Un autre mythe des modernistes concerne la crucifixion de Jésus. Ce mythe se présente sous plusieurs versions. La première est que Jésus n’est pas vraiment mort sur la croix, qu’Il s’est réveillé dans le tombeau, s’est effondré pendant quelques jours, puis a fini par mourir.
Même en supposant que le Suaire de Turin n’est pas le linceul de Jésus, il est quand même celui de quelqu’un qui a été flagellé à la limite de la mort, puis crucifié. Il montre des tortures dont personne dans une nation civilisée ne peut imaginer d’équivalent. Il y a de grandes entailles dans le dos, près de la colonne vertébrale, causées par les éclats de verre et de fer qui étaient au bout du fouet romain. Ils déchiraient et creusaient la chair comme des hameçons, avant d’être arrachés de force. Les artères et la colonne vertébrale ne sont pas épargnées. Les Romains savaient ce qu’ils faisaient.
Après tout, ils n’étaient pas incompétents. Ils ne pouvaient pas se permettre de l’être. Ils tenaient une frontière de milliers de kilomètres de long contre les incursions barbares, avec une armée bien plus restreinte que la nôtre.
L’obéissance devait être rapide et sans contestation. Nous avons le témoignage du centurion : « Moi aussi, dit-il à Jésus, j’ai de l’autorité, et quand je dis à un homme « fais ceci », il le fait, ou « va là-bas », il y va. ». La désobéissance était un crime majeur. Ce sont les mêmes Romains qui se punissaient par la décimation 1: si une unité manquait de courage au combat, le commandant pouvait ordonner aux soldats de se ranger en ligne, glaives sortis. Les soldats se comptaient et tous les dixièmes étaient exécutés sur place par le camarade situé à côté de lui.
Les Romains pratiquaient la crucifixion depuis longtemps. Ils savaient que le condamné mourait par asphyxie, c’est pourquoi ils inclinaient ses pieds vers le bas, afin de lui fournir l’appui minimum pour soulever son corps, gonfler sa poitrine et prendre une inspiration. Presque pas d’appui : juste assez pour souffrir le supplice, car chaque tentative irritait les racines nerveuses des pieds et des mains cloués.
Comme le Sabbat arrivait, les trois hommes crucifiés sur le Calvaire devaient être morts avant le coucher du soleil, afin que Pilate n’offensât pas inutilement ses ennemis méfiants parmi les Juifs. C’est pourquoi les soldats donnèrent la mort à deux d’entre eux selon la procédure usuelle. Ils leur cassèrent les genoux. L’air ne pouvait ainsi plus parvenir aux poumons. C’était atroce, et aussi efficace que l’étouffement d’un homme dans un carcan.
Mais ils ne se donnèrent pas la peine de casser les genoux de Jésus, car Jésus était déjà mort. Est-ce que le centurion responsable aurait pris le risque d’une erreur ? Pas s’il tenait à la vie. Nous ne parlons pas ici d’un papier ni d’une démonstration d’incompétence. Parce que Jésus n’était pas un prisonnier ordinaire. L’inscription au sommet de la croix en témoigne : « Jésus de Nazareth, Roi des Juifs », écrite en grec, en latin et en hébreu. La force d’exhortation de ces mots ne doit pas nous échapper, et elle n’a pas échappé aux témoins présents au Calvaire. Voilà ce qui arrive à ceux qui se font rois et qui défient l’empire romain.
Crucifixion (avec la lance de Longinus) par Fra Angelico, v. 1440
C’est pourquoi le centurion s’est assuré autant qu’il pouvait l’être. Il n’a pas donné son coup de lance en amateur. Il avait la lance qui convenait. Il a percé le côté de Jésus, à travers les poumons et le péricarde, et il en est sorti du sang et de l’eau, selon le témoignage qui porte toutes les marques de celui d’un témoin oculaire. L’eau est le liquide provenant des poumons noyés, le résultat d’une lente asphyxie et d’une insuffisance cardiaque congestive. L’apôtre Jean le remarque parce que ça lui paraît étrange, cela ne l’était peut-être pas pour le centurion. Si vous voyiez quelqu’un donner un coup de couteau à une personne et que du sang et de l’eau jaillissent, vous le remarqueriez aussi.
Voilà qui clôt le débat. Un ballon percé par une aiguille n’est plus un ballon. Des poumons transpercés ne sont plus que d’inutiles morceaux de chair. Jésus n’était pas mort ? Son corps, dans l’état où il était, n’aurait pas plus pu être réanimé – ce qui aurait en tout cas été miraculeux – que si l’on lui avait arraché et jeté le cœur.
D’accord, Jésus est mort, disent les mythologistes. Mais quelqu’un aurait pu voler le corps dans le tombeau. Vraiment ? Les Juifs étaient des pilleurs de tombes, n’est-ce pas ? Et pendant le Sabbat ? Comment ? Ont-ils battu les gardes? Qu’est-il arrive aux soldats postés devant ce tombeau ? Leur a-t-on retenu une journée de solde ? Comment expliquer les apparitions de Pâques et des jours suivants ? Et pourquoi quelqu’un l’aurait-il fait ? Pour répondre un mensonge à propos de Sa résurrection ?
Il n’y a aucun commencement de preuve que les disciples avaient compris à quoi Jésus faisait allusion lorsqu’Il leur disait qu’Il ressusciterait. Tous les témoignages suggèrent qu’ils ne comprenaient pas. Ces conspirateurs auraient-ils alors consacré leurs vies à un mensonge à propos de quelque chose que personne ne comprenait ? Tout à coup saisis par une théologie de la résurrection ? Ils auraient été lapidés, comme Jacques, le parent de Jésus, ou crucifiés la tête en bas comme Pierre, ou écorché vif, comme Barthélémy, pour rien ?
Eh bien, disent ces universitaires de confiance, les profanateurs de sépultures ne sont pas les mêmes personnes que celles qui ont connu le Seigneur ressuscité. Tout cela serait bizarre, tout de même.
Nous devons supposer que des gens issus d’une culture qui traitait le corps des personnes aimées avec la plus grande sollicitude, utiliseraient le corps du Seigneur comme un volant de badminton. Nous devons croire qu’un Pierre était complètement dans l’ignorance des actions d’un André, et qu’il l’est resté jusqu’à la fin de sa vie.
Nous ne pouvons pas tenir compte de Marie-Madeleine, qui suppose que seuls des ennemis auraient déplacé le corps, pour ajouter l’insulte aux blessures. Mais s’ils l’avaient fait, ils auraient alors pu ressortir le corps plus tard, pour faire taire les apôtres. Ils ne l’ont pas fait.
Et les disciples témoignent qu’ils ont vu, touché, parlé et même mangé avec le Seigneur ressuscité. Alors vient le mythe de secours, celui des Fous. A suivre.
Anthony Esolen est conférencier, traducteur et écrivain. Ses derniers ouvrages sont « Réflexions sur la vie chrétienne : notre histoire est l’histoire de Dieu » et « Dix façons de détruire l’imagination de votre enfant ». Il enseigne à l’Université Providence.
Tableau : Crucifixion (avec la Lance de Longinus) par Fra Angelico, c. 1440.
Pour aller plus loin :
- NdT : « Les Romains pratiquaient la décimation lors des défaites de leurs propres armées. En cas de défaite grave, la sentence pouvait être cruelle : un légionnaire sur dix était exécuté parmi les survivants, l’objectif étant de punir la légion tout entière, jugée collectivement responsable de la défaite. Les légionnaires devant être punis étaient divisés en groupes de dix. Chaque soldat piochait un « papier », et ceux sur qui le sort tombait étaient battus à mort ou lapidés par leurs neuf camarades. Ceux-ci étaient ensuite nourris d’orge à la place de blé, forcés de dormir hors du camp et de renier le sacramentum.
Les punis étant tirés au sort, chaque soldat-citoyen, quel que soit son rang, pouvait être exécuté de la sorte, ce châtiment inspirait une grande peur dans les légions romaines. »
Source : « http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9cimation_(Rome_antique) »