Choix d'une école et justice sociale - France Catholique
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La justice de Dieu
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Choix d’une école et justice sociale

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J’ai toujours aimé la légende familiale selon laquelle nous avions un lien de parenté avec Charles Carroll de Carrollton, le seul signataire catholique de la déclaration d´indépendance des États-Unis.

Hélas, mes recherches généalogiques ne m’ont pas encore permis de découvrir un lien avec ce célèbre patriote, mais l’intérêt que j’ai pris à l’histoire de Charles m’a donné l’occasion de découvrir le fil anti-catholique qui a formé la trame du fondement de notre pays.

Les gens ne se rendent pas compte de l’effet que l’anti-catholicisme a eu dans le développement de notre politique, en particulier dans le domaine de l’éducation. En effet, même les catholiques ne sont pas conscients que la majorité des États ont introduit un biais dans la rédaction de leur propre constitution. Ces « enfants de Blaine », comme on les appelle parfois, ont des rédactions différentes, mais elles ont toutes une chose en commun : l’interdiction de tout financement public d’une éducation « sectaire », « sectaire » étant à l’époque le nom de code pour « catholique ».

James G. Blaine, un congressiste du Maine a introduit le premier « amendement Blaine » en 1875. On ne sait pas si Blaine lui-même était anti-catholique ou s’il voulait simplement profiter de l’opinion des électeurs de l’époque pour servir ses ambitions politiques. Cette dernière hypothèse pourrait être la bonne car il y avait des catholiques dans sa famille. Heureusement cet amendement n’est pas passé, mais ce fut de justesse.

La raison pour laquelle il fut très près de passer était due à une hostilité largement partagée envers les immigrants catholiques qui débarquaient alors aux États-Unis. Comme les écoles publiques étaient effectivement des institutions protestantes financées par des fonds publics, les catholiques ont tout naturellement voulu un système équivalent pour eux. On leur a alors reproché de vouloir vivre en marge de la communauté, et on les a soupçonnés d’un manque de loyauté envers leur nouvelle patrie. Le dessin humoristique « The miter-alligators-climbing-out-of-the-swamp » (Les alligators sortant du marais) est une illustration classique des peurs que les catholiques inspiraient à cette époque.

Après l’échec de l’amendement Blaine au niveau fédéral, ses partisans se sont focalisés sur les États. On se rend compte de leur succès en voyant le nombre de constitutions d’États qui ont inclus une version de l’amendement Blaine.

Passons rapidement à 2013 où le choix d’une école est revenu sur le devant de la scène pour plusieurs raisons, en particulier à cause de la préoccupation des parents concernant l’éducation à la fois scolaire et morale de leurs enfants. Mais beaucoup de ceux qui souhaitent réformer l’école se heurtent au mur des constitutions des États. Dans la plupart des cas, le choix parental est impossible, à moins de modifier la constitution par un amendement.

Les catholiques ont de nombreuses raisons pour se joindre à ces efforts. Le « Gravissimum Educationis » de Vatican II confirme non seulement les droits et les devoirs naturels des parents en ce qui concerne le choix de leur école, mais aussi l’obligation pour les gouvernements de les faciliter :
« Les parents, qui ont à titre principal et inaliénable le droit et le devoir d’éduquer leurs enfants, doivent avoir une vraie liberté de choix de leurs écoles. Donc la puissance publique, qui a l’obligation de protéger et défendre les droits des citoyens, doit s’assurer, dans sa recherche d’une justice égale pour tous, que les subventions publiques soient accordées de telle sorte que les parents puissent vraiment choisir selon leur conscience les écoles qu’ils veulent pour leurs enfants. »
Ce passage résume à lui seul l’enjeu du choix de l’école et pourquoi ce qu’il promeut devrait être adopté. Malheureusement le choix d’une école par les parents est rarement vu comme le problème de justice sociale qu’il est pourtant. A la place, on entend dire au sujet des parents qui choisissent une école paroissiale ou une autre école privée qu’ils s’excluent eux-mêmes de la communauté et par extension du bien commun, un argument que même le Ku Klux Klan a utilisé à son avantage dans les années 20.

Ceux qui s’aventurent néanmoins dans cette bataille ont intérêt à bien se préparer, car l’anti-catholicisme qui imprégnait notre pays lors de sa fondation s’est transformé de nos jours en un sentiment anti-religieux généralisé.

Les commentaires de nos opposants sont quelquefois incroyables. Mon favori est celui d’un commentateur qui rejetait le choix d’une école parce qu’il ne voulait pas apporter son soutien à une école qui enseignait que Jésus chevauchait un dinosaure ! Après de telles remarques, on ne sait pas s’il faut rire ou pleurer.

Le thème commun à tous les opposants est la séparation de l’Église et de l’État mais, au train où vont les choses, la désinformation est une stratégie de choix. Heureusement la Cour suprême, dans le cas Zelman, a clarifié la façon dont on pourrait instaurer un système de choix d’une école qui ne viole pas la constitution.

Dennis Fradley, un habitant de l’Alaska qui se bat pour le choix de l’école, a fait un excellent travail pour répondre aux critiques. Toute personne qui voudrait s’investir dans ce combat contre les amendements Blaine, quel que soit l’État, devrait commencer par le lire.

La principale erreur que partagent les opposants est l’idée que les écoles publiques sont neutres, sur le plan moral comme sur le plan scolaire. Il ne voient pas qu’enseigner à un enfant que Heather a deux mamans, ou que l’utilisation d’un préservatif est un exemple de pratique sexuelle responsable, c’est tout sauf neutre en ce qui concerne la morale.

Cela me rappelle la remarque de Benoît XVI dans « Lumière du monde » : « Personne ne devrait être forcé de vivre selon la « nouvelle religion » comme si elle seule était définitive et obligatoire pour toute l’humanité ». Bien évidemment.


Kristina Johannes est infirmière diplômée et professeur certifiée de planning familial naturel. Elle a été porte-parole de l’Association pour la défense de la famille de l’Alaska (Alaska family Coalition) qui s’est battue avec succès pour l’adoption de l’amendement sur le mariage dans la constitution de l’Alaska.

Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2013/school-choice-as-social-justice.html

Légende de la gravure : Blaine: un échec avec un héritage odieux.