Le défi de Vincent Peillon - France Catholique
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Le martyre des carmélites
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Le défi de Vincent Peillon

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Vincent Peillon n’en démord pas. Il est en train de mener à bien son projet d’un enseignement laïque de la morale, dans tous les établissements scolaires, du CP à la terminale. Pour nos confrères du Monde, il a précisé qu’il s’agissait « d’un ensemble de connaissances et de réflexions sur les valeurs, les principes et les règles qui permettent, dans la République, de vivre ensemble selon notre idéal commun de liberté, d’égalité et de fraternité ». Nous restons néanmoins un peu sur notre faim, car notre ministre de l’Éducation nationale, s’il détaille les modalités d’application de ce qui est qualifié de nouvelle discipline, se garde encore de nous révéler son contenu. Certes, il nous est dit que la morale laïque n’est pas anti-religieuse, ce dont nous nous félicitons. Ou encore qu’elle est anti-dogmatique, ce qui peut être rassurant au sens que l’on ne serait pas prisonnier d’une idéologie unique, à moins qu’il ne s’agisse d’une de ces traditionnelles attaques contre le dogme religieux. Mais il n’en faut rien croire, puisque le ministre semble s’inscrire dans une démarche consensuelle.

Vincent Peillon a le mérite d’être voué, corps et âme, à l’Éducation nationale. Il était préparé de longue date à s’installer rue de Grenelle. Plusieurs de ses collègues, notamment ceux de l’Agriculture et de la Défense nationale se distinguent ainsi par leur vraie passion pour leur ministère, l’un et l’autre étant très instruits de leurs tâches. Mais lui, Vincent Peillon, est plus particulièrement attaché à une tradition très IIIe république, celle de Jules Ferry et aussi de Ferdinand Buisson. Lorsqu’il était venu à radio Notre-Dame, il y a quelques années, j’avais signalé, sans qu’il proteste, qu’il se trouvait en contradiction avec une conception de la laïcité qui passe par la neutralité philosophique et n’impose que la coexistence pacifique des différences intellectuelles et spirituelles. C’est pourquoi je continue à m’interroger sur son projet. Comment va-t-il surmonter la difficulté d’une définition normative de la morale et donc de son contenu, en opposition flagrante avec la division du pays, celle qui s’affirme en ce moment sur une affaire aussi centrale que le mariage ? Personnellement, je ne suis pas hostile à la réaffirmation de certains devoirs reconnus en commun. Mais comment rebâtir un socle de convictions partagées, alors que nous ne sommes plus d’accord sur des valeurs essentielles ? J’attends donc la suite avec une certaine impatience.

Chronique lue sur Radio Notre-Dame le 23 avril 2013.