cette époque et toujours icône libérale, John Lindsay, a pris fait et cause pour la Grande Société et où les ingénieurs sociaux ont conduit la plus grande ville du pays à la faillite.
Un candidat pour un État-Nounou qui a voulu se distinguer du troupeau, non seulement a promis de développer la distribution de préservatifs aux élèves de collèges et de lycées, mais a exigé que ces préservatifs soient fabriqués à New York pour créer des emplois.
Et cela empire. Ces vingt dernières années, les règles à suivre par les candidats ont changé de façon significative. Aussi longtemps qu’un candidat suit la ligne du parti libéral, rien d’autre n’importe. Dorénavant, nous avons les candidatures, comme maire, d’Anthony Weiner et, pour le contrôle financier, d’Eliot Spitzer.
Comme membre du Congrès, Anthony Weiner a déshonoré sa fonction et a embarrassé sa famille et ses électeurs avec ses frasques sexuelles. Il a démissionné en 2011, non pas à cause de ses perversions, mais parce qu’il a été rattrapé dans le dédale de ses mensonges sur son comportement.
Weiner, une personne totalement narcissique dont la motivation pour chercher à se faire élire était d’attirer l’attention sur lui, a été incapable d’obtenir un véritable emploi et de mener une vie normale. Après deux ans de réflexion, il a décidé, à la manière de Bill Clinton, que son comportement scandaleux appartenait aux vieilles lunes et il a bondi vers la primaire démocrate.
Depuis quelques semaines les enquêtes d’opinion publique l’ont d’abord placé en tête de sept autres candidats. Mais il est devenu notoire que, durant son retrait chez lui, il a broyé du noir plus que de raison bien qu’il fût sous « assistance ». Il était en relation avec des jeunes filles sous le pseudonyme de « Carlos Danger » et se décrivait comme « un homme d’âge mûr raisonneur et perpétuellement excité ».
La femme politiquement ambitieuse de Weiner et protégée d’Hillary Clinton, Huma Abedin, l’a publiquement défendu, déclarant que, parce qu’elle lui avait pardonné, les New-Yorkais devraient en faire autant. En dépit des révélations, Weiner, sans vergogne, a refusé de se retirer et prospère sur l’attention portée à l’étalage de « Carlos Danger ».
Pour flatter son ego, il a engagé des gens pour former des foules autour de lui pendant les étapes de sa campagne. En outre, ses spots publicitaires montrent ses stagiaires le contemplant dans une attitude de crainte révérencielle.
Et puis il y a la candidature d’Eliot Spitzer – connu sous le nom de Client n°9 – pour le poste de Contrôleur de N.Y.C.
Spitzer, comme Officier de maintien de l’ordre en chef de l’État de New York et Chief Executive Officer – c’est-à-dire Procureur général et Gouverneur – a enfreint à plusieurs reprises les lois de l’État et les lois fédérales. A New York, il a violé une loi contre la prostitution qu’il avait soutenue comme Procureur général et avait signée comme Gouverneur. Spitzer a usé de prostituées en violation de l’acte de Mann.
L’ancien « Shérif de Wall Street » s’est aussi livré au blanchiment d’argent. Mettre en relation l’argent d’une banque vers des destinations illégales – dans son cas pour payer les prostituées – est une violation de la loi fédérale contre le blanchiment d’argent.
La plupart des gens mourraient de honte et éviteraient la place publique pour avoir commis des crimes sexuels. Mais Spitzer, qui rivalise avec Weiner pour le Prix du Narcisse de l’année, a éludé ses activités criminelles comme s’il s’agissait de purs échecs passagers.
Malheureusement, beaucoup de New-Yorkais (mais pas sa femme et ses trois filles qui l’ont fui) achètent son programme. Les sondages récents indiquent qu’il pourrait gagner de justesse.
Oui, beaucoup de choses ont changé depuis ma candidature de 1993. La principale étant que le sens de la dignité manque désormais aux gens à partir du moment où ils ont brigué ou occupé une fonction officielle.
Le sens de la dignité se compose d’empathie et d’autodiscipline. Le philosophe social James Q. Wilson a défini l’empathie comme une « volonté de tenir compte des droits, des besoins et des sentiments d’autrui ».
« L’autodiscipline, a-t-il écrit, est une volonté de tenir compte des conséquences lointaines des actions présentes; bref, c’est être un peu plus orienté vers le futur qu’entièrement tourné vers le présent ».
Weiner et Spitzer sont des cas d’école d’opposition à cette dignité. Mais à New York, capitale nationale du narcissisme, ils peuvent échapper aux conséquences de leur dépravation parce que le sens de la dignité n’a pas d’importance. Ils se glissent douillettement dans l’énorme sous-culture de la ville avec son éthique nihiliste faite d’amour propre, d’auto-célébration de son conformisme et de satisfaction immédiate.
Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2013/the-death-of-character-in-new-york-city.html
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George J. Marlin est rédacteur à The American Catholic Voter. Son ouvrage le plus récent est Narcissist Nation : Reflections of a Blue-State Conservative.